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Décisions

TUE, 3e ch., 28 janvier 2015, n° T-41/14

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Argo Development and Manufacturing Ltd

Défendeur :

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), Clapbanner Ltd

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Papasavvas

Juge :

M. Bieliūnas

Avocats :

Me Brisset, Me Pohlmann, Me Hanne

OHMI, 22 oct. 2013

22 octobre 2013

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 mars 2010, Clapbanner Ltd a déposé une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2        Le dessin ou modèle dont l’enregistrement a été demandé (ci-après le « dessin ou modèle contesté ») est représenté comme suit :

            mod4.png

3        Le dessin ou modèle contesté a été enregistré le jour du dépôt de la demande d’enregistrement sous le numéro 1 684 325-0001 et publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires n° 173/2010, du 5 août 2010. Il est destiné à être appliqué à des « articles de publicité » relevant de la classe 20-03 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié.

4        Le 20 avril 2011, la requérante, Argo Development and Manufacturing Ltd, a présenté, devant l’OHMI, une demande en nullité du dessin ou modèle contesté fondée sur les articles 4 à 6 du règlement n° 6/2002.

5        À l’appui de sa demande en nullité, la requérante a invoqué les dessins ou modèles communautaires enregistrés le 26 septembre 2007 sous les numéros 796 446-0001 à 796 446-0004 pour des « articles de publicité» relevant de la classe 20-03 au sens de l’arrangement de Locarno, tel que modifié. Ces dessins ou modèles sont les suivants :

–        dessin ou modèle n° 796 446‑0001 :

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–        dessin ou modèle n° 796 446‑0002 :

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–        dessin ou modèle n° 796 446‑0003 :

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–        dessin ou modèle n° 796 446‑0004 :

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6        Par décision du 20 mars 2012, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité et prononcé la nullité du dessin ou modèle contesté sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, lu en combinaison avec l’article 6 de ce même règlement. Dans cette décision, la division d’annulation a considéré que le dessin ou modèle contesté était nouveau. En revanche, elle a estimé que ce dessin ou modèle était dépourvu de caractère individuel.

7        Le 18 mai 2012, Clapbanner a formé un recours, au titre des articles 55 à 60 du règlement n° 6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 22 octobre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’OHMI a accueilli ce recours. Dans un premier temps, elle a considéré que le dessin ou modèle contesté était nouveau au sens de l’article 5 du règlement n° 6/2002 au motif, d’une part, qu’il n’était pas identique aux dessins ou modèles antérieurs et, d’autre part, que les différences concernant les poignées des articles représentés par les dessins ou modèles antérieurs ne pouvaient pas être considérées comme des « détails insignifiants » au sens de cette disposition. Dans un second temps, la chambre de recours a considéré que le dessin ou modèle contesté présentait un caractère individuel au sens de l’article 6 du règlement n° 6/2002. En effet, premièrement, elle a relevé que les parties convenaient que le dessin ou modèle contesté était relatif à des panneaux qui étaient habituellement fabriqués dans un carton léger, qui pouvaient être pliés en accordéon et qui étaient utilisés lors d’événements collectifs tels que des manifestations sportives en étant tenus avec les mains sur les côtés les plus courts et en hauteur au-dessus de la tête. Deuxièmement, elle a souligné que les utilisateurs avertis étaient à la fois les personnes qui utilisaient ces panneaux lors de manifestations collectives et les organismes qui achetaient ces panneaux et les distribuaient ensuite aux personnes participant à ces manifestations collectives. Troisièmement, elle a constaté que l’attention d’un utilisateur averti sera immédiatement attirée par l’aspect des poignées sur les panneaux en cause, notamment au motif que le créateur dispose d’une certaine liberté créatrice pour celles-ci. En revanche, elle a souligné que le degré de liberté du créateur à l’égard des autres caractéristiques des panneaux était très limité. Quatrièmement, la chambre de recours a estimé que l’aspect des poignées jouera un rôle essentiel du point de vue de l’utilisateur averti et que, dans le dessin ou modèle contesté, l’aspect des poignées était différent de l’aspect des poignées dans les dessins ou modèles antérieurs. Cinquièmement, la chambre de recours en a déduit que l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté sur l’utilisateur averti était différente de l’impression globale produite par les quatre dessins ou modèles antérieurs.

