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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 14 septembre 2012, n° 10/01568

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Van Cleef & Arpels France (SAS), Van Cleef & Arpels (SA), Van Cleef & Arpels International (Sté), Compagnie Financière Richemont (SA), Richemont International (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lachacinski

Conseillers :

M. Rajbaut, Mme Nerot

TGI Paris, 3e ch. sect. 1, du 19 janv. 2…

19 janvier 2010

Le groupe Van Cleef & Arpels qui appartient au groupe Richemont, créée, fabrique et commercialise des produits de haute joaillerie et d'horlogerie sous la marque 'Van Cleef & Arpels' propriété de la société Van Cleef & Arpels SA ;

Thierry B. est ouvrier joaillier de formation et a d'abord été employé en cette qualité le 8 juillet 1985 par les ateliers Alfred L. qui fabriquaient certaines des pièces de joaillerie de marque Van Cleef & Arpels, sans que cette embauche n'ait été formalisée par un contrat écrit ;

Le 1er septembre 2000, il a été nommé dessinateur et a rejoint une autre société du groupe Van Cleef & Arpels déjà détenue par le groupe Richemont depuis plus d'un an, sans que les relations de travail entre les parties ne soit formalisées par un contrat écrit ;

Le travail de Thierry B. consistait pendant plus de cinq années à contribuer à la réalisation de dessins de joaillerie au sein de l'équipe de dessinateurs de l'entreprise, fonction qui l'a conduit à être considéré comme le responsable de l'équipe de dessinateurs ;

Au mois d'avril 2004, le groupe Van Cleef & Arpels lui a proposé un contrat de travail afin de formaliser les relations de travail existantes, sous la forme de deux documents intitulés 'Contrat de travail à durée indéterminée créateur/dessinateur' et 'Annexe du contrat de travail cession exclusive des droits d'auteur' qu'il a refusé de signer à plusieurs reprises estimant que ces documents ne correspondaient pas à la réalité et qu'ils comportaient des dispositions illégales notamment celles relatives à la cession de ses droits d'auteur et à l'interdiction qui lui était faite de revendiquer un quelconque droit d'auteur patrimonial ou moral ;

Thierry B. dit avoir subi pendant huit mois un harcèlement moral de la part du groupe Van Cleef & Arpels se manifestant par une succession d'entretiens avec différents responsables en vue de la signature des contrats en l'état, par la sommation qui lui a été faite au mois de juin 2005 d'avoir à remettre ses dessins originaux, ce qu'il a refusé et par l'annonce de la part du groupe de la décision prise de le licencier pour faute grave ;

Le 21 juillet puis le 1er août 2005, Thierry B. mettait en demeure le groupe Van Cleef & Arpels d'avoir à cesser dans le monde entier toutes reproductions, représentations et adaptations de ses dessins, mises en demeure qui selon lui seraient demeurées vaines ;

Le licenciement ayant été prononcé le 21 septembre 2005 pour faute grave, Thierry B. saisissait le conseil des Prud'hommes pour que son licenciement soit jugé abusif ;

Estimant être titulaire de droits d'auteur sur les dessins originaux qu'il avaient créés entre les années 2000 et 2005 et considérant qu'il n'en avait jamais cédé les droits au groupe Van Cleef & Arpels, Thierry B. a assigné le 25 octobre 2005 le groupe Van Cleef & Arpels devant le tribunal de grande instance de Paris pour le voir condamner à le rémunérer au titre de la rémunération proportionnelle pour l'exploitation des créations antérieures à l'année 2005 et lui interdire toute exploitation, reproduction, représentation et adaptation de ses créations ;

Le juge départiteur a rendu le 18 mars 2009 une décision par laquelle était jugé que le licenciement de Thierry B. par le groupe Van Cleef & Arpels était dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'il avait été victime de harcèlement moral ;

Thierry B. demandait au tribunal de dire qu'il était investi de la plénitude des droits d'auteur sur les créations matérialisées par les dessins originaux régulièrement communiqués et séquestrés entre les mains de Monsieur de Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris et qu'il était propriétaire des supports matériels de ces dessins ;

