Cass. com., 15 novembre 2005, n° 04-16.904
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt déféré (Montpellier, 18 mai 2004), que, par jugement du 19 juillet 2002, le tribunal, sur assignation de l'URSSAF, a mis M. X... en redressement judiciaire, la date de cessation des paiement étant fixée à cette date ; que ce dernier a interjeté appel en demandant l'annulation du jugement et en contestant son état de cessation des paiements ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande en annulation du jugement, alors selon le moyen :
1°) qu'un jugement ne fait foi jusqu'à inscription de faux que des faits que le juge y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même ou comme ayant eu lieu en sa présence ; qu'en l'espèce, il ne résultait pas des énonciations du jugement que le tribunal de commerce avait lui-même avisé verbalement les parties de la date des audiences consécutives de cette juridiction, ou que de tels avis avaient été donnés en la présence des juges le composant ; qu'il appartenait dès lors à la cour d'appel de vérifier s'il avait été satisfait aux exigences de l'article 870 du nouveau Code de procédure civile, selon lequel lorsque l'affaire n'est pas jugée à la première audience, le greffier avise par lettre simple les parties qui ne l'auraient pas été verbalement, de la date d'audience; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, motif pris de ce que le jugement n'avait pas été attaqué par la voie de l'inscription de faux, la cour d'appel a violé l'article 457 du nouveau Code de procédure civile ;
2°) que tout jugement, même réputé contradictoire, doit être motivé, à peine de nullité ; que s'il définissait de façon théorique l'état de cessation des paiements et s'il en affirmait l'existence, le jugement réputé contradictoire ayant ouvert la procédure collective de M. X... ne comportait aucune mention propre à permettre de vérifier la circonstance que celui-ci se serait trouvé dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ; que par suite la nullité du jugement d'ouverture était caractérisée ; qu'en estimant qu'il n'y avait pas lieu à annulation, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que M. X... ayant fondé sa demande en nullité du jugement sur la violation des droits de la défense, la cour d appel, qui se trouvait saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, a statué à nouveau, en fait et en droit ; qu'il s'ensuit que M. X... est dépourvu d'intérêt à contester la décision en ce qu'elle a rejeté sa demande en annulation du jugement; que le moyen est irrecevable ;
Et sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement, alors, selon le moyen :
1°) que la cessation des paiements doit être appréciée au jour où statue la juridiction même en cause d'appel ; que loin d'apprécier l'état de cessation des paiements au jour où elle a statué, le 18 mai 2004, la cour d'appel s'est déterminée d'après les éléments de passif exigibles aux 19 juillet 2002, date du jugement d'ouverture, 14 août 2002, date d'un courrier adressé par un huissier de justice à l'URSSAF et 5 décembre 2002, date du dépôt de l'état des créances et sans prendre en considération l'actif disponible ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article L. 621-1 du Code de commerce ;
2°) que lorsque la procédure est ouverte sur assignation d'un créancier, il lui appartient de préciser la nature et le montant de la créance et d'indiquer les procédures ou voies d'exécution engagées pour le recouvrement de la créance ; qu'après avoir constaté que la demande avait été formée par l'URSSAF, la cour d'appel devait rechercher si l'assignation de cette dernière répondait à ces exigences ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 621-2 du Code de commerce, ensemble l'article 7 du décret du 27 décembre 1985 dans sa rédaction applicable au cas présent ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève qu'il résulte d'un rapport établi à la demande de M. X... qu'à la date du 19 juillet 2002, le montant dû à titre principal sur l'en-cours des cotisations s'élevait à 4 844,40 euros et que l'état des créances en date du 5 décembre 2002 faisait apparaître un passif exigible définitif s'élevant à 111 226 euros ;
qu'il retient encore qu'il ressort d'un courrier du 14 août 2002 adressé par un huissier de justice au directeur de l'URSSAF que les saisies-attributions pratiquées s'étaient avérées infructueuses ; qu'ayant ainsi fait ressortir que l'impossibilité pour M. X... de faire face à son passif exigible avec son actif disponible existait encore au jour où elle statuait, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de ses conclusions, ni de l'arrêt que M. X... ait soutenu devant la cour d'appel la prétention qu'il fait valoir au soutien de la seconde branche qui est nouvelle et mélangée de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande tendant à voir condamner l'URSSAF aux dépens et à supporter des frais irrépétibles alors, selon le moyen, que commet une faute et doit être condamnée au paiement des frais de procédure et donc, à tout le moins aux dépens et aux frais irrépétibles du débiteur, le créancier qui demande l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de son débiteur dès lors que la demande de mise en redressement judiciaire ne peut être utilisée comme moyen de pression pour obtenir le règlement de dettes et qu'il existe au bénéfice de l'URSSAF des procédures amiables ou judiciaires adaptées à une demande de règlement d'une part, et que le débiteur établit de façon incontestable qu'il disposait lors de l'assignation et dispose, lors de l'audience, d'une trésorerie suffisante pour régler immédiatement sa dette ; qu'après avoir constaté que sur l'assignation de l'URSSAF en ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, l'instance devant le tribunal de commerce avait fait l'objet de huit renvois, la cour d'appel devait rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, au regard des chiffres mentionnés dans l'expertise comptable offerte en preuve que le débiteur avait fait réaliser, si l'URSSAF avait délivré une assignation et accepté des renvois, aux fins d'exercer des pressions sur le commerçant et d'obtenir, par voie de conséquence, des paiements préférentiels ; qu'en rejetant la demande en paiement des dépens sans procéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 621-2 du Code de commerce, ensemble l'article 7 du décret du 27 décembre 1985 dans sa rédaction applicable au cas présent, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Mais attendu que la cour d'appel qui, après avoir confirmé le jugement de redressement judiciaire de M. X..., a fait l'exacte application des dispositions des articles 696 et 700 du nouveau Code de procédure civile en condamnant la partie qui succombe aux dépens et en rejetant la demande relative aux frais irrépétibles, n'a pas encouru les griefs du moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.