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Décisions

Cass. 3e civ., 14 octobre 2009, n° 08-10.955

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

M. Assié

Avocat général :

M. Gariazzo

Avocats :

Me Blanc, SCP Tiffreau

Lyon, du 12 sept. 2006

12 septembre 2006

Sur le moyen unique du pourvoi n° J 08 17.750 :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 3 mai 2005) que M. X..., qui a acquis le 8 septembre 1989 un fonds de commerce de boulangerie exploité dans des locaux appartenant à la société civile immobilière Compagnie de gestion immobilière (la SCI), a assigné cette dernière aux fins, notamment, de la voir condamner à exécuter dans les lieux donnés à bail servant à l'habitation principale du preneur des travaux permettant l'installation des éléments d'équipement et de confort visés à l'article 3 du décret n° 2002 120 du 30 janvier 2002 ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :

1°/ que les dispositions de l'article 1719, 1° du code civil, prévoyant que le bailleur est obligé de délivrer au preneur un "logement décent", "s'il s'agit de son habitation principale", ne sont pas applicables au bail commercial ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que le bail litigieux était un bail commercial ; qu'en jugeant néanmoins que le preneur aurait été en droit d'invoquer le texte susvisé, pour contraindre le bailleur à faire en sorte que le local loué puisse servir de "logement décent", la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1719, 1° du code civil ;

2°/ que, subsidiairement, les dispositions de l'article 1719, 1° du code civil, prévoyant que le bailleur est obligé de délivrer au preneur un "logement décent", "s'il s'agit de son habitation principale", ne sont pas applicables quand les parties à un contrat de bail n'ont pas convenu que le local loué serait à usage d'habitation ; que la société civile immobilière Compagnie de gestion immobilière, bailleresse, faisait valoir qu'elle n'avait consenti qu'un bail commercial et non à usage d'habitation ; que le contrat de bail, intitulé "bail commercial", précisait que le local loué "devait être consacré par le preneur à l'activité de boulangerie pâtisserie" ; qu'en jugeant néanmoins que les dispositions susvisées relatives à la délivrance d'un "logement décent" auraient été applicables, aux seuls motifs qu'elles concerneraient la "situation effective du locataire" et "non la dénomination du bail retenue par les parties" et qu'"il n'est pas contestable" que M. X... "a son habitation principale dans une partie des locaux loués par bail commercial", sans constater que, malgré la qualification de "bail commercial" retenue par les parties, celles ci auraient été en réalité d'accord pour que le local loué soit à usage d'habitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1719, 1° du code civil ;

3°/ que, subsidiairement, les dispositions de l'article 1719, 1° du code civil, prévoyant que le bailleur est obligé de délivrer un "logement décent", ne sont applicables que si le local loué est l'"habitation principale" du preneur ; que dans ses conclusions d'appel, la société civile immobilière Compagnie de gestion immobilière, bailleresse, contestait que le local loué était l'"habitation principale" de M. X... ; qu'en se bornant à affirmer, pour appliquer le texte susvisé, qu'"il n'est pas contestable" que M. X... "a son habitation principale dans une partie des locaux loués par bail commercial", sans s'expliquer sur les éléments qui auraient permis de justifier cette appréciation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1719,1° du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que suivant contrat du 1er septembre 1989, la SCI avait donné à bail commercial à M. X... des locaux comprenant, au rez-de-chaussée, une pièce à usage de magasin, une cuisine et deux chambres et à la suite, séparés par une cour, une farinière et un fournil, et, au deuxième étage, trois pièces, une cuisine et un WC, et ayant constaté, par motifs propres, que M. X... avait son habitation principale dans une partie des lieux loués, la cour d'appel, abstraction faite d'un motif surabondant et sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que le bailleur était tenu de se conformer aux exigences de la loi relatives au logement décent délivré au locataire ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le moyen unique du pourvoi principal n° Y 08-10.955 : Vu l'article 1719 du code civil, ensemble l'article 1147 du même code ;

Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent ;

Attendu que, pour débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la SCI pour le préjudice subi du fait de l'indécence de son logement, l'arrêt attaqué (Lyon, 12 septembre 2006), rendu à la suite de l'expertise judiciaire ordonnée par la cour d'appel dans son précédent arrêt du 3 mai 2005 afin de déterminer les travaux nécessaires pour rendre le logement décent, retient que si le logement ne correspondait pas aux normes du décret du 30 janvier 2002, M. X... n'a formé une demande de respect des dispositions de ce texte que dans le cadre de la présente procédure et qu'il n'est dès lors pas fondé à solliciter des dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait du comportement à cet égard de la SCI ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la SCI n'avait pas délivré au preneur un logement décent, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident formé sur le pourvoi n° Y 08-10.955, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 3 mai 2005 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de dommages et intérêts, l'arrêt rendu le 12 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon.