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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 9 avril 2014, n° 13/01429

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Pink Berry (SARL)

Défendeur :

Asiaco (SARL), CO2 Group (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rajbaut

Conseillers :

Mme Chokron, Mme Gaber

Avocats :

Me Couturier, Me Amiel, Me Hoffman Attias

TGI Paris, du 11 janv. 2013

11 janvier 2013

Vu le jugement contradictoire du 11 janvier 2013 rendu par le tribunal de grande instance de Paris,

Vu l'appel interjeté le 24 janvier 2013 par la société PINK BERRY,

Vu les uniques conclusions déposées le 4 février 2013, signifiées les 21 et 22 février 2013, de la société appelante,

Vu les uniques conclusions du 22 mars 2013 des sociétés ASIACO et CO2 GROUP (cette dernière ci-après dite CO2), intimées et incidemment appelantes,

Vu l'ordonnance de clôture du 26 novembre 2013,

SUR CE, LA COUR,

Considérant que la société ASIACO, qui commercialise ses produits notamment par l'intermédiaire de la société CO2, se prévaut de droits d'auteur en particulier sur sept modèles de vêtements (référencés SK 140, DR 9100, SK3045, TS1249, TL 273, TL 242 et TS1273) et un motif de tissu (RSH 092) figurés en page 3 de ses conclusions ;

Qu'ayant découvert l'offre en vente par la société PINK BERRY de 8 modèles de vêtements (référencés 0517, 0528, 6025, 6021 6008-1, 6008, 2129 et 2120 reproduits en pages 4 et 5 de ses conclusions) constituant, selon elle, la reproduction servile des caractéristiques de ses robes ou tuniques et, pour le dernier, de son motif de tissu elle a, dûment autorisée par ordonnances présidentielles du 28 juin 2011, fait procéder à deux saisies-contrefaçon le 29 juin 2011, respectivement au siège social et dans une boutique de la société incriminée, et un procès verbal de non réception de documents (factures du fournisseur et nom et adresse de ce dernier) a été établi le 8 juillet 2011ensuite de ces opérations de saisies ;

Que, dans ces circonstances, les sociétés ASIACO et CO2 ont fait assigner la société PINK BERRY, le 26 juillet 2011, devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur, concurrence déloyale et parasitisme ;

Considérant que, selon jugement dont appel, le premiers juges ont, entre autres dispositions :

-dit que la société ASIACO est titulaire des droits sur les robes et tuniques référencées SK140, DR9100, SK3045, TS1249, TL273, TL242, TS1273 ainsi que sur le motif de tissu référencé RSH 092, mais que ces robes, tuniques et motif ne peuvent bénéficier de la protection au titre du livre l du Code de la propriété intellectuelle, et débouté la société ASIACO de ses demandes au titre de la contrefaçon,

-dit qu'en commercialisant à moindre prix les modèles de robes et tuniques référencées 0517, 6025, 6021, 6008, 2129, 2120, 0528 et 6008-1constituant des copies serviles des modèles référencés SK140, DR9100, SK3045, TS1249, TL273, TL242, TS1273 ainsi que du motif de tissu référencé RSH 092 et en les déclinant en plusieurs coloris pour créer un effet de gamme, la société PINK BERRY a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société C02, et condamné la société PINK BERRY à payer à cette dernière 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

-prononcé une mesure d'interdiction et autorisé la publication du dispositif du jugement,

-débouté la société ASIACO de sa demande au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme,

-débouté la société PINK BERRY de sa demande reconventionnelle pour procédure abusive ;

Considérant qu'en cause d'appel chacune des parties reprend l'ensemble de ses prétentions et moyens de première instance ;

Sur la contrefaçon

Considérant que pour combattre le grief de contrefaçon la société PINK BERRY maintient que les modèles revendiqués auraient été créées en Chine entre 2003 et 2005, avant la date de création invoquée par les sociétés ASIACO et CO2, et qu'ils seraient dénués de l'originalité requise pour prétendre accéder à une protection au titre du droit d'auteur ;

Que le principe de la protection d'une oeuvre, sans formalité, du seul fait de la création d'une forme originale n'est pas discuté et il incombe à celui qui entend se prévaloir des droits de l'auteur, de rapporter la preuve d'une création déterminée à une date certaine et de caractériser l'originalité de cette création, l'action en contrefaçon étant subordonnée à la condition que la création, objet de cette action, soit une oeuvre de l'esprit protégeable au sens de la loi, c'est à dire originale ;

