Livv
Décisions

Cass. com., 13 novembre 2002, n° 99-16.827

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rennes, 2e ch. com., du 12 mai 1999

12 mai 1999

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 mai 1999) que Mme X... et sa fille ont constitué la société Christ'ies (la société) qui avait pour objet d'exploiter un fonds de commerce et dont Mme X... était la gérante ; que le siège de la société était situé dans un local loué à la SCI MCC (la SCI) constituée et gérée également par Mme X... ; que le local avait été acquis à l'aide d'un prêt bancaire souscrit par la SCI et garanti par un nantissement pris sur le fonds de commerce de la société ; que la société a été placée en redressement judiciaire le 11 mai 1994, puis en liquidation judiciaire par jugement du même jour, M. Y... étant désigné comme liquidateur ; que le liquidateur a demandé l'extension de la liquidation judiciaire à la SCI ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé l'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société à la SCI alors, selon le moyen, que le juge ne peut écarter des débats des conclusions et pièces déposées plusieurs jours avant l'ordonnance de clôture qu'à la condition de justifier de la violation des droits de la défense ; que pour rejeter les conclusions déposées et signifiées le 15 mars 1999 par Mme X... pour l'audience de plaidoirie du 17 mars, la cour d'appel, qui se contente de relever que Mme X... a, délibérément ou non, violé le principe de la contradiction, sans caractériser les circonstances particulières qui auraient empêché M. Y... de répondre à ces conclusions, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 15 du nouveau Code de procédure civile, ensemble les articles 779 et 183 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que Mme X... avait communiqué ses conclusions accompagnées de trente cinq pièces annexées la veille de l'ordonnance de clôture et que la date de celle-ci avait été reportée en raison d'une communication tardive de précédentes conclusions, la cour d'appel a caractérisé l'impossibilité pour le liquidateur de prendre connaissance de ces nouvelles communications et la violation des droits de la défense ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que Mme X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le moyen, que Mme X... faisait valoir que les actifs de la société avaient été réalisés par application des articles 154 et suivants dans le cadre de la liquidation judiciaire de cette société, fait de nature à rendre irrecevable l'extension de la procédure ; qu'en affirmant que s'il est admis qu'une procédure de redressement judiciaire d'une personne morale ne peut être étendue à une autre sur le fondement de la confusion des patrimoines après que le tribunal a arrêté, dans le cadre de cette procédure, un plan de redressement de la première de ces personnes morales, soit par voie de cession, soit par voie de continuation, aucun texte ou principe n'interdit par contre au tribunal d'étendre la procédure de liquidation judiciaire d'une telle personne morale à une autre, au moins tant que cette procédure n'est pas clôturée, peu important à cet égard que tout ou partie des actifs de la première aient été entre temps réalisés en application des articles 154 et suivants de la loi du 25 janvier 1985, sans préciser d'où il ressortait que la société n'avait pas fait l'objet d'une clôture de la procédure, fait qui n'était pas invoqué par le liquidateur, qui faisait seulement valoir que Mme X... faisait un amalgame entre le plan de cession et la réalisation des actifs qui s'effectue dans le cadre de la liquidation, par application des articles 154 et suivants de la même loi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a fait ressortir que la procédure n'avait pas été clôturée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que Mme X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le moyen :

1°) qu'ayant constaté que la SCI avait loué à la société des locaux "brut de béton" puis affirmé que rien ne justifiait, sinon le seul intérêt des associés de la SCI que la société soit contrainte d'emprunter au Crédit industriel de l'Ouest, au mois de juin 1991, une somme de 220 000 francs destinée à financer partiellement l'aménagement création de son magasin, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations dont il résultait qu'eu égard aux locaux loués, l'emprunt contracté était justifié et a violé l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2°) qu'en affirmant que rien ne justifiait, sinon le seul intérêt des associés de la SCI, que la société soit contrainte d'emprunter, au mois de juin 1991, une somme de 220 000 francs destinée à financer partiellement l'aménagement création de son magasin, travaux d'aménagement dont elle ne pouvait en aucun cas demander le remboursement partiel à son bailleur, sauf en cas d'éviction ou de non renouvellement pour une cause non imputable au preneur, la cour d'appel qui ne précise pas, comme elle y était invitée, en quoi la clause d'accession stipulée au bail était anormale et permettait d'affirmer que c'était dans le seul intérêt des associés de la SCI que l'emprunt a été contracté par la société, dont elle relevait que les locaux à elle loués, l'avaient été "brut de béton", n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier1985 ;

3°) que la confusion des patrimoines est distincte de la fictivité laquelle se distingue de la confusion par le fait que la personnalité morale n'est qu'une façade masquant les agissements de celui qui se dissimule derrière elle ; qu'en retenant le fait que la société locataire avait donné son fonds en nantissement à l'UCB, créancier de la SCI, qu'elle avait sollicité un emprunt en vue de réaliser des travaux devant profiter aux termes du bail à la SCI et que le loyer était plus élevé que le montant pratiqué habituellement pour affirmer l'existence d'une confusion de patrimoine, la cour d'appel qui ne précise pas en quoi de tels éléments en ce qu'ils révélaient -à les supposer avérés- une société fictive permettaient de caractériser la confusion de patrimoine, notion totalement distincte et autonome, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que les deux sociétés étaient dirigées par la même personne, la cour d'appel a retenu, d'un côté, que la SCI avait emprunté des fonds pour l'acquisition des locaux qu'elle avait donné ultérieurement à bail à la société et que cet emprunt était exclusivement garanti par un nantissement sur le fonds de commerce de la société, d'un autre, que la société avait dû emprunter pour faire effectuer des travaux d'aménagement qui devaient rester acquis à la SCI sans dédommagement, et enfin que le loyer payé par la société à la SCI était manifestement excessif ; qu'ayant ainsi mis en évidence des mouvements financiers anormaux caractérisant la confusion des patrimoines entre les deux sociétés, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.