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Décisions

Cass. com., 1 juillet 2020, n° 19-10.916

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SARL Cabinet Briard, SCP Foussard et Froger

Caen, du 22 nov. 2018

22 novembre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 22 novembre 2018), la société Le Relais de la forêt, qui exploitait un fonds de commerce dans des locaux donnés à bail par M. et Mme I..., associés à parts égales de cette société, ainsi que sur deux terrains appartenant à deux sociétés civiles immobilières, la SCI La Forêt et la SCI Le Cerf, dont M. et Mme I... détenaient l'intégralité du capital social, a été mise en liquidation judiciaire le 30 septembre 2016, Mme S... étant désignée liquidateur.

2. Le liquidateur a assigné M. et Mme I... pour leur voir étendre la procédure collective de la société Le Relais de la forêt en invoquant la confusion de leurs patrimoines.

Examen du moyen unique

Enoncé du moyen

3. M. et Mme I... font grief à l'arrêt de leur étendre la procédure de liquidation judiciaire de la société Le Relais de la forêt alors :

« 1°/ que l'existence de relations financières anormales de nature à caractériser une confusion de patrimoine suppose un transfert d'actifs ou de passifs d'un patrimoine à l'autre créant un déséquilibre tenant à l'absence de contrepartie ; qu'à ce titre le non-paiement des loyers par le preneur ne caractérise pas une relation financière anormale s'il trouve une contrepartie dans la réalisation par le preneur d'importants travaux de rénovation et d'agrandissement de l'immeuble objet du bail ; qu'en retenant que le non-paiement des loyers était de nature à établir l'existence de relations financières anormales quand elle constatait que la société Le Relais de la forêt avait réalisé d'importants travaux de nature à enrichir le bailleur, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations a violé les articles L. 621-2 et L. 641-1 du code de commerce ;

2°/ qu'il appartient au demandeur à l'extension de la procédure collective de rapporter la preuve de l'existence de relations financières anormales de nature à la justifier ; qu'en retenant qu'il n'était pas démontré que le montant des travaux d'aménagement effectués par le preneur est d'une valeur équivalente au montant des loyers non payés, faisant ainsi peser la charge de la preuve sur le défendeur à l'action en extension, quand il appartenait à Mme S... de justifier du caractère anormal des relations financières en dépit des travaux réalisés à ses frais par le preneur, la cour d'appel a violé l'article 1315 (devenu 1353) du code civil. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt constate que la société Le Relais de la forêt n'a versé aucun loyer commercial depuis 2005 et que ces loyers n'ont été ni comptabilisés ni facturés, aucune démarche pour parvenir à leur paiement n'ayant été accomplie. Il relève que le montage consistant à faire réaliser des travaux d'aménagement et d'agrandissement par la société Le Relais de la forêt, dans le cadre des baux à construction consentis aux sociétés Le Cerf et La Forêt, sans qu'une distinction ne soit établie entre les investissements réalisés par les sociétés civiles immobilières et la société Le Relais de la forêt, confirme la volonté de M. et Mme I... de s'enrichir au détriment de cette dernière. Il relève encore que si M. et Mme I... indiquent que la contrepartie de ce non-recouvrement était constituée par la poursuite d'un intérêt commun consistant à soutenir un projet global de rénovation de l'établissement, il n'est pas allégué que le coût des travaux d'aménagement soit équivalent à ces neuf années de loyers et qu'aucune convention portant sur la réalisation de travaux n'a été conclue entre la société Le Relais de la forêt et les bailleurs.

5. Par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, sans se borner à constater un défaut de paiement des loyers dépourvu de contrepartie, mais en se fondant sur un ensemble d'indices concordants, a, sans inverser la charge de la preuve, caractérisé l'existence entre la société Le Relais de la forêt et M. et Mme I... de relations financières anormales, constitutives de la confusion de leurs patrimoines.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.