Sur la titularité des droits

Considérant que les sociétés intimées prétendent que l'appelant n'apporte toujours pas de preuves permettant d'écarter la présomption de titularité dont bénéficie la société ASIACO sur les modèles invoqués, tandis que la société PINK BERRY qui n'a pas cru devoir justifier de sa source d'approvisionnement pour sa collection printemps été 2011, soutient que les intimées seraient en réalité les contrefacteurs de produits chinois fabriqués et commercialisés bien antérieurement ;

Considérant que les premiers juges ont notamment retenu qu'au delà de la question de la datation des catalogues chinois de lignes de vêtements 'Xiubudian' 2004 et 2005 produits par la société PINK BERRY, et plus généralement de la fiabilité des pièces tendant à établir une antériorité des droits de cette société, celle-ci n'indiquait <<pas précisément la correspondance entre les 40 modèles figurant>> sur ces catalogues et les 7 modèles revendiqués ;

Considérant, certes, que devant la cour la société PINK BERRY cible (p 7 à 25 de ses conclusions) les modèles B 640, 1087, 1066, 1092, 1120, 1082, B 745 et 1092, qui seraient représentés dans ces catalogues et qui correspondraient, selon elle, aux modèles revendiqués, étant observé que certains de ces modèles apparaissent différents des modèles revendiqués, tels les modèles B 640, 1066, 1120 et 1082 au regard respectivement des modèles TS1249, DR9100, TS1273, et RSHO92 ;

Considérant toutefois que les pages reproduisant les photographies présentant les modèles de vêtements ne s'avèrent pas datées, ni paraphées, et les dates invoquées des catalogues, non produits en original devant la cour, ne sont confortées par aucune facture ni preuve de commercialisation des vêtements présentés ;

Que si un styliste a attesté le 5 août 2011 (pièce 3 de l'appelante) qu'il aurait conçu les numéros 'de style' de la Ligne de vêtements 2004 en août et septembre 2003 (ce qui serait le cas des 'N° de style' 1066, 1087,1082, 1092 et 1120), et de la 'Ligne de vêtements 2005" en septembre 2004 ( ce qui serait le cas des 'N° de style' B640 et B 745) il n'a pas annexé de représentation des 'styles et motifs d'impression' en cause, seules apparaissant signées des reproductions de dessins de motifs non datés, numérotées de façon manuscrite, dont une (au numéro non visible sur la copie produite en pièce 5) pourrait correspondre au motif revendiqué ;

Considérant que ces seuls documents s'avèrent insuffisants pour permettre de relier avec certitude, d'une part, ce dessin à une date certaine de création, d'autre part, les vêtements opposés à une conception par le styliste précité, lequel n'a nullement paraphé leurs photographies alors qu'aucun dessin ni de fiches techniques de ces vêtements n'est produit ;

Qu'il sera ajouté que les deux attestations, également datées du 5 août 2011, d'une personne indiquant, sans plus de précision, que 'les motifs des styles de vêtements' des catalogues invoqués auraient été imprimés en 2003 et 2004 par une usine numérique et d'une autre personne précisant fournir les vêtements de ces catalogues, ne sont confortées par aucun document alors, qu'ainsi que relevé par les premiers juges, il ressort notamment d'un avis d'avocats de la république populaire de Chine que les sociétés en cause n'apparaissent pas avoir été enregistrées et que celle dont dépendrait le styliste ne serait qu'une boutique de vente au détail de vêtements de mode ;

Considérant qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'il n'es t pas à suffisance démontré que les vêtements ou le motif revendiqués aient effectivement pré existé en Chine, ni que la société ASIACO ne pourrait pas être à l'origine de leur création ; que la divulgation par cette dernière ou par la société CO2 (qui distribue ses produits) ne saurait ainsi être entachée d'équivoque ;

Qu'au contraire, la société ASIACO, ainsi qu'exactement retenu en première instance, justifie pour chaque modèle revendiqué d'une attestation de création pour son compte, établie le 21 juin 2011 par sa directrice artistique (employée depuis le 1er mai 2006 selon bulletin de paye de janvier 2011 produit), laquelle y a joint un croquis daté du modèle concerné, reproduit sur les fiches techniques des produits en cause ; que cette personne physique indique expressément avoir créé les modèles SK 140, DR 9100, SK3045, TS1249, TL 273, TL 242, TS1273 et RSH 092 respectivement les 8.11.2008, 22.02.2010, 18.09.2009, 16.12.2009, 20.04.2009, 16.05.2009, et 6.03.2010 pour les deux dernières références, et avoir cédé ses droits à la société ASIACO ; que le seul fait qu'elle soit associée, directement ou non, des sociétés intimées ne saurait suffire à altérer la portée ou la force probante de ses attestations ;

