Décisions
Cass. com., 5 décembre 1989, n° 88-10.340
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Defontaine
Rapporteur :
Mme Pasturel
Avocat général :
M. Raynaud
Avocats :
Me Cossa, SCP Coutard et Mayer
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 décembre 1987), que M. X... ne lui ayant pas réglé le montant des condamnations prononcées à son encontre par un précédent jugement, la société Tricots Y and J (la société) l'a assigné en redressement judiciaire le 15 mai 1986 puis a retiré sa demande, les parties s'étant mises d'accord sur un paiement échelonné des sommes dues ; que M. X... ayant cessé de tenir ses engagements après un certain nombre de versements et ayant sollicité, par lettre du 29 novembre 1986, l'étalement du solde de sa dette, la société l'a, de nouveau, assigné en redressement judiciaire le 17 décembre 1986 et que la procédure collective a été ouverte par un jugement du 21 mai 1987 dont appel a été relevé par le débiteur ; que la société a renoncé devant la juridiction du second degré à sa demande de redressement judiciaire, eu égard à l'acompte qu'elle avait reçu ; que la cour d'appel a infirmé le jugement déféré en décidant que le redressement judiciaire de M. X... n'avait pas lieu d'être prononcé ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée aux dépens tant de première instance que d'appel, y compris les frais occasionnés par la procédure de redressement judiciaire alors, selon le pourvoi, d'une part, que lesdits frais ne faisant pas partie des dépens, mais constituant une charge du débiteur, la cour d'appel a violé l'article 695 du nouveau Code de procédure civile et les articles 21 et suivants du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985 ; et alors, d'autre part, qu'en relevant seulement que la société avait délivré deux assignations en redressement judiciaire, pour en déduire qu'elle avait voulu exercer un moyen de pression sur le débiteur et en reprochant à la créancière d'avoir déduit d'un courrier faisant offre de règlement mensuel un état de cessation des paiements non caractérisé, pour décider que son action aurait dû être déclarée irrecevable, sans rechercher si le débiteur se trouvait ou non en état de cessation des paiements, tandis que les premiers juges avaient relevé que M. X..., qui s'était fait radier du registre du commerce, écrivait à la société qu'il n'avait plus son commerce d'Angoulême, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article 3 de la loi du 25 janvier 1985 et de l'article 96 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève que M. X... ayant adressé une lettre à la société pour lui faire une offre de règlement, même faible, celle-ci en avait déduit un état de cessation des paiements qui n'était pas caractérisé et qu'en délivrant successivement deux assignations en redressement judiciaire à son débiteur elle avait entendu exercer sur lui un moyen de pression, contrairement aux dispositions des articles 3 de la loi du 25 janvier 1985 et 7, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, desquelles il résulte que la société avait commis une faute en demandant l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. X..., la cour d'appel a pu, malgré l'impropriété du terme dépens appliqué aux frais occasionnés par la procédure de redressement judiciaire, condamner la société au paiement de ces frais ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.