Cass. com., 28 février 2018, n° 16-24.507
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rémery
Avocats :
SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois
Sur le moyen unique, pris en ses première, quatrième et cinquième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 juin 2016), que le groupement foncier agricole G... (le GFA), ayant pour associés M. G... et sa soeur, Mme Z..., a conclu un bail rural avec la société La Cabanne du soleil, dirigée par M. G... ; qu'après la mise en liquidation judiciaire de cette dernière, prononcée le 25 mars 2010, le GFA a consenti un nouveau bail rural à l'EARL Coeur de salades (l'EARL), constituée le 27 juillet 2010 et gérée par Mme Z... ; que cette seconde société a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, les 13 novembre 2014 et 19 mars 2015, M. H... A... étant nommé liquidateur ; que ce dernier a assigné le GFA afin que lui soit étendue cette procédure, pour confusion de leurs patrimoines ;
Attendu que le GFA fait grief à l'arrêt de retenir la confusion des patrimoines alors, selon le moyen :
1°) que la confusion des patrimoines susceptible de justifier l'extension d'une procédure collective suppose une confusion des comptes ou des relations financières anormales entre deux personnes physiques ou morales se traduisant par un état permanent d'imbrication inextricable des éléments d'actif et de passif des patrimoines des personnes considérées ; que l'absence de paiement des loyers ne suffit pas à justifier de relations financières anormales constitutives d'une confusion de patrimoines entre le bailleur et le locataire ; qu'en se bornant à constater l'absence de paiement des loyers par l'EARL au GFA pour en déduire l'existence de relations financières anormales, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser l'existence de relations financières anormales justifiant l'extension de la procédure collective ouverte à l'encontre de l'EARL au GFA, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
2°) que la confusion des patrimoines susceptible de justifier l'extension d'une procédure collective suppose une confusion des comptes ou des relations financières anormales entre deux personnes physiques ou morales se traduisant par un état permanent d'imbrication inextricable des éléments d'actif et de passif des patrimoines des personnes considérées ; qu'en retenant, pour en déduire l'existence de relations financières anormales, que le GFA avait signé un contrat de bail avec M. J... le 5 février 2009 et que les quittances de loyer avaient été établies par l'EARL, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette situation n'était pas justifiée par le fait que le contrat de bail conclu avec M. J... avait été signé « le 5 février 2009, à une époque où la société La Cabanne du soleil était en état de cessation des paiements, depuis le 8 avril 2008 » et que ce contrat de bail avait été transféré à l'EARL lorsque celle-ci était devenue locataire des lieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
3°) qu'en constatant, pour en déduire l'existence de relations financières anormales, des transferts de personnel entre l'EARL et la société Cabanne du soleil, ancienne locataire du GFA, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser une confusion de patrimoines entre l'EARL et le GFA, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
Mais attendu que la confusion des patrimoines de plusieurs sociétés peut se caractériser par la seule existence de relations financières anormales entre elles, sans qu'il soit nécessaire de constater que les actifs et passifs des différentes sociétés en cause sont imbriqués de manière inextricable et permanente ; qu'après avoir relevé, par des motifs non critiqués, que le GFA admet avoir renoncé à exiger le paiement des loyers dus par l'EARL pendant quatre ans et n'a pas tenté de les recouvrer, l'arrêt retient que le GFA ne saurait valablement arguer d'une situation transitoire ni du caractère non excessif de la durée de quatre ans, dès lors qu'il n'est pas établi que l'EARL fût sa filiale, tandis que, dans le même temps, cette dernière percevait le loyer au titre d'un contrat de sous-location partielle conclu avec M. J..., le 5 février 2009 ; que l'arrêt relève, ensuite, que le GFA a opéré des virements en faveur de l'EARL à hauteur de 56 450 euros, bien qu'aucun lien de filiation n'existât entre ces deux sociétés ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée par la quatrième branche en l'absence d'offre de preuve du transfert du bail conclu entre le GFA et M. J... au profit de l'EARL, a caractérisé, entre le GFA et l'EARL, l'existence de relations financières anormales constitutives de la confusion de leurs patrimoines et a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen, inopérant en sa troisième branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.