Considérant, par ailleurs, le tribunal a pertinemment relevé que sont versées aux débats des factures de commercialisation tant au nom de la société ASIACO que de la société CO2 ; qu'il est ainsi établi en particulier que la société ASIACO commercialisait dès le17.04.2009 la robe SK140, 31.08.2009 le T-Shirt TL 273 (incluant le motif RSH 092) et la tunique TL242, 21.12.2009 la tunique SK3045, et le 5.03.2010 le T-Shirt TS 1249 ensuite distribués par la société CO2 laquelle commercialisait également la tunique 9100 de la société ASIACO dès le 10.01.2011 ;

Qu'en l'absence de revendication suffisamment sérieuse pour contredire les attestations précitées de la directrice artistique de la société ASIACO, ces actes d'exploitation s'avèrent dénués de réelle ambiguïté, et font présumer à l'égard de la société PINK BERRY, tiers recherchée pour contrefaçon, que la société ASIACO est titulaire sur les modèle invoqués, des droits patrimoniaux de l'auteur ; que la décision entreprise sera donc confirmée sur ce point ;

Sur l'originalité

Considérant que pour conclure à l'originalité de ses modèles, la société ASIACO maintient (p 15 à 21 de ses écriture) qu'elle procède de la combinaison des éléments caractéristiques tels que rappelés par le tribunal en pages 7 à 9 de son jugement, auxquelles la cour se réfère expressément, sauf à ajouter in fine de la combinaison revendiquée pour la robe tunique référencée SK 140 la mention :<<-une doublure dan s un tissus similaire au tulle et débutant au dessous de la poitrine>> ;

Considérant que pour contester l'originalité prétendue de ces modèles, tant dans leur coupe que dans leurs motifs, la société PINK BERRY fait simplement valoir, indépendamment de leur préexistence susvisée dont il a été retenu qu'elle n'était pas démontrée avec suffisamment de certitude, qu'ils représenteraient des motifs génériques composés de fleurs (tels les pivoine, lotus ou chrysanthème) ou papillons, ou de ces deux éléments sous une forme vectorielle, connus dans la mode chinoise de longue date, et constitueraient la reprise d'éléments très utilisés, relevant également de la mode française, produisant au soutien de cette argumentation diverses impressions d'écrans internet ;

Considérant que les premiers juges ont exactement relevé que s'il résultait de <<divers extraits Internet, que depuis le début du 20ème siècle, il existe en Chine des vêtements [...] comportant pour la plupart des motifs floraux de toute sorte, d'autres étant décorés de papillons et que ces styles inspirent la mode vestimentaire chinoise actuelle>> aucun de ces vêtements ou motifs ne reproduit dans la même combinaison l'ensemble des caractéristiques revendiquées par la société ASIACO ;

Que cependant le tribunal a retenu que la société ASIACO ne ferait nullement la démonstration que la combinaison de ces caractéristiques porterait <<la marque de l'apport intellectuel de l'auteur et révélerait son effort créatif>> et que l'originalité de la reprise d'éléments connus <<tels qu'une coupe courte, ample, fluide, sans manche, un tissu plissé ou chiffonné, des bretelles asymétriques, des motifs floraux [..], des fronces au niveau de la poitrine, une doublure apparente, des superpositions de tissus>> n'était pas établie ;

Mais considérant qu'il ressort de l'examen auquel la Cour s'est livrée que si certains des éléments qui composent les modèles de vêtements et le motif de tissu en cause sont effectivement connus et que, pris séparément, ils appartiennent au fonds commun de l'univers du vêtement, comme ceux énumérés par les premiers juges, ou de motifs à base florale ou de papillons, l'appréciation de la Cour doit s'effectuer de manière globale, en fonction de l'aspect d'ensemble produit par l'agencement des différents éléments et non par l'examen de chacun d'eux pris individuellement ;

Que leur combinaison telle que revendiquée pour chaque modèle, montre, en particulier, pour la robe longue SK140 un motif plutôt champêtre avec un décolleté en V tranchant avec son aspect fluide et ample, pour la robe taille empire DR9100 un effet d'asymétrie avec l'ajout de pans de tissus et un effet de collier par l'apposition des motifs, pour la tunique SK3045 un effet de 'frou frou' du dos nageur et un effet graphique discontinu sur le devant de la robe par la non apposition du motif floral dans les plis, pour la tunique TS 1249 un empiècement à l'encolure, l'apposition en bas sur tout le pourtour d'un motif essentiellement floral et un jupon dont la dentelle dépasse, pour les tuniques TL 273 et TL 242 un col mixte avec effet plastron et sur le devant en bas une frise décalée sur un côté de divers éléments qui paraît se détacher pour remonter vers la taille, pour la tunique TS1273, qui comprend le motif RSH092, une envolée de gauche à droite de papillons de tailles diverses avec un fond d'arabesques, finissant en pointe sur un côté, et dont l'apposition sur la robe souligne la forme fluide mais évasée en bas de ce vêtement ;