Il sollicitait notamment de faire interdiction aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie financière Richemont SA, Richemont international SA de commercialiser toutes pièces de joaillerie reproduisant les dessins dans le monde entier, sous astreinte, de procéder à toutes reproductions, représentations et/ou adaptations des dessins, sur tous supports et formats, la destruction de tous catalogues, de toutes copies ou pictos, de toute publication par quelque moyen que ce soit, sous astreinte, d'ordonner le dessertissage et la fonte des métaux de toutes pièces de joaillerie qui reproduiraient les dessins également sous astreinte, la désignation d'un expert afin de déterminer l'assiette de ses droits d'auteur et la condamnation du groupe Van Cleef & Arpels à lui payer la somme provisionnelle de 3.000.000 euros à titre de dommages intérêts, outre une somme de 3% sur le prix de vente au public hors taxes de chacune des pièces de joaillerie reproduisant ses dessins vendues antérieurement au 15 septembre 2005 et une somme égale au profit net réalisé pour chacune des pièces de joaillerie reproduisant ses dessins postérieurement au 15 septembre 2005 ;

Par jugement non assorti de l'exécution provisoire du19 janvier 2010, le tribunal a :

- déclaré Thierry B. irrecevable en son action fondée sur la protection de droits d'auteur sur ses dessins à l'égard des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA aux motifs notamment qu'il ne décrit pas les dessins dont il se prétend l'auteur et n'indique pas pour chacun d'eux quel a été son apport personnel dans la création de ces dessins,

- rejeté l'ensemble de ses demandes,

- rejeté la demande reconventionnelle des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie financière Richemont SA, Richemont International SA en réparation pour procédure abusive,

- condamné Thierry B. à verser à la société Van Cleef & Arpels International la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné Thierry B. aux entiers dépens ;

Vu l'appel interjeté le 27 janvier 2010 par Thierry B. ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 10 février 2012 par lesquelles Thierry B. demande à la cour :

- de réformer le jugement rendu le 19 janvier 2010 par le tribunal de grande instance de Paris en toutes ses dispositions ,

- de lui donner acte de ce qu'il revendique des droits sur les dessins suivants numérotés ci-après l'Addendum des conclusions communiquées le 9 décembre 2010 :

et par conséquent :

1. Sur les supports matériels

- de dire qu'il est propriétaire des supports matériels des dessins,

- d'ordonner la main levée du séquestre et la restitution des dessins,

2. Sur la propriété intellectuelle et les autres demandes

' A titre principal,

- de dire qu'il est titulaire de l'ensemble des droits de propriété intellectuelle sur les dessins,

- de faire interdiction aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA d'exploiter les dessins et donc de commercialiser toute pièce de joaillerie reproduisant les dessins dans le monde entier et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée,

- de faire interdiction aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA de procéder à toutes reproductions, représentations et/ou adaptations des dessins dans le monde entier et sur tous supports et formats quels qu'ils soient, en ce notamment compris - et sans que cette énumération soit limitative - les bijoux, les catalogues, les sites internet et les publications de sorte sous astreinte de 10 euros par infraction constatée,

- d'ordonner la destruction sous contrôle d'huissier de tous catalogues, de toutes copies ou pictos conservées par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA, de toute présentation, de toute publication par quelque moyen que de soit (y compris le retrait s'agissant d'internet) et plus généralement de toute reproduction, représentation et/ou adaptation des dessins sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir,

- d'ordonner le dessertissage et la fonte des métaux de toutes pièces de joaillerie qui reproduiraient les dessins sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir,

' A titre subsidiaire,

- de désigner tel expert joaillier indépendant qu'il plaira dont les frais seront intégralement supportés par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA avec pour mission de se faire remettre les pièces B58, B59, B71, B72, B73, B75, B76, B77, B78, B79, B80 - ci-après les Notes - et d'apprécier les ressemblances entre (i) les modèles revendiqués par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA comme provenant de son fonds d'archives qui sont reproduits dans les Notes et (ii) les modèles qu'il revendique et qui sont reproduits dans les Notes,

- de constater que les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA ne conteste pas que les modèles qui ne sont reproduits dans les Notes lui appartiennent,

- de constater que les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA ne contestent pas que le modèle Frivole (FRIVOLE 1 à FRIVOLE 39) est original et lui appartient faute de directives susceptibles de caractériser l'oeuvre collective,

