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Décisions

Cass. 3e civ., 2 juillet 1997, n° 95-14.151

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

Mme Stéphan

Avocat général :

M. Weber

Avocats :

SCP Vier et Barthélemy, Me Choucroy

Versailles, du 26 janv. 1995

26 janvier 1995

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 janvier 1995), qu'après lui avoir consenti une promesse de bail le 19 novembre 1991, la société civile immobilière du Murget (la SCI), propriétaire, a donné en location le 8 janvier 1992 à la société Paris sanitaire, pour une durée de 9 ans, des locaux à usage de vente en gros, demi-gros et de détail de matériels et de mobiliers pour l'équipement du bâtiment ; qu'en août 1992, le maire de la commune de Montesson a interdit à la locataire de poursuivre son activité dans les lieux loués, qui ne pouvaient l'être qu'à usage exclusivement agricole compte tenu du plan d'occupation des sols du 21 mars 1983 ; que la société Paris sanitaire a assigné la bailleresse pour manquement à son obligation de délivrance en lui réclamant paiement de dommages-intérêts ; que celle-ci lui a, reconventionnellement, réclamé paiement de dommages-intérêts pour dégradations et de loyers ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de la locataire et de débouter en conséquence la bailleresse de sa demande reconventionnelle, alors, selon le moyen,

1° que la cour d'appel avait expressément constaté que la promesse de bail précisait que le preneur devait faire son affaire personnelle pour l'obtention éventuelle des autorisations administratives nécessaires à quelque titre que ce soit pour l'utilisation des locaux en vue de l'exercice de son activité ; qu'en retenant néanmoins que le bailleur ne peut sérieusement reprocher au preneur de n'avoir pas entrepris les démarches administratives auxquelles il s'était engagé dans la promesse de bail puis à la signature de celui-ci et que le bailleur se devait de vérifier que les lieux qu'il entendait donner à bail pouvaient être affectés à l'usage de vente de matériaux et d'équipement du bâtiment, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la promesse de bail en violation de l'article 1134 du Code civil ;

2° que, comme l'avait souligné la SCI du Murget dans ses conclusions, le contrat de bail stipulait que l'autorisation donnée au preneur d'exercer certaines activités n'implique de la part du bailleur aucune garantie ni diligence pour l'obtention des autorisations administratives nécessaires à quelque fin que ce soit pour l'utilisation des locaux en vue de l'exercice de l'activité définie ; que la cour d'appel, qui a néanmoins retenu que le bailleur devait vérifier si l'activité envisagée par le preneur pouvait effectivement être exercée et le dédommager de son préjudice dû à l'interdiction d'exercer, a dénaturé la clause claire et précise du contrat de bail ;

3° que la SCI du Murget avait soulevé un moyen pris de la carence fautive de la SA Paris sanitaire qui, disposant d'un délai de plus d'un mois entre la signature de la promesse de bail et la conclusion du bail lui-même pour se renseigner et vérifier les conditions d'exercice de l'activité envisagée dans les lieux loués, n'avait pas même fait cette simple demande que lui imposait pourtant la promesse ; qu'en ne recherchant pas si la SA Paris sanitaire n'aurait pas dû, en application de la promesse de bail, au moins se renseigner et s'assurer des conditions d'exercice de son activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1135 et 1137 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le preneur s'était trouvé dans l'impossibilité d'exercer dans les lieux loués l'activité prévue au bail qui se heurtait aux dispositions du plan d'occupation des sols, ayant classé la zone d'implantation du bâtiment en zone non constructible exclusivement réservée à l'agriculture, et retenu que la bailleresse aurait dû vérifier si la chose louée pouvait être affectée à l'usage prévu au bail, différent de celui auquel les lieux loués avaient été préalablement destinés, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire, sans dénaturation, que la SCI avait manqué à son obligation de délivrance ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.