Qu'en fait ces choix arbitraires de forme combinés confèrent à chacun de ces modèles une physionomie propre, qui le distingue des autres modèles du même genre, et qui traduit un parti-pris esthétique empreint de la personnalité de son auteur ; que, par voie de conséquence, ces modèles sont dignes d'accéder à la protection instituée au titre du droit d'auteur et le jugement dont appel sera infirmé de ce chef ;

Sur la reproduction

Considérant que la société PINK BERRY ne conteste pas sérieusement que les vêtements incriminés présentent le même type de coupe ou de motifs que ceux commercialisés par les intimées ;

Considérant qu'il s'infère de la comparaison à laquelle la Cour a procédé des modèles en cause, que les modèles de vêtements commercialisés par la société PINK BERRY donnent effectivement à voir, à l'instar de chacune des créations originales opposée, ainsi que dûment caractérisé en première instance au titre de la concurrence déloyale par des motifs pertinents que la cour approuve (pages 10 et 11 de la décision entreprise, nonobstant une répétition quant à la comparaison des modèles 6025 et SK3045), une reprise, dans la même combinaison, des modèles invoqués, produisant aux côtés de ces modèles, dont la cour a reconnu l'originalité à raison de leurs éléments caractéristiques, lesquels s'avèrent r reproduits, une telle impression de ressemblance qu'il doit être admis que les robes 0517, 6025, 0528, 6021, le top 6008-1, la tunique 6008 et les motifs apposés sur les robes 2129 et 2120, constituent une reproduction servile, ou quasi servile, respectivement des modèles référencés SK 140, SK3045, DR 9100, TS1249, TL 273, TL 242, et TS1273 sur lequel figure le motif RSH 092 ;

Considérant qu' il résulte de ces observations que la contrefaçon, définie à l'article L 122-4 du Code de la propriété intellectuelle, par la représentation, la reproduction ou l'exploitation de l'oeuvre faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit est caractérisée à la charge de la société PINK BERRY, le jugement étant infirmé sur ce point ;

Sur la concurrence déloyale ou parasitaire

Considérant que les intimées maintiennent que la société appelante n'aurait pas seulement porté atteinte aux droits de la société ASIACO et commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de son distributeur la société CO2, mais également des actes de parasitisme à leur encontre en cherchant à profiter de leurs investissements ;

Considérant que les actes de contrefaçon commis à l'encontre la société ASIACO constituent incontestablement des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société CO2 qui commercialise les modèles revendiqués, leur reproduction servile ou quasi servile ne pouvant que générer un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle ; que la décision de première instance sera approuvée de ce chef ;

Considérant, par ailleurs, qu'indépendamment de trois modèles pour lesquels les saisies contrefaçon n'ont pas été autorisées et dont la commercialisation ne peut être attribuée de manière suffisamment certaine à la société PINK BERRY, cette dernière ne saurait sérieusement contester qu'en offrant à la vente les 8 modèles contrefaisants saisis, elle a commis une faute préjudiciable à l'encontre des intimées, indépendante des faits de contrefaçon, en créant ainsi que justement relevé par les premiers juges un effet de gamme à raison de la reprise de 7 modèles de vêtements et d'un motif de tissu présentant un style propre, et ce, dans différents coloris ainsi qu'il résulte du procès verbal de saisie en boutique notamment pour les modèles contrefaisants 2129, 6021, et 6025 ;

Considérant que la société PINK BERRY a ainsi tiré profit sans bourse délier, à tout le moins du travail d'une styliste de la société ASIACO, pour présenter des modèles la rattachant à cette dernière, ainsi qu'à son distributeur la société CO2 connue dans le domaine du prêt à porter ; qu'à cet égard il sera relevé que si les intimées ont leur siège social dans une zone périphérique où sont implantés de nombreux grossistes, alors que la société appelante est implantée à Paris, elles disposent de marques et d'une certaine publicité, qu'en particulier la société CO2 est titulaire depuis 2006 de la marque CO2 Paris et qu'en 2011, antérieurement aux opérations de saisies, divers magazines grand public présentaient, parmi d'autres, des articles de mode griffés CO2 comme le montrent les extraits de presse produits (pièce 4 des intimées) ;