Par conséquent,

- de dire qu'il est le titulaire de l'ensemble des droits de propriété intellectuelle sur les dessins (FRIVOLE 1 à FRIVOLE 39) et sur les dessins qui ne pas reproduits dans les Notes (ci-après ensemble : les dessins subsidiaires),

Et par conséquent,

- de faire interdiction aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA d'exploiter les dessins subsidiaires et donc de commercialiser toute pièce de joaillerie reproduisant les dessins subsidiaires dans le monde entier et sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée,

- de faire interdiction aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA de procéder à toutes reproductions, représentations et/ou adaptations des dessins subsidiaires dans le monde entier et sur tous supports et formats quels qu'ils soient, en ce notamment compris et sans que cette énumération soit limitative, les bijoux, les catalogues, les sites internet et les publications de toutes sortes sous astreinte de 10 euros par infraction constatée,

- d'ordonner la destruction sous contrôle d'huissier de tous catalogues, de toutes copies ou pictos conservées par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA, de toute présentation, de toute publication par quelque moyen que de soit (y compris le retrait s'agissant d'internet) et plus généralement de toute reproduction, représentation et/ou adaptation des dessins subsidiaires sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir,

- d'ordonner le dessertissage et la fonte des métaux de toutes pièces de joaillerie qui reproduirait les dessins subsidiaires sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir,

' En toute hypothèse

Sur les publications,

- d'ordonner la publication de la décision à intervenir, pendant une durée d'un mois et passé le délai de deux mois à compter de cette décision, en langue française et anglaise, en intégralité, sans changement ni commentaires en tête de page des sites internet en ligne aux adresses suivantes www.vancleef.com et www.richemont.com dans un encadré d'une surface de 468x120 pixels, le texte reproduit devant être d'une taille suffisante pour recouvrir l'intégralité la surface développée à cet effet en caractères gras de couleur noire de 0,5cn de hauteur sur 0,5 cm de largeur sur fond blanc, à l'exception du titre en caractères gras majuscules de 2 cm de hauteur et 2 cm de largeur et de couleur rouge,

- d'ordonner la publication de la décision à intervenir dans cinq magazines ou quotidiens nationaux de son choix en pleine page et aux frais des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA,

Sur la communication et la mesure d'expertise,

- d'ordonner aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA de produire sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard, passé le délai de deux mois à compter de la signification de la décision à intervenir une liste détaillée de l'ensemble des pièces de joaillerie vendue partout dans le monde depuis le 1er janvier 2000 certifiée par la commissaire aux comptes du groupe Van Cleef incluant pour chaque pièce une photographie en format A4, le prix public hors taxes converti en euros, le profit net réalisé converti si nécessaire en euros et le nombre d'exemplaires vendus ainsi que les dates auxquelles chaque exemplaire a été vendu (ci-après : la Liste),

- d'ordonner au commissaire aux comptes de remettre la Liste à la cour et aux parties qui pourront faire valoir leurs observations afin que la cour détermine quels sont les modèles contrefaisants,

- de désigner un expert financier dont les frais seront intégralement supportés par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA avec pour mission de se remettre la Liste et la décision et de déterminer le nombre d'exemplaires vendus pour chaque pièce de joaillerie visée dans la Liste (i), le nombre d'exemplaires vendus (ii) le chiffre d'affaires hors taxes global réalisé sur la base du prix public de vente avant le 15 septembre 2005 et (iii) le profit net réalisé après le 15 septembre 2005,

- de condamner pour les produits vendus sur la période antérieure au 15 septembre 2005 les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA à lui payer 3% sur le prix de vente au public hors taxes de chacune des pièces de joaillerie reproduisant ses dessins à déterminer à dire d'expert,

- de condamner pour les produits vendus sur la période postérieure au 15 septembre 2005 les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA à lui payer une somme correspondant au profit net réalisé sur chacune des pièces de joaillerie reproduisant ses dessins à déterminer à dire d'expert,

- de condamner les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA à lui payer la somme de 0,1 euro par infraction à son droit de paternité constaté à dire d'expert,

- de lui donner acte de ce qu'il réserve ses droits s'agissant d'une violation par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA du droit au respect de son oeuvre,

