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Décisions

Cass. com., 14 janvier 2014, n° 12-29.809

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Piwnica et Molinié

Besançon, du 7 nov. 2012

7 novembre 2012

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 7 novembre 2012), que par jugement du 19 octobre 2010, la Société vésulienne de maçonnerie (la société) a bénéficié d'un plan de redressement sur 10 ans avec poursuite d'activité, pour la durée duquel une clause d'inaliénabilité des biens de la société et de ceux nécessaires à son exploitation a été régulièrement inscrite ; qu'après la résolution du plan et la mise en liquidation judiciaire de la société, le 13 décembre 2011, le tribunal a étendu la liquidation judiciaire de la société à M. X..., son gérant, et à la société Cabri, que celui-ci contrôlait, sur le fondement de la confusion des patrimoines ;

Attendu que M. X... et la société Cabri font grief à l'arrêt d'avoir étendu à leur encontre la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de la société, alors, selon le moyen :

1°/ que la liquidation judiciaire ouverte à l'égard d'un débiteur peut être étendue à une ou plusieurs personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ; que la confusion de patrimoines qui est constituée notamment par des flux financiers anormaux entre les structures ou les personnes n'est pas constituée par une opération unique de cession d'actifs mobiliers, de surcroît laissés à la disposition de la société cédante, sans contrepartie ; que, pour décider l'extension de la liquidation judiciaire de la société à M. X..., gérant associé du débiteur, et à la société Cabri, propriétaire-bailleur des locaux dans lequel le débiteur exerçait son activité, la cour d'appel qui a retenu l'existence de cette opération unique, pour laquelle elle a relevé que des factures avaient été établies, tout en tenant pour indifférent l'apport en compte courant réalisé par M. X... et la mise à disposition, sans contrepartie, des matériels cédés à la société, n'a pas caractérisé l'existence de flux anormaux entre les structures et l'atteinte portée au gage des créanciers ; qu'en statuant néanmoins ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2, alinéa 2 du code de commerce ;

2°/ que l'extension de la liquidation judiciaire du débiteur à une personne ou une structure qui lui est autonome impose de constater, pour chacune des personnes concernées par la demande d'extension, l'existence de flux financiers anormaux ou la confusion des comptes ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a étendu la liquidation de la société à M. X..., son gérant associé, et à la société Cabri propriétaire-bailleur des locaux d'exploitation, société constituée entre M. X... et sa fille, en retenant exclusivement la cession, par la société, d'actifs mobiliers, constatée par des factures, de laquelle la cour d'appel a déduit l'intérêt personnel de M. X... ; qu'en s'abstenant de préciser entre qui, de M. X... ou de la société Cabri, ou des deux, les relations anormales s'étaient établies, opérant ainsi une confusion, en dépit de leur autonomie respective, entre la société Cabri et M. X..., sans égard pour l'impossibilité de leur étendre, indistinctement, la liquidation de la société, la cour d'appel a violé l'article L. 621-2, alinéa 2, du code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que le liquidateur a décrit avec précision les différentes ventes d'éléments d'actif intervenues, en violation de la clause d'inaliénabilité, entre la société, d'une part, et M. X... et la société Cabri, d'autre part, dans les semaines qui ont précédé la déclaration de cessation des paiements de la société ; qu'il relève que l'inventaire dressé à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire en 2010 évaluait le matériel, les véhicules et les engins de chantier à la somme de 132 000 euros quand la déclaration de cessation des paiements de la société du 8 décembre 2011 fait état de matériel de chantier pour une valeur de 5 000 euros ; qu'il relève enfin que les dates mentionnées sur les factures de vente de ces éléments d'actif ne correspondent pas à la réalité et que le prix de ces cessions n'a pas été payé à la société, laquelle a continué de les utiliser, de les entretenir et de les assurer ; qu'il retient que M. X... s'est comporté en maître de l'affaire, dont il a disposé des actifs, pourtant inaliénables, à son gré et dans son intérêt personnel ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, caractérisant l'existence de relations financières anormales constitutives d'une confusion des patrimoines, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.