 Conclusions de parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        accueillir la demande en nullité et annuler le dessin ou modèle contesté ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      L’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002 dispose qu’un dessin ou modèle communautaire ne peut être déclaré nul que s’il ne remplit pas les conditions visées aux articles 4 à 9 du même règlement.

12      À l’appui du recours, la requérante invoque quatre moyens. Premièrement, elle soutient qu’une partie des poignées du dessin ou modèle contesté n’est plus visible lors de l’utilisation normale du produit au sens de l’article 4 du règlement n° 6/2002. Deuxièmement, elle allègue que le dessin ou modèle contesté est dépourvu de nouveauté au sens de l’article 5 de ce règlement. Troisièmement, elle soutient que ce dessin ou modèle est dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 6 dudit règlement. Quatrièmement, elle fait valoir que ce dessin ou modèle a été enregistré de mauvaise foi.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4 du règlement n° 6/2002

13      La requérante soutient, en substance, qu’une partie des poignées du dessin ou modèle contesté n’est plus visible lors de l’utilisation normale du produit au sens de l’article 4 du règlement n° 6/2002.

14      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, un dessin ou modèle appliqué à un produit ou incorporé dans un produit qui constitue une pièce d’un produit complexe n’est considéré comme nouveau et présentant un caractère individuel que dans la mesure où la pièce, une fois incorporée dans le produit complexe, reste visible lors d’une utilisation normale et où les caractéristiques visibles de la pièce remplissent en tant que telles les conditions de nouveauté et de caractère individuel. En outre, selon l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 6/2002, on entend par « utilisation normale » celle réalisée par l’utilisateur final, à l’exception de l’entretien, du service ou de la réparation.

15      Par ailleurs, il convient de souligner que l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 établit une règle spéciale portant spécifiquement sur les dessins ou modèles appliqués à un produit ou incorporés dans un produit qui constitue une pièce d’un produit complexe au sens de l’article 3, sous c), du règlement n° 6/2002 [arrêt du 9 septembre 2014, Biscuits Poult/OHMI - Banketbakkerij Merba (Biscuit), T‑494/12, EU:T:2014:757, point 21].

16      Dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas considéré que le dessin ou modèle contesté constituait un produit complexe et que les poignées constituaient une pièce dudit produit. Dans le recours, la requérante soutient d’ailleurs, elle-même, que les poignées incorporées dans le dessin ou modèle contesté ne constituent pas des pièces d’un produit complexe.

17      La requérante n’est donc pas fondée à soutenir qu’une partie des poignées du dessin ou modèle contesté n’est plus visible lors de l’utilisation normale d’un produit complexe au sens de l’article 4 du règlement n° 6/2002.

18      Le premier moyen invoqué par la requérante doit donc être écarté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 5 du règlement n° 6/2002 en ce que la chambre de recours a considéré que le dessin ou modèle contesté était nouveau

19      Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, un dessin ou modèle est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n’a été divulgué au public dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité. Selon l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants.

20      La requérante soutient que toutes les caractéristiques du dessin ou modèle contesté qui ne peuvent être considérées comme strictement identiques aux caractéristiques correspondantes des dessins ou modèles antérieurs constituent des détails mineurs insignifiants. Plus précisément, la requérante fait valoir que le dessin ou modèle contesté diffère des dessins ou modèles antérieurs uniquement par des détails insignifiants, à savoir ses poignées.

21      En l’espèce, il convient de relever que le dessin ou modèle contesté et les dessins ou modèles antérieurs ne sont pas identiques en ce qui concerne leur partie relative aux poignées des produits qu’ils représentent.

22      En effet, comme l’a souligné à juste titre la chambre de recours dans la décision attaquée, les poignées représentées sur le dessin ou modèle contesté consistent en une partie perforée qui peut être poussée. Par comparaison, les poignées représentées sur les dessins ou modèles antérieurs sont découpées (dessins ou modèles nos 796 446‑0001 et 796 446‑0002) ou adjointes au panneau en carton (dessins ou modèles nos 796 446‑0003 et 796 446‑0004).

23      Or, ces différences ne peuvent être considérées comme des détails insignifiants dans la mesure où elles sont perceptibles lorsque les dessins ou modèles antérieurs et le dessin ou modèle contesté sont disposés côte à côte.

24      Ainsi, c’est à bon droit que, dans la décision attaquée, la chambre de recours est parvenue à la conclusion que le dessin ou modèle contesté était nouveau au sens de l’article 5 du règlement n° 6/2002.