- de lui donner acte de ce qu'il se réserve le droit de formuler de nouvelles demandes aussi bien au titre du droit patrimonial que du droit moral si de nouveaux agissement contrefaisants sur d'autres dessins étaient identifiés,

Sur les autres demandes

- de déclarer les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA irrecevable à agir sur le fondement de l'oeuvre collective en ce qu'elle en démontre pas laquelle de ses entités serait titulaire des droits qu'elle invoque,

- de débouter les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA de l'ensemble de leurs demandes,

- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement(sic) à intervenir,

- de condamner les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA à lui payer la somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 16 février 2012 par lesquelles les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA prient la cour au visa des articles 6, 9, 30 et suivants, 122, 238, 263 et 700 du code de procédure civile, Le Livre I du code de la propriété intellectuelle et notamment des articles L. 113-2 alinéa 3 et L. 113-5 :

' A titre principal,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré Thierry B. irrecevable en son action fondée sur les droits d'auteurs qu'il revendiquait sur les dessins de joaillerie litigieux,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes reconventionnelles en réparation pour procédure abusive,

En conséquence,

- de déclarer Thierry B. irrecevable en son action,

- de rejeter l'ensemble de ses demandes y compris la demande de désignation d'un expert joaillier pour apprécier les ressemblances entre les archives de Van Cleef & Arpels et les dessins réalisés par Thierry B.,

- de condamner Thierry B. à leur payer la somme de 30.000 euros en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la procédure engagée,

' A titre subsidiaire,

- de dire que les dessins argués de contrefaçon sont des contributions à des bijoux commercialisés sous la marque 'Van Cleef & Arpels' oeuvres collectives, propriété ab initio des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA,

- de déclarer Thierry B. irrecevable en son action et de rejeter l'ensemble de ses demandes,

En toute hypothèse,

- de condamner Thierry B. à leur payer à chacune d'elles la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

SUR QUOI, LA COUR :

Sur la recevabilité à agir de Thierry B. au titre de la titularité des droits d'auteur :

Thierry B. critique la décision déférée en ce qu'elle a, à tort selon lui, considéré qu'il était irrecevable à agir aux motifs qu'il aurait versé aux débats des dessins sans fournir aucune analyse pour expliquer son apport créatif et qu'il se serait également abstenu de répondre aux arguments des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International et Compagnie Financière Richemont ;

Les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA concluent au contraire à la confirmation du jugement déféré qui a déclaré l'action fondée sur la protection de droits d'auteur irrecevable et soutiennent d'une part que Thierry B. ne rapporte pas la preuve de sa qualité d'auteur, faute de démontrer que les dessins qu'il revendique porte l'empreinte de sa personnalité, d'autre part que les dessins de joaillerie ne sont que des contributions à des oeuvres collectives dont les droits leur appartiennent ;

Elles ajoutent que les dessins versés aux débats auxquels Thierry B. a contribué démontrent au contraire qu'ils proviennent du patrimoine esthétique de la Maison Van Cleef & Arpels comme le démontrent les notes de traçabilité esthétique qu'elles ont communiquées lesquelles sont organisées selon des thèmes historiquement développées au sein de la maison telles les fleurs, la couture (les noeuds, les passants, les boutonnières) ;

Les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA indiquent que le style Van Cleef & Arpels est caractérisé par l'usage de formes le plus souvent figuratives, asymétriques ou inspirées de différents univers et que ce style et les codes esthétiques qui en découlent sont ses 'codes génétiques' lesquels génèrent un lien de parenté entre les différents bijoux de la marque ; que le dessinateur a à puiser son inspiration dans le fonds d'archive et à se conformer au style de la Maison ;

