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Décisions

Cass. com., 17 juin 2020, n° 18-25.262

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Vaissette

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Bordeaux, du 1 oct. 2018

1 octobre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1er octobre 2018), la société Le Port de la Lune a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 29 janvier 2014 qui a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au jour du jugement. La procédure a été convertie en liquidation judiciaire le 26 mars 2014. A la demande du liquidateur, la date de cessation des paiements a été reportée au 15 septembre 2013 par un jugement du 9 septembre 2015, publié au BODACC le 29 septembre 2015. Par déclaration au greffe du 22 décembre 2016, les sociétés Les Ports de Lune, Le Café du Port ainsi que M. et Mme Q... ont formé tierce opposition au jugement du 9 septembre 2015.

Examen du moyen unique

Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner à la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

3. Les sociétés Les Ports de Lune et Le Café du Port ainsi que M. et Mme Q... font grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant déclaré irrecevable leur tierce opposition alors :

« 1°) que si le délai prévu par l'article R. 661-2 du code de commerce déroge au délai de droit commun et exclut l'application du droit commun à cet égard, l'application de l'article R. 661-2 du code de commerce doit, pour les règles qui ne sont pas contraires, être combinée avec les règles de droit commun relatives à la tierce opposition, notamment celles relatives à l'intérêt à agir ; qu'en énonçant que l'article R. 661-2 du code de commerce « est exclusif des règles de droit commun » de la tierce opposition, la cour d'appel a violé l'article R. 661-2 du code de commerce ensemble l'article 583 du code de procédure civile ;

2°) que pour pouvoir former tierce-opposition, il faut y avoir intérêt ; qu'il en résulte que le délai pour former tierce-opposition au jugement reportant la date de cessation des paiements ne court à l'égard d'un tiers qu'à compter du moment auquel il a intérêt à agir ; qu'en refusant de reporter la date de cessation des paiement à la réception, par les consorts Q..., de leur assignation en comblement de l'insuffisance d'actif aux motifs que les appelants ne pourraient « sérieusement soutenir qu'ils pourraient fixer arbitrairement le point de départ du délai pour former tierce opposition à une date qui leur conviendrait » et qu'un tel report impliquerait « une recevabilité perpétuelle » de la tierce opposition, la cour d'appel a violé les articles R. 661-2 du code de commerce et 31 et 583 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'Homme. »

Réponse de la Cour

4. Un dirigeant ou un ancien dirigeant, comme un créancier, informés par la publication au BODACC d'un jugement de report de la date de cessation des paiements, qui est susceptible d'avoir une incidence sur leurs droits en application, pour les deux premiers, des dispositions du titre V du livre VI du code de commerce relatif aux responsabilités et sanctions et, pour le dernier, des articles L. 632-1 et L. 632-2 du même code , ont, dès la date de publication, un intérêt à former tierce opposition à la décision de report s'ils n'y étaient pas parties.

5. L'arrêt retient exactement que les sociétés Les Ports de Lune, Le Café du Port ainsi que M. et Mme Q..., en leurs qualités d'anciens dirigeants et de créanciers de la société débitrice, avaient intérêt à former tierce opposition au jugement de report de la date de cessation des paiements de cette société, dès sa publication au BODACC, le 29 septembre 2015, et que seule cette date, à l'exclusion de celle de la délivrance de l'assignation en responsabilité pour insuffisance d'actif, constituait le point de départ du délai de dix jours imparti par l'article R. 661-2 du code de commerce pour former tierce opposition, lequel était, dès lors, expiré lorsque la tierce opposition a été formée le 22 décembre 2016.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.