25      Le deuxième moyen invoqué par la requérante doit donc être écarté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 6 du règlement n° 6/2002 en ce que la chambre de recours a considéré que le dessin ou modèle contesté possédait un caractère individuel

26      Selon l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, un dessin ou modèle communautaire enregistré est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité. L’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 précise que, pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

27      Par ailleurs, il ressort de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, ainsi que d’une jurisprudence constante, que l’examen du caractère individuel d’un dessin ou modèle dépend de l’impression globale que celui-ci produit sur l’utilisateur averti [voir arrêt du 25 octobre 2013, Merlin e.a./OHMI – Dusyma (Jeu), T‑231/10, EU:T:2013:560, point 28 et jurisprudence citée].

28      Aux fins d’examiner le caractère individuel du dessin ou modèle contesté, il convient d’apprécier si la chambre de recours a commis une erreur, premièrement, lorsqu’elle a précisé la nature du produit auquel le dessin ou modèle contesté s’appliquait, deuxièmement, lorsqu’elle a défini l’utilisateur averti dudit dessin ou modèle, troisièmement, lorsqu’elle a apprécié le degré de liberté du créateur dans l’élaboration de celui-ci et, quatrièmement, lorsqu’elle a procédé à la comparaison des impressions globales produites sur l’utilisateur averti par les dessins ou modèles en cause.

 Sur la nature du produit auquel le dessin ou modèle contesté s’applique

29      Il ressort du considérant 14 du règlement n° 6/2002 que, lors de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle, il convient de tenir compte de la nature du produit auquel le dessin ou modèle s’applique ou dans lequel celui-ci est intégré et, notamment, du secteur industriel dont il relève [arrêt du 22 juin 2010, Shenzhen Taiden/OHMI Bosch Security Systems (Équipement de communication), T‑153/08, Rec, EU:T:2010:248, point 43].

30      En l’espèce, le dessin ou modèle contesté, comme les dessins ou modèles antérieurs, représente un panneau en carton qui est utilisé lors d’évènements collectifs tels qu’une rencontre sportive, une manifestation ou un concert et qui peut notamment être revêtu de messages de soutien, de slogans ou de publicité.

31      Par ailleurs, comme l’a souligné la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée, les parties conviennent que le dessin ou modèle contesté, comme les dessins ou modèles antérieurs, représente un panneau qui est habituellement fabriqué dans un carton léger et qui est utilisé en étant tenu avec les mains sur les côtés les plus courts et en hauteur au-dessus de la tête.

32      En outre, il ressort des pièces produites, notamment par la requérante, au cours de la procédure devant l’OHMI que le dessin ou modèle contesté représente également, à l’instar des dessins ou modèles antérieurs, un panneau en carton qui peut être plié en accordéon et qui, dans une position pliée, produit du bruit lorsque l’utilisateur final le frappe, notamment, dans sa main.

33      Ainsi, il est constant entre les parties, et il est d’ailleurs confirmé par l’examen du dossier de la procédure devant l’OHMI, transmis au Tribunal en application de l’article 133, paragraphe 3, de son règlement de procédure que, d’une part, le dessin ou modèle contesté s’applique à un panneau en carton de forme rectangulaire divisé en lamelles pouvant être pliées en accordéon et, d’autre part, que ledit panneau peut être utilisé dans une position dépliée pour véhiculer un message ou, dans une position pliée, pour produire un effet sonore.

 Sur l’utilisateur averti

34      Selon la jurisprudence, la notion d’utilisateur averti doit être comprise comme une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marques, auquel il n’est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n’effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle d’homme de l’art, expert doté de compétences techniques approfondies. Ainsi, la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté non d’une attention moyenne, mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré (arrêt du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, Rec, EU:C:2011:679, point 53).

35      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les utilisateurs avertis étaient, d’une part, les personnes qui utilisent ces panneaux lors de manifestations collectives et, d’autre part, les organismes qui achètent des panneaux et les distribuent ensuite aux personnes participant à ces manifestations collectives.

36      Cette appréciation, qui n’est pas contestée par la requérante, est exempte d’erreur et il convient, dès lors, de l’entériner.

 Sur le degré de liberté du créateur

37      Le degré de liberté du créateur d’un dessin ou modèle est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit auquel le dessin ou modèle est appliqué. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes aux dessins ou modèles appliqués au produit concerné [arrêts du 18 mars 2010, Grupo Promer Mon Graphic/OHMI – PepsiCo (Représentation d’un support promotionnel circulaire), T‑9/07, Rec, EU:T:2010:96, point 67, et du 9 septembre 2011, Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne), T‑11/08, EU:T:2011:447, point 32].