Pour répondre au grief qui lui a été opposé dans la décision frappée d'appel, Thierry B. produit en cause d'appel à la page 10 de ses conclusions la liste des dessins sur lesquels portent ses revendications, les énumérations renvoyant expressément à un dossier relié et numéroté par onglets dans lequel chaque dessin est reproduit en couleur et précisément décrit (Volume I (Pièces n°A1 à A16 - B1 à B 9 - C1 et C2 - D1 à D3 - E1 à E 23 - F1 à F 17 - G1 à G 19), Volume II (Pièces n°H 1 à H 69), Volume III (Pièces n°I 1 à I 25 - J 1 à J 18 - K 1 à K 20), Volume IV ( Pièces L 1 à L 91), Volume V (Pièces M 1 à M 28 - N 1 à N 30 - O 1 à O 6 - P 1 - P 7 - Q 1 à Q 9), Volume VI (Pièces R 1 à R 43 - S 1 à S 3 - T 1 à T 19 - U 1 à U 22), Volume VII (Pièces V 1 à V 23 - W 1 à W 5 - X 1 à X 8 - Y 1 à Y 13 - Z 1 à Z 8), Volume VIII (Pièces n° AA 1 à AA 21 - AB 1 à AB 18 - AC 1 à AC 3 - AD 1 à AD 6 - AE 1 à AE 8 - AF 1 à AF 16 - AG 1 à AG 10) et Volume IX (Pièces Danseuses 1 à 3, Pièces Noeuds 1 à 8, Pièces Frivoles 1 à 39) ;

L'alinéa 3 de l'article L.113-2 du code de la propriété intellectuelle dispose qu'est dite collective l'oeuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom, et dans laquelle la contribution se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé, l'article L.113-5 ajoutant que l'oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée, cette personne étant investie des droits d'auteur ;

Il ressort des pièces versées aux débats que Thierry B. en sa qualité de salarié a réalisé les dessins sur lesquels il revendique les droits d'auteur, les initiales 'TB' figurant sur chacun de ses dessins démontrant l'identité du dessinateur comme en témoigne Virginie R....dans ses attestations datées des 19 juin 2006 et 10 janvier 2008 ('Chaque créateur interne identifie le dessin dont il est l'auteur par ses initiales' Pièce n°S24 et P10 du dossier B.) et Laure M...dans un courriel daté du 5 mai 2004 adressé à Thierry B. lorsqu'elle écrit 'Comme tu es l'heureux créateur des MO Luce, voici deux sets de pierres pour lesquelles il faudrait que tu proposes des dessins genre Luce' (Pièce n°61 du dossier B.) ;

Les sociétés VAN CLEEF & ARPELS reconnaissent d'ailleurs le rôle important des dessinateurs dans le processus de création des modèles de joaillerie puisque le président directeur général en personne le leur reconnaît lorsqu'il déclare dans une entrevue à l'occasion du centième anniversaire de la Maison Van Cleef & Arpels que 'Nos dessins doivent se reconnaître à 20 mètres'et qu'à la question d'une journaliste 'Quel est le point de départ du processus créatif ' La pierre ou le dessin '' Il répond : 'Les deux. Parfois, le dessinateur a une idée de génie. Parfois, on déniche une pierre extraordinaire .....' (Pièce 56 du dossier B.) ;

Mais il est en revanche constant que le travail de dessinateur de Thierry B. s'inscrivait dans un cadre contraignant qui l'obligeait à se conformer aux instructions esthétiques qu'il recevait de ses supérieurs hiérarchiques dans le cadre du Comité de Création (attestations de Nicolas B..., de Isabelle G....., de Isabelle P..... , de Catherine L..... et de Frédéric G.Z.....Pièces respectivement n° C10, C9, C13, C12 et C4 du dossier Van Cleef & Arpels), à puiser son inspiration dans le fonds d'archive de la Maison Van Cleef & Arpels comme le prouvent les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA à propos des thèmes Noeuds, Fées, Couture, Pièces invisibles, Serti mystérieux ou Songes d'une nuit d'été (Pièces respectivement B71, B75, B71 à 74, B76, B59 du dossier Van Cleef & Arpels) ;

Thierry B. sollicitait d'ailleurs l'accord de ses supérieurs hiérarchiques pour valider sa production comme le révèlent les courriels datés des 27 mars 2003 et 14 avril 2005 (Pièces n°B39 et B20 du dossier Van Cleef & Arpels) et qu'il retranscrivait fidèlement les observations qui étaient faites sur ses dessins (Pièce n°B45 du dossier Van Cleef & Arpels) afin de se conformer aux directives qui lui étaient données ;

Il est ainsi démontré que les dessins litigieux qui sont en tant que tels dépourvus de valeur lorsqu'ils ne servent pas à concrétiser un modèle de bijou - les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière

