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Décisions

Cass. com., 28 février 2018, n° 16-26.735

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Piwnica et Molinié

Poitiers, du 18 oct. 2016

18 octobre 2016

Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, quatrième et cinquième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 octobre 2016), que la SARL Les Trois garçons (la SARL), qui exploitait un fonds de commerce dans des locaux donnés en location par la SCI 14 rue du Commerce (la SCI), a été mise en liquidation judiciaire le 11 février 2014 ; que le liquidateur a assigné cette dernière afin que lui soit étendue cette procédure, pour confusion de leurs patrimoines ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de retenir la confusion des patrimoines alors, selon le moyen :

1°) que l'existence de relations financières anormales de nature à caractériser une confusion de patrimoines suppose une volonté systématique de procéder à des versements sans contrepartie aux fins de créer une confusion de patrimoines de telle sorte qu'une dissociation entre les sociétés s'avère impossible ; qu'en se bornant à relever, pour caractériser la confusion de patrimoines entre la SCI du [...] et la SARL Les Trois Garçons, que la SCI avait effectué, en 2005, le règlement d'une facture de 13 042,38 euros et d'une facture de 12 358,90 euros pour le compte de la SARL sans qu'aucune convention n'ait été signée entre les deux sociétés pour concrétiser la volonté de la SCI de consentir une simple avance devant être remboursée, quand le paiement de deux factures entre deux sociétés, qui ne traduit pas une volonté systématique des parties, ne suffit pas de caractériser l'existence de relations financières anormales entre elles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;

2°) que l'existence de relations financières anormales de nature à caractériser une confusion de patrimoines suppose une volonté systématique de procéder à des versements sans contrepartie de telle sorte qu'une dissociation entre les sociétés s'avère impossible ; qu'en se bornant à relever, que la SCI avait encaissé, en août 2008, à son profit la somme de 25 000 euros au titre du dépôt de garantie dû par la société A... à la SARL Les Trois Garçons, sans que la compensation avec la somme de 25 401,28 euros, dont la SCI était créancière envers la SARL au titre du règlement en 2005 de deux factures pour le compte de la SARL, ne puisse justifier cet encaissement, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à établir l'existence de relations financières anormales procédant d'une volonté systématique de créer une confusion des patrimoines, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;

3°) que la seule constatation du défaut de paiement de 9 mois de loyers et de l'abstention de poursuivre le recouvrement, n'est pas de nature à révéler la confusion des patrimoines entre le bailleur et le locataire ; qu'en relevant, pour retenir une confusion des patrimoines entre la SCI du [...] et la SARL Les Trois Garçons, le non-paiement de loyers pour une somme de 52 180 euros sur la période de 2004 à 2013 et l'absence de réaction de la part de la SCI, quand cette somme ne représentait cependant que neuf mois de loyers, et avait été déclarée à la procédure collective de la SARL, tandis que la SCI disposait par ailleurs d'un autre locataire dont elle percevait les loyers, présentait un résultat bénéficiaire et assurait le règlement régulier de ses échéances de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;

4°) que l'existence de relations financières anormales de nature à caractériser une confusion de patrimoines suppose une volonté systématique de procéder à des versements sans contrepartie aux fins de créer une confusion de patrimoines de telle sorte qu'une dissociation entre les sociétés s'avère impossible ; qu'en se bornant à relever quatre mouvements financiers ponctuels et isolés (deux paiements, une compensation et un arriéré de loyers), tous identifiés en comptabilité, et intervenus neuf ans avant l'ouverture de la liquidation judiciaire de la SCI pour les uns et six ans avant l'ouverture de la liquidation judiciaire pour les autres, pour retenir la confusion de patrimoines entre la SCI du [...] et la SARL Les trois Garçons, la cour d'appel a privé ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que le bail conclu entre la SCI et la SARL stipulait un loyer annuel de 52 272 euros, l'arrêt relève, d'abord, que, sur un passif de 65 950,47 euros déclaré par la SCI, les loyers impayés entre 2004 et le 1er juillet 2013 représentaient la somme de 52 180,90 euros, sans que la SCI ne justifie avoir formulé de réclamation sur cette période ; qu'il relève, ensuite, que, le 28 août 2008, la SCI a encaissé une somme de 25 000 euros due à la SARL, puis retient, d'un côté, que cela démontre le caractère mensonger de l'attestation par laquelle la gérante de la SARL a indiqué, en 2009, que cette dernière société avait encaissé cette somme, et de l'autre, que la compensation avec une créance réciproque, alléguée par la SCI, n'est pas de nature à justifier cet encaissement, ni le reversement partiel de cette somme à la SARL à hauteur de 15 000 euros, dès lors que la créance réciproque invoquée s'élève à 25 401,28 euros ; que l'arrêt relève encore que la SCI a payé, pour le compte de la SARL, deux factures de 2005 d'un montant respectif de 12 358,90 et 13 042,38 euros, et retient que la SCI n'établit pas avoir effectué ces paiements à titre d'avance, en l'absence de convention en ce sens ; que par ces constatations et appréciations, qui font ressortir un ensemble d'indices concordants caractérisant l'existence de relations financières anormales constitutives d'une confusion des patrimoines, parmi lesquels le non-recouvrement de loyers représentant plus d'une année d'impayés, la cour d'appel ne s'est pas bornée à relever isolément chacun des faits invoqués par les première, deuxième et troisièmes branches et a énoncé à bon droit qu'il importait peu que certaines des opérations reprochées fussent inscrites en comptabilité dès lors qu'étaient établies des relations financières anormales ; qu'en en déduisant que les faits retenus, qui s'étaient déroulés de façon continue de 2004 jusqu'à l'ouverture de la procédure collective de la SARL, ne présentaient pas un caractère isolé et ponctuel, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa troisième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.