38      En l’espèce, la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le créateur dispose d’un degré de liberté très limité en ce qui concerne la forme des panneaux représentés par les dessins ou modèles en cause ainsi que la division de ces panneaux en lamelles pliables en accordéon. Elle fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a conclu que la seule caractéristique devant être prise en compte dans la présente affaire était la caractéristique des parties des panneaux consacrées aux poignées.

39      À cet égard, premièrement, il convient de rappeler qu’il est constant entre les parties que le dessin ou modèle contesté s’applique à un panneau en carton de forme rectangulaire divisé en lamelles pouvant être pliées en accordéon. Il est également constant que ce panneau sert, d’une part, à véhiculer un message lorsqu’il est déplié et, d’autre part, à produire du bruit lorsqu’il est plié et lorsque l’utilisateur final le frappe, notamment, dans sa main (voir points 30 à 33 ci-dessus).

40      Deuxièmement, en ce qui concerne la forme du dessin ou modèle contesté, il importe de relever que la requérante ne démontre pas qu’il existe de nombreuses possibilités de créer un dessin différent pour un article publicitaire consistant en un panneau en carton destiné à être brandi lors d’événements collectifs et à produire du bruit lorsque l’utilisateur le frappe, notamment, dans sa main.

41      Par ailleurs, comme la chambre de recours l’a relevé au point 26 de la décision attaquée, le rectangle est la forme la plus évidente pour un panneau publicitaire dans la mesure où il offre un plus grand espace d’écriture et permet à l’utilisateur de le tenir confortablement sans entraver sa vue.

42      En outre, la forme rectangulaire, qui permet de dessiner des lamelles en carton pliables d’une dimension identique, apparaît être la forme adaptée pour que ces lamelles produisent du bruit lorsqu’elles entrent en contact entre elles.

43      Ainsi, dans la décision attaquée, la chambre de recours était fondée à considérer que la forme rectangulaire n’était pas un aspect du dessin ou modèle pour lequel le créateur disposait d’une grande liberté de choix.

44      Troisièmement, s’agissant de la division du panneau en lamelles de carton qui peuvent être pliées en accordéon, la requérante affirme, sans le démontrer, que d’autres méthodes de pliage sont concevables pour permettre à un panneau de remplir sa fonction.

45      Par ailleurs, il convient de relever, comme la chambre de recours, que le pliage en accordéon est une méthode qui permet au panneau en carton d’être plié et déplié d’une manière rapide et pratique.

46      En outre, le pliage du panneau en accordéon apparaît comme la seule méthode de pliage susceptible de produire l’effet sonore recherché par le créateur d’un produit tel que celui représenté par le dessin ou modèle contesté. En effet, seul le choc de multiples lamelles en carton entre elles, notamment au contact de la main de l’utilisateur, permet d’émettre un son suffisant pour que ce dernier se propage.

47      Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le degré de liberté du créateur était quasiment inexistant en ce qui concerne la division du panneau en carton en lamelles pliables en accordéon.

48      Dès lors, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la forme rectangulaire du panneau en carton et sa division en lamelles pouvant être pliées en accordéon constituaient deux caractéristiques pour lesquelles le créateur disposait d’un degré de liberté très limité. C’est également à bon droit que la chambre de recours a estimé que les poignées étaient la seule partie des panneaux pour laquelle le créateur disposait d’une certaine liberté de création.

 Sur la comparaison des impressions globales

49      La requérante fait valoir que l’impression d’ensemble produite par le dessin ou modèle contesté ne diffère pas de celle produite par les dessins ou modèles antérieurs. En effet, pour apprécier l’impression d’ensemble produite par le dessin ou modèle contesté, il conviendrait de tenir compte de l’ensemble du panneau qu’il représente et non, seulement, des poignées que comporte ce panneau. Par ailleurs, il importerait également de tenir compte de la manière dont le produit est utilisé. Enfin, lors de l’utilisation de ce panneau, les différences dans la forme des poignées ne seraient pas remarquées par l’utilisateur averti.

