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Décisions

Cass. soc., 12 mai 1998, n° 96-40.606

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gélineau-Larrivet

Rapporteur :

M. Waquet

Avocat général :

M. de Caigny

Avocat :

Me Bouthors

Amiens, du 26 oct. 1995

26 octobre 1995

Attendu que M. X... a été engagé le 28 décembre 1992 en qualité de métreur par la Société nouvelle Gosselin ; qu'il a été licencié par son employeur pour motif économique le 19 novembre 1993 alors, d'une part, que le même jour, le tribunal de commerce avait ouvert la procédure de redressement judiciaire de la société précitée et alors, d'autre part, que le salarié était en arrêt de travail en raison d'une rechute d'accident du travail ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que le salarié reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande en paiement de l'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L. 122-32-6 du Code du travail, en retenant qu'il n'avait pas deux années d'ancienneté, alors que, selon le moyen, la condition d'ancienneté n'est pas exigée par l'article L. 122-32-6 du Code du travail dont les dispositions ont été violées ;

Mais attendu que l'indemnité prévue par l'article L. 122-32-6 du Code du travail n'est due qu'en cas de licenciement à l'issue de la période de suspension ; que M. X... ayant vu son contrat de travail rompu au cours de la période de suspension ne peut y prétendre ; que, par ce motif de pur droit substitué à ceux erronés de l'arrêt, la décision se trouve légalement justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 45 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 et 14, alinéa 2, du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, lorsque des licenciements pour motif économique présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable pendant la période d'observation, l'administrateur peut être autorisé par le juge-commissaire à procéder à ces licenciements ; qu'aux termes du second texte le jugement d'ouverture du redressement judiciaire prend effet à compter de sa date ;

Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt attaqué énonce que la procédure de licenciement a été engagée par l'employeur avant le jugement de redressement judiciaire, que la preuve n'est pas rapportée que la lettre de licenciement a été envoyée après le prononcé de la décision ouvrant la procédure collective et que, l'article 45 de la loi du 25 janvier 1985 n'interdisant pas les licenciements pendant la période d'observation, mais les soumettant à des conditions de forme et à la condition de fond qu'ils aient un caractère urgent, inévitable et indispensable, ce caractère est implicitement reconnu par le rapport du représentant des créanciers ;

Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que le prononcé du jugement de redressement judiciaire a entraîné l'ouverture de la période d'observation dès la première heure du jour de son prononcé, alors, d'autre part, que dès l'instant que la période d'observation était ouverte, il appartenait au juge-commissaire d'autoriser le licenciement, en vérifiant la cause économique du licenciement et son caractère urgent, inévitable et indispensable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt a rejeté la demande en paiement d'une indemnité de préavis égale à un mois de salaire sans énoncer aucun motif et après avoir relevé que la lettre de licenciement reconnaissait à M. X... le droit à un préavis d'un mois ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité de préavis et de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif, l'arrêt rendu le 26 octobre 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.