CA Aix-en-Provence, 8e ch. A, 22 septembre 2016, n° 15/17501
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
URSSAF PACA
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Roussel
Conseillers :
Mme Durand, Mme Dubois
EXPOSE DES FAITS :
Par jugement réputé contradictoire du 10/09/2015, le tribunal de grande instance de Digne les Bains a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. Eric M., masseur kinésithérapeute à Manosque, fixé la date de cessation des paiements au 4/05/2015 et désigné la SCP JP L. et A. L. en qualité de liquidateur judiciaire.
Par acte du 6/10/2015 , M. M. a interjeté appel de cette décision.
Une ordonnance du premier président du 13/11/2015 a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 16/12/2015 et tenues pour intégralement reprises, l'appelant demande à la cour de :
- à titre principal,
- constater l'absence de mention dans le jugement de liquidation judiciaire de la convocation de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes à son audience de comparution,
- dire et juger que l'absence de convocation de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes constitue une irrégularité de fond affectant le jugement de liquidation judiciaire rendu, et lui cause grief,
- en conséquence, annuler purement et simplement le jugement entrepris,
- à titre subsidiaire,
- réformer le jugement attaqué,
- dire qu'un redressement de son activité est possible,
- en conséquence, ouvrir une procédure de redressement judiciaire à son encontre,
- renvoyer la cause et les parties devant la chambre des procédures collectives du tribunal de grande instance de Digne les Bains pour présentation d'un plan d'apurement du passif,
- ouvrir à cet effet une période d' observation de cinq mois,
- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective.
Dans ses dernières écritures déposées et notifiées le 2/03/2016 et tenues pour intégralement reprises, l'URSSAF PACA prie la cour, au visa des articles L. 631-1 et suivants, L. 640-1 et suivants, R. 662-1 du code de commerce et 562 du code de procédure civile, de :
- dans l'hypothèse où la cour annulerait le jugement en cause :
- constater l'état de cessation des paiements de M. M.,
- en Conséquence :
- prononcer à son encontre l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire,
- dire que la procédure sera reprise sur les derniers errements par le tribunal de grande instance de Digne les Bains,
- renvoyer en conséquence l'affaire devant le tribunal de grande instance de Digne les Bains aux fins de fixation des délais de la procédure, de désignation des organes de la procédure collective, d'accomplissement des formalités de publicité et de présentation d'un plan de redressement,
- fixer à cinq mois la durée de la période d'observation,
- à titre subsidiaire :
- prononcer l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de M. M.,
- voir nommer tel juge commissaire, tel mandataire judiciaire, et tels liquidateurs judiciaires qu'il plaira à la cour de désigner,
- en tout état de cause,
- condamner l'appelant à lui payer la somme de 1.500 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 12/02/2016, la SCP JP L. et A. L. demande à la cour, au visa de u l'article L. 621-1 du Code de commerce, de :
- statuer ce que de droit sur l'annulation du jugement,
- dans l'hypothèse où la Cour annulerait le jugement entrepris, vu l'article R. 640-2 du Code de commerce,
- statuer ce que de droit sur l'état de cessation des paiements et les chances de redressement de monsieur m.,
- en conséquence de quoi, statuer ce que de droit sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à titre principal ou de liquidation judiciaire à titre subsidiaire,
- le cas échéant, statuer ce que de droit sur la date de cessation des paiements, la désignation des organes de la procédure et la fixation de la période d'observation conformément à l'article L. 621-3 du code de commerce,
- le cas échéant, renvoyer les parties devant le tribunal de grande instance de Digne les Bains pour le suivi de la période d'observation,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
Dans son avis notifié le 26/05/2016 le procureur général s'en rapporte à la décision de la cour au vu des éléments nouveaux susceptibles d'être produits par le débiteur dans le cadre de l'instance.
D'accord parties, l'ordonnance de clôture du 25/05/2016 a été révoquée et une nouvelle clôture est intervenue le 8/06/2016.
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SUR CE :
Sur la recevabilité des conclusions :
Aux termes des articles 963 et 964 du code de procédure civile, les parties justifient à peine d'irrecevabilité constatée d'office par le magistrat ou la formation compétente, de l'appel ou des défenses selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts.
En l'espèce, nonobstant l'avertissement donné par le greffe, la SCP JP L. et A. L. ne s'est pas acquittée du droit précité.
Ses conclusions déposées le 12/02/2016 doivent par conséquent être déclarées d'office irrecevables.
Sur l'annulation du jugement :
Selon l'article L. 621-1 alinéa 2 du code de commerce, lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, le tribunal statue après avoir entendu ou dûment appelé, dans les mêmes conditions, l'ordre professionnel ou l'autorité compétente dont, le cas échéant, il relève.
Il n'est pas discuté qu'en l'espèce, le conseil départemental de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes n'a pas été convoqué par le tribunal de grande instance de Digne les Bains.
Les dispositions de l'article L. 621-2 étant d'ordre public, leur non-respect vicie la procédure et entraîne la nullité du jugement d'ouverture, indépendamment de l'existence d'un grief.
Sur l'effet dévolutif de l'appel :
En vertu de l'article 561 du code de procédure civile, l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit.
Selon l'article 562 alinéa 2, du Code de procédure civile, la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si 'objet est indivisible.
A ce titre, et conformément à l'article R. 640-2 du Code de commerce, la cour d'appel qui annule un jugement statuant sur l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ou son prononcé, peut d'office ouvrir la procédure de liquidation judiciaire ou la prononcer. En cas d'infirmation du jugement ouvrant la procédure de liquidation judiciaire, elle peut, d'office, ouvrir la procédure de redressement judiciaire.
Il apparaît néanmoins nécessaire avant dire droit, en application de l'article L. 621-1 al 2 du code de commerce , d'inviter l'URSSAF PACA à l'origine de la procédure collective ouverte à l'égard de M. M., de mettre en cause le conseil départemental de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes.
Dans l'attente, il sera sursis à statuer sur le surplus des demandes et l'affaire sera renvoyée à l'audience du mercredi 11 janvier 2017.
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PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition,
DECLARE irrecevables les conclusions de la SCP JP L. et A. L. du 12/02/2016,
ANNULE le jugement du 10/09/2015 entrepris,
EVOQUANT, par arrêt avant dire droit,
INVITE l'URSSAF PACA à mettre en cause le conseil départemental de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes,
SURSOIT à statuer sur le surplus des demandes,
RENVOIE l'affaire à l'audience du mercredi 11 janvier 2017, à 8h40,
RESERVE les dépens.