50      À cet égard, en premier lieu, il convient de souligner que, compte tenu des conclusions qui ont été tirées en ce qui concerne le degré de liberté du créateur, la chambre de recours était fondée à considérer que l’aspect des poignées jouait un rôle essentiel dans l’impression globale produite par les dessins ou modèles en cause sur l’utilisateur averti (voir, en ce sens, arrêt Représentation d’un support promotionnel circulaire, point 37 supra, EU:T:2010:96, point 72).

51      En deuxième lieu, et comme le fait valoir la requérante, l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par un dessin ou modèle doit nécessairement être déterminée, aussi, au regard de la manière dont le produit en cause est utilisé [arrêts Équipement de communication, point 29 supra, EU:T:2010:248, point 66, et du 14 juin 2011, Sphere Time/OHMI – Punch (Montre attachée à une lanière), T‑68/10, Rec, EU:T:2011:269, point 78].

52      Cependant, il y a lieu de rappeler que les panneaux représentés par les dessins ou modèles en conflit peuvent être utilisés dans une position dépliée ou dans une position pliée.

53      En ce qui concerne l’utilisation des panneaux dans une position dépliée, l’argument de la requérante, tiré de ce que les différences mineures qui caractérisent les poignées ne seront pas visibles, ne saurait être accueilli.

54      En effet, d’une part, l’aspect des poignées sera visible lors de la première utilisation du panneau représenté par le dessin ou modèle contesté dans la mesure où, contrairement à l’utilisation des panneaux représentés par les dessins ou modèles antérieurs, l’utilisation, dans une position dépliée, du panneau représenté par le dessin ou modèle contesté nécessitera, au préalable, l’exercice d’une pression sur la partie perforée afin de former des poignées.

55      D’autre part, il ressort des documents produits par la requérante elle-même au cours de la procédure devant l’OHMI que les utilisateurs peuvent tenir les panneaux en cause de différentes manières. Ainsi, les utilisateurs ne seront pas nécessairement conduits à tenir les panneaux en cause avec la totalité de leurs doigts, mais pourront avoir recours à certains d’entre eux, ce qui aura pour conséquence de laisser apparaître l’aspect des poignées.

56      En ce qui concerne l’utilisation des panneaux représentés par les dessins ou modèles en conflit dans une position pliée, il convient de constater que la production d’un bruit requerra de l’utilisateur qu’il tienne l’extrémité du panneau plié dans une main et qu’il frappe l’autre extrémité du panneau plié, par exemple, dans le creux de son autre main. Ainsi, lors d’une telle utilisation, les produits représentés par les dessins ou modèles antérieurs laisseront apparaître une encoche au milieu des lamelles situées sur les bords du panneau (dessins ou modèles nos 796 446‑0001 et 796 446‑0002) ou bien des poignées adjointes au milieu de ces lamelles (dessins ou modèles nos 796 446‑0003 et 796 446‑0004). En revanche, lors de son utilisation en position pliée afin de faire du bruit, le produit représenté par le dessin ou modèle contesté ne laissera apparaître aucune poignée, si l’utilisateur n’a pas exercé de pression sur la perforation, ou bien un simple ajour semi-circulaire, si l’utilisateur a déjà exercé une telle pression.

57      Dès lors, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la requérante tirée de ce que l’aspect des poignées ne sera pas visible lors de l’utilisation des produits représentés par les dessins ou modèles en conflit.

58      En troisième lieu, la requérante soutient, d’une part, que les poignées qui figurent sur le dessin ou modèle contesté sont positionnées au même emplacement que les poignées qui se trouvent sur les dessins ou modèles antérieurs et, d’autre part, que ces poignées ont les mêmes dimensions. Elle ajoute que les différences mineures relatives à la manière dont les poignées ont été présentées dans les dessins ou modèles en cause ne peuvent avoir d’impact sur l’impression d’ensemble produite sur l’utilisateur averti.

59      En ce qui concerne les dessins ou modèles antérieurs nos 796 446‑0003 et 796 446‑0004, l’argumentation de la requérante tirée de ce que les poignées figurent au même emplacement sur les dessins ou modèles en conflit n’est manifestement pas fondée dans la mesure où, notamment, la poignée dans le dessin ou modèle contesté est représentée comme une ligne de perforations devant être poussée tandis qu’elle est adjointe dans lesdits dessins ou modèles antérieurs. Par ailleurs, comme l’a indiqué la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, l’aspect des poignées dans les dessins ou modèles antérieurs nos 796 446‑0003 et 796 446‑0004 est complètement différent de l’aspect des poignées représentées sur le dessins ou modèle contesté.

