Cass. com., 17 mars 2015, n° 13-16.336
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
CP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Hémery et Thomas-Raquin
Vu leur connexité, joint les pourvois n° A 13-16.336 et n° B 13-16.337 ;
Donne acte à M. X... agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Ludeno de ce qu'il reprend l'instance au nom de celle-ci ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Nancy, 4 décembre 2012 rectifié par arrêt du 28 janvier 2013 n° 275 et Nancy, 28 janvier 2013 n° 273), que la société Groupe LCX devenue la société Groupe Leblanc (la société LCX), qui a pour activité la fabrication et la commercialisation d'illuminations festives, a conçu un décor dénommé « perle irisée double » dont le modèle a été déposé et enregistré à l'Institut national de la propriété intellectuelle (l'INPI) le 14 avril 2009 ; qu'ayant fait constater par acte d'huissier de justice que les décors installés dans les rues de la ville de Belfort étaient identiques à son modèle et qu'ils avaient été fournis par la société Ludeno, la société LCX a assigné cette dernière en contrefaçon de modèle déposé ; que devant la cour d'appel, elle a en outre invoqué des droits d'auteur sur ce modèle au sens de l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle ; que, par arrêt de déféré, rectifié sur saisine d'office, la cour d'appel a « confirmé » l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevables les conclusions de la société Ludeno ; qu'elle a, par un arrêt distinct du même jour, statué sur le fond du litige ;
Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi n° A 13-16.336, qui est préalable :
Attendu que la société Ludeno fait grief à l'arrêt n° 275 du 28 janvier 2013 de rectifier celui du 4 décembre 2012 en ce qu'il convient de lire « la société LCX » en lieu et place de « la société Ludeno » et réciproquement dans les motifs et le dispositif de l'arrêt alors, selon le moyen, que le jugement doit, à peine de nullité, exposer succinctement les prétentions des parties et leurs moyens ou viser les conclusions des parties avec indication de leur date ; qu'en n'exposant pas, fût-ce succinctement, les moyens et prétentions de la société Ludeno, l'arrêt a méconnu les exigences de l'article 455, alinéa 1er, du code de procédure civile et encourt la nullité sur le fondement de l'article 458 du même code ;
Mais attendu que s'étant saisie aux fins de rectification d'une erreur matérielle, la cour d'appel a statué après avoir entendu les parties en leurs observations ; que, n'étant pas allégué que des conclusions avaient été déposées lors de l'instance en rectification, la cour d'appel n'a pas méconnu les exigences de l'article 462 du code de procédure civile ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen du même pourvoi, qui attaque l'arrêt du 4 décembre 2012, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° B 13-16.337, pris en sa première branche :
Attendu que la société Ludeno fait grief à l'arrêt n° 273 du 28 janvier 2013 de la condamner à payer à la société LCX différentes sommes en réparation de ses préjudices et d'ordonner le retrait des produits contrefaisants sous astreinte alors, selon le moyen, que la cassation à intervenir de l'arrêt du 4 décembre 2012, qui a déclaré les conclusions de la société Ludeno irrecevables, entraînera, par application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation de l'arrêt attaqué qui, statuant sur le fond du litige, en est la suite ;
Mais attendu que le rejet du pourvoi n° A 13-16.336 rend ce moyen, pris en sa première branche, sans objet ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche, qui est recevable :
Attendu que la société Ludeno fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que seul peut être protégé le dessin ou modèle nouveau, présentant un caractère propre, exprimant la personnalité de l'auteur, et résultant d'un effort de création ; qu'en retenant l'existence d'une contrefaçon, sans rechercher si les modèles de la société LCX exprimaient la personnalité de l'auteur et résultaient d'un effort de création, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1, L. 511-1 et L. 511-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu qu'ayant rappelé que la société LCX était titulaire des droits sur deux modèles dénommés l'un « perle irisée » constitué d'un seul triangle rectangle et l'autre,« perle irisée double » représentant deux triangles accolés, puis relevé que le modèle de la société Ludeno était également composé de triangles rectangles accolés ou non, rempli de diodes électroluminescentes et comprenant sur le côté le plus long une frise composée de parties circulaires donnant une impression d'ondulation telle une vague, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer des recherches qui ne lui étaient pas demandées, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que la société Ludeno fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que l'observateur averti se définit non pas comme le consommateur moyen mais comme étant un observateur doté d'une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré ; qu'en se bornant à retenir qu'« il est certain » que les modèles en cause produisent sur l'observateur averti une identité d'impression visuelle, sans autrement s'expliquer sur les éléments de nature à capter la vigilance particulière de l'observateur, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L. 551-1, L. 511-2, et L. 511-4 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que n'étant pas saisie de contestation sur la notion d'observateur averti, la cour d'appel, qui a retenu que les modèles qu'elle venait de décrire produisaient sur l'observateur averti, au sens de l'article L. 513-5 du code de la propriété intellectuelle, une identité d'impression visuelle que le haut degré de liberté du créateur en la matière ne permettait pas d'expliquer et de justifier, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.