Cass. com., 20 avril 2017, n° 15-25.664
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocat :
SCP Gatineau et Fattaccini
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 26 mars et 2 juillet 2015), que la société Elimmo et M. X..., son gérant, tous deux associés de la société Commercia, ont obtenu, le 28 août 2007, le remboursement d'une partie de leurs comptes courants d'associés ; qu'après que la société Commercia eut été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 22 septembre 2008 et 19 novembre 2009 et la date de la cessation de ses paiements fixée au 1er avril 2007, le liquidateur a demandé l'annulation des paiements reçus par M. X... et la société Elimmo, en faisant valoir que ces derniers avaient eu connaissance de l'état de cessation des paiements ; que la société Elimmo ayant été mise en redressement judiciaire le 7 mai 2015, la société Saint Rapt-Bertholet et Mme Y..., désignés respectivement administrateur et mandataire judiciaire, sont intervenus à l'instance ;
Sur le pourvoi, en ce qu'il attaque l'arrêt du 26 mars 2015 :
Vu l'article 978 du code de procédure civile ;
Attendu qu'aucun grief n'étant formulé contre cet arrêt, il y a lieu de constater la déchéance du pourvoi ;
Sur le pourvoi en ce qu'il attaque l'arrêt du 2 juillet 2015 :
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... et la société Elimmo, ainsi que l'administrateur et le mandataire judiciaire de cette dernière, font grief à l'arrêt d'annuler les virements de 670 000 euros et de 230 000 euros et de les condamner à rembourser ces sommes au liquidateur alors, selon le moyen, que le ministère public peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l'audience ; que lorsqu'elles sont écrites, les conclusions du ministère public doivent être communiquées aux parties ou du moins mises à leur disposition au plus tard au jour de l'audience ; qu'en mentionnant en l'espèce dans son arrêt que, « par réquisition du 19 décembre 2014, le procureur général s'en rapporte à la décision de la cour », sans constater que M. X... et la société Elimmo, préalablement à l'audience des plaidoiries du 2 juin 2015, avaient eu communication de cet avis nécessairement écrit du ministère public, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 16 et 431 du code procédure civile ;
Mais attendu que l'avis écrit du ministère public, par lequel ce dernier déclare s'en rapporter, étant sans influence sur la solution du litige, n'a pas à être communiqué aux parties ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que le ministère public a donné son avis consistant à s'en rapporter à justice ; que dès lors, cet avis n'avait pas à être communiqué aux parties ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... et la société Elimmo, ainsi que l'administrateur et le mandataire judiciaire de cette dernière, font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°) que la connaissance de l'état de cessation des paiements au moment du paiement survenu en période suspecte implique une connaissance précise de l'incapacité du débiteur à faire face au passif exigible au moyen de son actif disponible ; qu'elle ne peut dès lors être déduite de la seule connaissance de difficultés financières ayant justifié la sollicitation et l'obtention d'un échéancier auprès de certains créanciers ; qu'en se bornant à retenir que M. X..., le 23 août 2006, avait proposé au service des impôts un échéancier pour le paiement de l'impôt sur les sociétés 2005, qu'il avait établi des chèques, ce même jour ainsi que les 10 octobre et 12 novembre 2006, en exécution de cet échéancier, et qu'il avait fait de même à l'égard de la société Premalliance, le 31 octobre 2006, et en estimant qu'il se déduisait nécessairement de ces seuls éléments que M. X... et la société Elimmo, dont il était le gérant, étaient parfaitement informés de la situation financière de la société Commercia et ne pouvaient ignorer son état de cessation des paiements à la date du 1er avril 2007, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-2 du code de commerce ;
2°) que la connaissance de l'état de cessation des paiements doit être personnelle à chaque bénéficiaire d'un paiement annulable ; que la connaissance de cet état par le mandataire n'implique pas en soi sa connaissance par le mandant ; qu'en se bornant à retenir que la société Elimmo avait nécessairement connaissance de l'état de cessation des paiements au moment du remboursement dont elle avait bénéficié par cela seul que M. X..., son gérant, avait lui-même cette connaissance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-2 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant constaté que M. X... cogérait effectivement la société sur le plan financier, négociant des échéanciers avec les créanciers et les mettant en oeuvre en signant des chèques, et qu'il avait omis de déclarer la cessation des paiements de celle-ci malgré la connaissance qu'il en avait, la cour d'appel, qui a mis ainsi en évidence la connaissance personnelle de l'état de cessation des paiements qu'avaient M. X... et la société Elimmo au moment du remboursement de leurs comptes courants, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
CONSTATE LA DECHEANCE du pourvoi en ce qu'il attaque l'arrêt du 26 mars 2015 ;
REJETTE le pourvoi en ce qu'il attaque l'arrêt du 2 juillet 2015.