Considérant que de tels agissements sont en fait constitutifs de parasitisme, tant à l'égard de la société CO2 que de la société ASIACO, et le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de cette dernière sur ce point ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant que les intimées soutiennent qu'elles réalisent chacune une marge de 4 euros par modèle de vêtement ;

Qu'il n'est pas contesté que les opérations de saisie-contrefaçon ont permis de constater au sein de la boutique de l'appelante la présence de 1.350 pièces contrefaisantes concernant 6 modèles (0517, 6025, 6021, 6008, 2129 et 2120), ni que les opérations réalisées au siège social permettent de retenir que 2.965 exemplaires ont été vendus, les prix de vente des 8 modèles contrefaisants s'établissant entre 8 et 13 euros HT selon facture du 30 mai 2011 ;

Considérant que cette offre en vente d'articles de contrefaçon, même à des prix globalement comparables à ceux des articles originaux, est de nature à banaliser ces derniers, à raison du caractère servile ou quasi servile des copies réalisées ;

Que compte tenu de ces éléments, la cour estime disposer d'éléments suffisants d'appréciation pour fixer les dommages et intérêts dus en réparation de l'atteinte aux droits patrimoniaux d'auteur subie par la société ASIACO à la somme de 15.000 euros ;

Que les faits de parasitisme tels que retenus seront justement réparés par l'allocation à cette société d'une somme de 5.000 euros ;

Considérant que les premiers juges ont procédé à une juste appréciation (p 12 du jugement) du préjudice subi par la société CO2, du fait de la concurrence déloyale et parasitaire commise à son encontre, en lui allouant la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Considérant qu'à titre de complément d'indemnisation la mesure de publication ordonnée en première instance sera confirmée, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une publication supplémentaire, sauf à ajouter, si cette publication n'a pas déjà été réalisée par la société CO2 malgré son caractère exécutoire, mention du présent arrêt et à étendre à la société ASIACO l'autorisation de publication donnée ;

Considérant que la mesure d'interdiction sous astreinte ordonnée par les premiers juges est également justifiée dans son principe et pertinente dans ses modalités au regard de la nécessité de faire cesser les actes illicites et de prévenir leur renouvellement ; qu'elle sera purement et simplement confirmée, sans qu'il y ait lieu d'y ajouter, ni de se réserver la liquidation de l'astreinte ;

Considérant enfin que c'est par des motifs pertinents que la cour approuve que la demande de destruction, réitérée en cause d'appel, a été rejetée par les premiers juges ;

Sur l'abus de procédure

Considérant que la société appelante réitère ses prétentions pour procédure abusive ;

Mais considérant que la société PINK BERRY qui succombe, ne démontre, pas plus en cause d'appel qu'en première instance, que les sociétés ASIACO et CO2 ont introduit leur action avec mauvaise foi, dans l'intention de lui nuire ou d'induire en erreur la juridiction saisie ;

Que la décision de rejet de sa demande en dommages et intérêts sera donc confirmée ;

PAR CES MOTIFS,

Infime la décision entreprise, sauf en ce qu'elle a dit que la société ASIACO est titulaire de droits, retenu que la société PINK BERRY a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société CO2 GROUP, prononcé des mesures d'interdiction sous astreinte et de publication, condamné la société PINK BERRY à payer à la société CO2 GROUP la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, rejeté le demande de mesure de destruction, débouté la société PINK BERRY de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive, et condamné la société PINK BERRY à payer à la société CO2 GROUP 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, en ce compris les frais des saisies contrefaçon ;

Statuant à nouveau dans cette limite, et y ajoutant,

Dit que la société PINK BERRY a commis des actes de contrefaçon de droits d'auteurs sur les modèles de vêtements SK 140, DR 9100, SK3045, TS1249, TL 273, TL 242 et TS1273 et de motif de tissu RSH 092 de la société ASIACO, ainsi que des actes de parasitisme à l'encontre de cette dernière ;

Condamne la société PINK BERRY à payer à la société ASIACO à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi, du fait des actes de contrefaçon,15.000 euros, et, du fait des actes de parasitisme, 5.000 euros ;

Dit que la publication judiciaire, dans deux journaux ou revues, prononcée en première instance, est autorisée au choix des sociétés ASIACO et CO2 GROUP, et qu'elle fera mention du présent arrêt si elle n'a déjà été réalisée ;

Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ;

Condamne la société PINK BERRY aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société ASIACO la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, et dit n'y avoir lieu à nouvelle application de cet article au profit de la société CO2 GROUP pour ses frais irrépétibles d'appel.