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Décisions

Cass. com., 11 juin 2014, n° 13-17.997

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

M. Rémery

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

SCP Marc Lévis, SCP Piwnica et Molinié, SCP de Chaisemartin et Courjon

Paris, du 7 mars 2013

7 mars 2013

Joint les pourvois n° F 13-17.997 et F 13-18.112 qui attaquent le même arrêt ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés Scandale et Scandale expansion (les sociétés débitrices) ayant été mises en liquidation judiciaire le 30 juillet 2007, des immeubles leur appartenant ont été vendus pour un prix que la société MJA, désignée en qualité de liquidateur, a réparti entre leurs créanciers par un état de collocation qui a été contesté ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° F 13-18.112 :

Attendu que la société MJA fait grief à l'arrêt d'avoir dit que les frais de justice ne seront colloqués avant la créance de la société BNP Paribas (la banque) que pour ceux nés antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, alors, selon le moyen :

1°) que selon l'article L. 643-8, alinéa 1, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, applicable en l'espèce, le montant de l'actif, distraction faite des frais et dépens de la liquidation judiciaire, des subsides accordés au chef d'entreprise ou aux dirigeants ou à leur famille et des sommes payées aux créanciers privilégiés, est réparti entre tous les créanciers, au marc le franc de leurs créances admises ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la société MJA, ès qualités de liquidateur judiciaire et de créancier des sociétés débitrices, soutenait que les frais de justice postérieurs au jugement d'ouverture devaient bénéficier du traitement favorable résultant de l'application à titre principal de l'article L. 643-8 susvisé et, dès lors, être prélevés sur l'actif du débiteur avant toute distribution et ainsi payés, par distraction, avant la créance hypothécaire de la banque ; que dès lors, en se bornant à affirmer qu'il s'inférait des dispositions de l'article L. 641-13 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 applicable en l'espèce, que seules les créances salariales garanties par le super privilège et les frais de justice antérieurs au jugement d'ouverture primaient la créance hypothécaire de la banque, sans rechercher, comme elle y était invitée, si par application des dispositions dérogatoires de l'article L. 643-8, alinéa 1, du code de commerce, la répartition de l'actif des sociétés débitrices au profit des créanciers ne devait pas intervenir après paiement par distraction des frais de justice de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 643-8, alinéa 1, du code de commerce ;

2°) que l'article L. 641-13, II, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 applicable en l'espèce, prévoit que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées par priorité à toutes les autres créances à l'exception de celles qui sont garanties par le super privilège des salaires, des frais de justice et de celles qui sont garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales ; qu'aucune disposition de l'article L. 641-13 ne distingue entre les frais de justice antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective et les frais de justice qui y sont postérieurs, ce dont il résulte qu'indifféremment de leur caractère antérieur ou postérieur au jugement d'ouverture, l'ensemble des frais de justice sont privilégiés et priment les créances antérieures assorties de sûretés spéciales ; que dès lors, en retenant en l'espèce que les frais de justice postérieurs au jugement d'ouverture étaient primés par la créance hypothécaire de la banque, la cour d'appel a violé l'article L. 641-13 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, que les dispositions de l'article L. 643-8, alinéa 1er, du code de commerce, prévoyant la distraction des frais et dépens de la liquidation judiciaire avant distribution du montant de l'actif, n'autorisent pas le prélèvement prioritaire de l'ensemble des frais de justice sur le prix de vente d'un immeuble hypothéqué en méconnaissance du classement des créances organisé, en cas de liquidation judiciaire, par l'article L. 641-13, II et III, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

Attendu, d'autre part, qu'il résulte de ce dernier texte que les créances hypothécaires priment les frais de justice postérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi n° F 13-17.997 :

Vu les articles 2376 du code civil, L. 641-13 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008, et L. 3253-16, 2° du code du travail ;

Attendu qu'aux termes du dernier de ces textes, les sommes autres que les créances qu'il énumère, dont les institutions de garantie contre le risque de non-paiement des salaires en cas de procédure collective ont fait l'avance, leur sont remboursées dans les conditions prévues pour le règlement des créances nées antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective et bénéficient alors des privilèges qui y sont attachés ; qu'il en résulte que les créances correspondantes de ces institutions sont légalement réputées être des créances antérieures, sans distinction de date de naissance, et, lorsqu'elles bénéficient du privilège général des salaires, priment, en application du premier de ces textes, les créances hypothécaires ;

Attendu que, pour colloquer l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) après la banque, créancière bénéficiaire d'une hypothèque garantissant des concours accordés aux sociétés débitrices avant l'ouverture de leur procédure collective, l'arrêt retient qu'en application des dispositions de l'article L. 641-13 du code de commerce, les créances salariales nées postérieurement à la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire sont primées par les créances hypothécaires antérieures et que, faute pour l'AGS d'établir l'antériorité, par rapport à cette date, de sa créance d'avances, elle ne peut bénéficier d'un rang préférable à celui de la banque ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, les premier et troisième par refus d'application, le deuxième par fausse application ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi n° F 13-18.112.