Cass. com., 8 octobre 2012, n° 12-40.058
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié
Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :
"L'alinéa 2 de l'article L. 621-2 du code de commerce est-il conforme à la Constitution ?" ; que, dans le mémoire spécial déposé par la société Acanthe développement, il est précisé que cette disposition porte atteinte à la fois au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre, tels qu'ils sont consacrés aux articles 2, 4 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, en ce qu'elle est susceptible de conduire à la liquidation judiciaire d'une société in bonis, ainsi qu'au droit d'exercer un recours, garanti par l'article 16 du même texte, en ce qu'elle autorise l'extension d'une procédure collective à une société sans accorder de droit d'appel aux actionnaires de celle-ci ;
Attendu que la rédaction de l'alinéa 2 de l'article L. 621-2 du code de commerce est la suivante : "à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du ministère public ou d'office, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale. A cette fin, le tribunal ayant ouvert la procédure initiale reste compétent" ;
Attendu que cette disposition est applicable au litige, en ce que le texte critiqué constitue le fondement des poursuites engagées par le contrôleur aux opérations de la liquidation judiciaire de la société France immobilier Group ;
Attendu que cette disposition n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Attendu, d'autre part, que la disposition invoquée qui prive, dans les deux cas qu'elle prévoit, le débiteur en liquidation judiciaire de l'administration et de la disposition de ses biens, sans toutefois le dessaisir de son droit de propriété sur ceux-ci ni des droits et actions attachés à sa personne, est justifiée par l'intérêt général, dès lors qu'elle a pour but de rétablir le gage des créanciers compromis par la confusion de patrimoine ou la fictivité de la personne morale ; que les restrictions aux conditions d'exercice du droit de propriété et à la liberté d'entreprendre qui peuvent résulter de ce texte ne constituent pas pour autant une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi qui est de reconstituer le patrimoine de personnes qui ont abusé de la personnalité juridique dont elles jouissent soit en mélangeant leurs biens, soit en ne constituant qu'une apparence de société, et dès lors que le prononcé de la mesure d'extension par le juge est entouré de garanties de fond et de procédure ; que la question posée ne présente donc pas de caractère sérieux au regard des exigences qui s'attachent au principe de valeur constitutionnelle invoqué ;
Et attendu, enfin, que le grief relatif à l'absence de droit d'appel en faveur des actionnaires de la société visée par une demande d'extension de procédure collective est irrecevable dès lors que la disposition critiquée n'a pas pour objet de prévoir les voies de recours à l'encontre des décisions prises pour son application ;
D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;
PAR CES MOTIFS :
DIT N'Y AVOIR LIEU A RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.