60      Ainsi, le dessin ou modèle contesté produit, sur l’utilisateur averti, une impression globale différente des dessins ou modèles antérieurs nos 796 446‑0003 et 796 446‑0004, compte tenu du degré de liberté très limité dont dispose le créateur s’agissant de la forme rectangulaire du panneau en carton et de sa division en lamelles pouvant être pliées en accordéon et eu égard aux différences relevées dans le paragraphe qui précède en ce qui concerne les poignées présentées sur lesdits dessins ou modèles.

61      En ce qui concerne les dessins ou modèles antérieurs nos 796 446‑0001 et 796 446‑0002, il y a lieu de relever que la poignée est découpée dans lesdits dessins ou modèles tandis qu’elle est représentée comme une ligne de perforations devant être poussée dans le dessin ou modèle contesté. Par ailleurs, la poignée qui figure sur ces dessins ou modèles antérieurs a une forme oblongue tandis qu’elle a une forme semi-circulaire dans le dessin ou modèle contesté. Enfin, l’argumentation de la requérante, tirée de ce que les poignées figurent au même emplacement sur les dessins ou modèles en conflit, doit être rejetée dans la mesure où, comme la relevé la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, la poignée présentée sur le dessin ou modèle contesté occupe l’avant-dernière lamelle pliable située sur le bord du panneau, tandis qu’elle occupe deux lamelles pliables dans les dessins ou modèles antérieurs. Il convient d’ajouter que, pour cette raison et à la différence du produit représenté par le dessin ou modèle contesté, les produits représentés par les dessins ou modèles antérieurs laisseront apparaître une encoche au milieu des lamelles situées sur le bord du panneau lors de leur utilisation dans une position pliée. Enfin, à supposer même que cette différence d’emplacement ne soit pas remarquée par l’utilisateur averti, comme l’a envisagé la chambre de recours, cette circonstance ne modifierait pas l’impression globale produite par les dessins ou modèles en cause, sur l’utilisateur averti.

62      Ainsi, à l’issue d’une évaluation d’ensemble et compte tenu du degré de liberté très limité dont dispose le créateur s’agissant de la forme rectangulaire du panneau en carton et de sa division en lamelles pouvant être pliées en accordéon, il y a lieu de considérer que l’aspect des poignées dans le dessin ou modèle contesté est suffisamment différent de l’aspect des poignées dans les dessins ou modèles antérieurs nos 796 446‑0001 et 796 446‑0002 pour produire, sur l’utilisateur averti, une impression globale différente.

63      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation lorsqu’elle a considéré que le dessin ou modèle contesté produisait, sur l’utilisateur averti, une impression globale différente des dessins ou modèles antérieurs.

64      Le troisième moyen doit donc être écarté.

 Sur le quatrième moyen, tiré de l’enregistrement de mauvaise foi du dessin ou modèle contesté

65      La requérante soutient que le dessin ou modèle contesté a été enregistré de mauvaise foi et que, par conséquent, les mesures prises par le titulaire du dessin ou modèle contesté doivent être annulées en vertu du principe fraus omnia corrumpit.

66      Cependant, il importe de relever que l’article 25, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002 établit la liste des motifs de nullité d’un dessin ou modèle communautaire. Cette liste doit être considérée comme étant exhaustive, ledit article disposant qu’un dessin ou modèle ne peut être déclaré nul que pour l’un des motifs qu’il prévoit. Or, force est de constater que la mauvaise foi du titulaire du dessin ou modèle contesté n’y est pas mentionnée [arrêt Représentation d’un support promotionnel circulaire, point 37 supra, EU:T:2010:96, point 30].

67      Par ailleurs, il y a lieu de relever que la mauvaise foi du titulaire du dessin ou modèle n’a pas été invoquée dans la demande de nullité et qu’elle a été soulevée plus tard au cours de la procédure administrative afin d’expliquer les raisons pour lesquelles le dessin ou modèle contesté n’était pas nouveau et ne présentait pas un caractère individuel.

68      Or, il ressort des points 19 à 64 ci-dessus que le dessin ou modèle contesté est nouveau et qu’il présente un caractère individuel.

69      Le quatrième moyen doit donc être écarté.

70      Par conséquent, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions formulé par la requérante.

 Sur les dépens

71      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter les dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Argo Development and Manufacturing Ltd est condamnée aux dépens.