Richemont SA, Richemont international SA ne faisant pas commerce de ces dessins - ont été réalisés dans le respect du style Van Cleef & Arpels en appliquant les codes de la Maison Van Cleef & Arpels ou rattachant les oeuvres nouvelles à des collections préexistantes telles Songe d'une nuit d'été, Bague Violina, Souffle du printemps, Ballerines, Frivole, Trèfles ;

Pour dénier tout droit d'auteur à Thierry B., les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA soutiennent encore à juste titre que les créations de joaillerie ont toujours été divulguées sous leur nom, que les initiales du dessinateur coexistent le plus souvent avec le tampon 'Copyright Van Cleef & Arpels' et qu'elles ont par conséquent été créée dans le cadre d'un travail collectif associant de nombreuses personnes ;

Il est ainsi établi par l'attestation d'Isabelle G.....(Pièce n° C9 du dossier Van Cleef & Arpels), par la note d'Alexandra D.....datée du 24 avril 2002 (Pièce n° B48 du dossier Van Cleef & Arpels) et par les compte-rendus du Comité de Création des 20 décembre 2001 et 1er octobre 2002 (Pièces n°B51 et n°B28 du dossier Van Cleef & Arpels) que d'autres personnes essentiellement salariés faisaient partie de la chaîne de création des modèles de bijoux et qu'elles ont contribué ensemble sous l'autorité de l'employeur à leur réalisation comme le décrit le rapport de stage d'Ornella I.......(Pièce n° B19 du dossier Van Cleef & Arpels) , les dessins sur lesquelles Thierry B. revendique des droits d'auteur n'étant que des documents préparatoires à la conception des bijoux commercialisés par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA lesquelles avaient le pouvoir d'initiative sur la création et en contrôlaient le processus jusqu'au produit finalisé en fournissant à l'équipe créatrice des directives et des instructions esthétiques afin d'harmoniser les différentes contributions ;

Cette absence d'autonomie dans la réalisation du dessin est encore davantage avérée pour les commandes spéciales où le travail du dessinateur se bornait à adapter un produit préexistant en fonction des souhaits du client, des matériaux susceptibles d'être utilisés et dans le respect des directives et instructions données par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA (Pièces n°B40, B64 et B65 du dossier Van Cleef & Arpels) ;

Thierry B. fait grief aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA de lui dénier la qualité d'auteur sur les dessins qu'il revendique alors qu'elles lui ont soumis un projet de contrat de travail à durée indéterminé intitulé 'Créateur/dessinateur' lequel stipulait - Article 2 - que celui-ci devra 'fournir ses meilleurs efforts de façon à faire bénéficier VCA directement ou indirectement de son talent créatif

pour élaborer des articles et produits originaux s'intégrant dans la gamme de produits VCA et en relation avec l'image de très haut de gamme, de luxe et de qualité ,attachée dans l'esprit du public à la société' ;

Il s'étonne également que les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA soutiennent qu'il ne peut bénéficier d'aucun droit d'auteur sur ses dessins alors qu'il lui a été proposé à la signature un contrat de cession exclusive de droits d'auteur annexé au contrat de travail comportant à l'article 1er la clause suivante :' La présente convention a pour objet la cession à titre exclusif par Monsieur Thierry B. à VAN CLEEF & ARPELS de l'intégralité de ses droits de propriété intellectuelle portant sur les oeuvres originales, constituées exclusivement par des modèles de joaillerie et/ou horlogerie au fur et à mesure de leur création, en vertu et dans le cadre de son contrat de travail la liant à VAN CLEEF & ARPELS' et à l'article 6 une interdiction de revendiquer un quelconque droit d'auteur, patrimonial et moral (') s'il ne lui était pas expressément reconnu la qualité de créateur titulaire de droits d'auteur ;

Mais la proposition d'un tel contrat de travail assorti d'un contrat de cession exclusive de droits d'auteur ne saurait conférer à Thierry B. des droits d'auteur particulier dès lors que sa contribution en qualité de dessinateur s'est toujours intégrée dans un long processus créatif qui débute pour la direction artistique de la Maison Van Cleef & Arpels par la décision de lancer un thème de travail pour une collection, par la réalisation d'un dessin, d'une maquette, d'un prototype et d'un modèle qui sera ensuite commercialisé si la Maison Van Cleef & Arpels l'estime justifiée ;

