Cass. com., 18 mai 2016, n° 14-22.165
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocat :
SCP Gatineau et Fattaccini
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 juin 2014, RG n° 13/08759), que, par un jugement du 20 novembre 2013 (RG n° 2013/003237), la société Mary Flor Vannes (la société MFV) a été mise en redressement judiciaire, la date de cessation de ses paiements étant fixée au 20 mai 2012 ; qu'elle a formé un appel limité à la fixation de cette date ;
Attendu que la société MFV fait grief à l'arrêt de fixer la date de cessation de ses paiements au 20 mai 2012 alors, selon, le moyen :
1°) que le juge doit constater qu'à la date précise à laquelle il fixe l'état de cessation des paiements, le débiteur ne pouvait faire face au passif exigible avec son actif disponible ; qu'il ne lui suffit pas de constater une trésorerie négative ou des retards de paiement ni de caractériser l'état de cessation des paiements à une date antérieure à celle retenue ; qu'en l'espèce, pour fixer au 20 mai 2012 la date de cessation des paiements, les premiers juges s'étaient bornés à relever que l'URSSAF avait dénoncé une saisie attribution le 11 octobre 2013 et que la société MFV restait devoir des cotisations URSSAF depuis fin 2011 – début 2012 ; que la cour d'appel s'est bornée à apprécier la situation active et passive de la société MFV en fonction des éléments du bilan au 31 décembre 2011 pour en déduire qu'à cette date la cessation des paiements était caractérisée et qu'à la date du 20 mai 2012, date retenue par le premier juge, cette situation ne pouvait s'être améliorée ; qu'en s'abstenant de constater qu'à cette date précise du 20 mai 2012, la société MFV ne pouvait faire face à son passif exigible avec son actif disponible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-1 du code de commerce ;
2°) que des comptes annuels de l'exercice clos au 31 décembre 2011, seul document chiffré produit aux débats, il ressortait que la société MFV disposait de liquidités à concurrence de 1 740,66 euros et que ses dettes fiscales et sociales s'élevaient à la somme de 120 905,25 euros ; qu'en affirmant que la société disposait d'une trésorerie de 1 555 euros, ce chiffre ne correspondant qu'au poste « charges constatées d'avance » distinct du poste « liquidités », et que ses dettes fiscales et sociales s'élevaient à 184 311 euros, la cour d'appel a dénaturé ce document et méconnu le principe en vertu duquel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;
3°) que les comptes annuels de l'exercice clos au 31 décembre 2011 mentionnaient en actif circulant, outre les créances clients, d'autres créances (TVA déductible, produits à recevoir…) ; qu'en omettant de se prononcer sur ces éléments de l'actif circulant susceptibles de constituer un actif disponible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-1 du code de commerce ;
4°) que l'état de cessation des paiements n'est pas réductible à l'état déficitaire ; qu'en se bornant, pour fixer la date de cessation des paiements au 20 mai 2012 à relever qu'au cours des exercices 2012 et 2013, l'activité était demeurée déficitaire, la cour d'appel a déduit un motif dépourvu de toute valeur et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-1 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt constate d'abord qu'indépendamment du montant total des dettes exigibles à moins d'un an au 31 décembre 2011, il existait, à cette dernière date, des dettes fiscales et sociales immédiatement exigibles ; que le moyen, pris en sa deuxième branche, qui fait grief à l'arrêt d'avoir fixé le montant de ces dernières dettes à la somme de 184 311 euros par suite d'une dénaturation, reconnaît lui-même qu'elles s'élevaient au moins à 120 905,25 euros ; que l'arrêt relève ensuite que la société débitrice ne disposait, au même moment, que de 1 555 euros de trésorerie, le moyen, qui invoque également sur ce point une dénaturation, estimant les liquidités à 1 740,66 euros au plus ; que l'arrêt retient enfin qu'en 2012, les dettes fiscales et sociales n'ont pas cessé d'augmenter et que la société n'a bénéficié d'aucun nouvel apport ni concours pour financer son fonds de roulement ; que, dès lors que les erreurs de montants dénoncées par la deuxième branche étaient sans influence et que les créances mentionnées par la troisième ne pouvaient, en l'absence de circonstances exceptionnelles, non invoquées, être prises en considération au titre de l'actif disponible, s'agissant de créances restant à recouvrer, la cour d'appel, par ces constatations et appréciations, a caractérisé un état de cessation des paiements persistant au 20 mai 2012, date au-delà de laquelle la date de cessation des paiements ne pouvait être reportée ; que le moyen, inopérant en sa quatrième branche qui critique un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.