Que ces deux documents donnés à la signature de Thierry B. ne sauraient par conséquent constituer de la part des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA un aveu ou quelconque reconnaissance de droit sur les nombreux dessins qu'il a réalisés pendant de nombreuses années dans le cadre du contrat de travail verbal à durée indéterminée qui le liait à ses employeurs ;

Il se déduit de ce qui précède que chaque dessin ne constitue que la contribution particulière de Thierry B. à une oeuvre collective dont la finalité est toujours un modèle de bijou ; qu'il ne justifie pas, pour chacun des dessins dont il revendique la paternité qu'il disposait d'une réelle autonomie créatrice ainsi que d'une liberté dans les choix esthétiques lui permettant de conclure qu'il est le seul titulaire de droits d'auteur sur ces dessins lesquels reflètent l'empreinte de sa seule personnalité ;

Les modèles de joaillerie litigieux commercialisés par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA auxquels Thierry B. a participé en qualité de créateur/dessinateur ont par conséquent été réalisés à l'initiative, sous la direction et au nom de Van Cleef & Arpels ;

Il s'agit par conséquent d'oeuvres collectives dans la mesure où la contribution personnelle des différents intervenants participant à l'élaboration des modèles se fond dans un ensemble en vue duquel ils sont conçus et qu'en tant que produits finalisés, il n'est pas possible d'attribuer à chacun des intervenants un droit distinct sur les modèles réalisés, chacun ayant concouru à proportion de sa contribution à l'oeuvre finale ;

Les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA sont par conséquent titulaires ab initio des droits patrimoniaux sur les modèles litigieux et sont donc fondées à soulever l'irrecevabilité de la demande formée contre elles par Thierry B. ;

Le jugement déféré qui a conclu à l'irrecevabilité de l'action engagée par Thierry B. sera par des motifs propres à la cour confirmé ;

Sur les demandes reconventionnelles pour procédure abusive formées par les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA :

Elles estiment que l'action engagée par Thierry B. tout comme son appel présentent un caractère particulièrement abusif aux motifs notamment que :

- le détournement de dessins de joaillerie était parfaitement inutile pour les besoins de l'action qu'il a engagée,

- les revendications formulées l'ont été à un moment important de la vie de l'entreprise afin de profiter de sa fragilité supposée,

- l'action engagée est dictée par la négation totale du processus collectif du travail au sein de l'entreprise,

- Thierry B. a orchestré au soutien de son action une campagne médiatique vexatoire à leur encontre,

- l'action engagée l'a été à l'encontre de plusieurs personnes morales et responsables du Groupe Richemont sans la moindre justification,

- Thierry B. a formulé des demandes brutales et vexatoires,

- l'action de Thierry B. est dictée par un esprit de lucre ;

Thierry B. ne s'exprime pas dans ses dernières conclusions d'appel sur les griefs qui lui sont reprochés à ces divers titres ;

S'il ne conteste pas dans ses écritures être en possession de plus de cinq cents supports de dessins de joaillerie, il justifie son action par le risque d'être dépouillé de pièces absolument nécessaires à la démonstration de ses droits ;

Mais les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA lui répliquent pertinemment que l'article L. 111-3 du code de la propriété intellectuelle prévoit que la propriété incorporelle définie à l'article L. 111-1 est indépendante de la propriété de l'objet matériel de sorte qu'il n'était pas nécessaire à Thierry B. de retenir les dessins litigieux pour faire valoir les droits de propriété intellectuelle qu'il prétendait avoir sur eux ;

Ce comportement malicieux initié pour faire contre-poids dans le cadre de négociation à une proposition de contrats dont les termes étaient jugés par lui inacceptables constitue une faute qui justifie la condamnation de Thierry B. à des dommages intérêts ;

La négation d'un processus collectif de travail auquel Thierry B. a participé en connaissance de cause pendant cinq ans ne saurait en revanche constituer une attitude fautive dans la mesure où Thierry B. a pu de bonne foi se méprendre sur la portée de ses droits et croire qu'il était seul investi des droits sur les dessins litigieux ;

Si l'orchestration d'une campagne médiatique dans un litige de nature purement civile est toujours détestable puisque son auteur utilise la presse dans le but d'exercer des pressions directes ou indirectes sur la partie adverse afin de la déstabiliser et de lui nuire, les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA ne démontrent cependant pas que Thierry B. est celui qui est à l'origine des diffusions par voie de presse et qui a personnellement informé les médias de l'existence de ses déboires professionnels (Pièces n°B41, B68 du dossier Van Cleef & Arpels) ;

Les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA reprochent encore à Thierry B. d'avoir attrait dans la cause ces deux dernières sociétés lesquelles, étrangères au litige, n'interviennent pas dans la conception, la fabrication et la commercialisation des bijoux 'Van Cleef & Arpels' ;

Il convient liminairement de souligner que la société RICHEMONT INTERNATIONAL SA venant aux droits de la société RICHEMONT INTELLECTUEL PROPERTY SERVICES SA n'était pas présente en première instance et qu'elle a été visée pour la première fois dans la déclaration d'appel du 27 janvier 2010 ; que le 12 février 2010, la société RICHEMONT INTERNATIONAL SA s'est régulièrement constituée avec les quatre autres sociétés défenderesses en première instance ; qu'elle est donc intervenue volontairement devant la cour ; qu'elle a par conséquent estimé qu'elle avait conformément aux dispositions de l'article 554 du code de procédure civil intérêt à participer à la procédure d'appel ; qu'elle n'est donc pas fondée à se plaindre d'avoir été abusivement impliquée ;

En outre, si les sociétés COMPAGNIE FINANCIÈRE RICHEMONT et RICHEMONT INTERNATIONAL SA estimaient ne pas être concernées par le litige engagé contre elles, il leur appartenait d'invoquer les dispositions de l'article 122 du code de procédure civile qui prévoit que le défaut de qualité ou d'intérêt comme défenderesses ou comme intimées constitue une fin de non recevoir ;

N'ayant pas soulevé ce moyen et étant volontairement demeurées dans la procédure, elles ne sauraient soutenir que leur mise en cause est abusive et constitue une faute de la part de Thierry B. ;

La formulation d'une demande en contrefaçon contre une 'Maison de joaillerie prestigieuse elle-même en permanence victime de faits de contrefaçon, qu'elle fait sanctionner régulièrement tant au civil qu'au pénal' n'est pas en soi constitutive d'une faute dans la

mesure où Thierry B., salarié depuis de très nombreuses années sans qu'aucun contrat de travail écrit ne lui ait été proposé s'est retrouvé à discuter de problèmes de droit d'auteur que son employeur avait étonnement omis de négocier avant son embauche ;

Cette situation devenue conflictuelle du fait de cette carence a eu pour conséquence les demandes formées par Thierry B. que les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA considèrent aujourd'hui comme abusives et vexatoires ;

Les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA ne sauraient également reprocher à Thierry B. la finalité purement lucrative de l'action qu'il a engagée ;

En effet, il ne peut être reproché à un salarié qui s'estime lésé par son employeur de faire valoir ses droits en sollicitant des dommages intérêts ainsi que la mise en oeuvre de mesures accessoires conformément aux dispositions du code de la propriété intellectuelle ;

La seule faute susceptible d'être imputée à Thierry B. justifie sa condamnation à payer aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA la somme de10.000 € à titre de dommages intérêts ;

Les frais non compris dans les dépens engagés par l'ensemble des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA doivent être fixés à la somme de 10.000 € à la charge de Thierry B. ;

L'ensemble des demandes formées par Thierry B. sera rejeté ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme par des motifs propres à la cour le jugement rendu le 19 janvier 2010 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a déclaré Thierry B. irrecevable en son action fondée sur les droits d'auteur qu'il revendique sur les dessins de joaillerie litigieux,

L'infirme en ce qu'il a débouté les sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA et Richemont International SA en leurs demandes reconventionnelles en réparation pour procédure abusive,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne Thierry B. à payer aux sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont international SA la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de restitution des dessins litigieux,

Déboute Thierry B. de l'ensemble de ses demandes,

Condamne Thierry B. à payer à l'ensemble des sociétés Van Cleef & Arpels SA, Van Cleef & Arpels France, Van Cleef & Arpels International, Compagnie Financière Richemont SA, Richemont International SA la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Thierry B. aux entiers dépens d'appel dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.