Cass. 3e civ., 9 février 2017, n° 15-28.691
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Rapporteur :
Mme Provost-Lopin
Avocat général :
Mme Guilguet-Pauthe
Avocats :
SCP Bénabent et Jéhannin, SCP de Nervo et Poupet
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 octobre 2015), rendu sur renvoi après cassation (Civ. 3e, 3 décembre 2014, pourvoi n° 13-25.034), que, par acte du 21 octobre 1996, l'établissement d'aménagement de la ville nouvelle de Cergy, aux droits duquel vient la SCI Avicenne (la SCI), a donné à bail à la société Groupe Flo (la société Flo) un local commercial ; que la SCI a délivré le 7 mai 2010 à la société Flo un commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire ; que la société Flo l'a assignée aux fins de voir réputée non écrite la clause d'indexation du bail, demandant en outre la nullité du commandement et la restitution des sommes versées au titre de l'indexation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer non écrite la clause d'indexation, alors, selon le moyen :
1°) que, dans la note en délibéré qui a été déposée à la demande de la cour, la société Avicenne a fait valoir que le renouvellement du bail n'était pas définitif si bien que la société Flo n'avait aucun intérêt né et actuel pour se prévaloir de l'irrégularité de la clause d'indexation ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce moyen alors qu'elle avait demandé aux parties de s'expliquer sur la faculté qu'elle avait d'apprécier la clause litigieuse au regard du renouvellement du bail alors que le loyer n'avait pas été fixé définitivement et que, d'autre part, les parties conservaient un droit d'option en application de l'article L. 145-57 du code de commerce, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) que ce n'est que lorsque l'application d'un indice fixe conduit lors des indexations successives à une distorsion entre l'intervalle de variation indiciaire et la durée s'écoulant entre deux révisions qu'une clause d'indexation prenant pour référence un indice fixe doit être annulée ; que rien n'interdit aux parties de fixer le loyer à la date de la signature du bail et de prévoir une clause de révision mentionnant l'indice de référence connu à la date de la signature du bail dès lors qu'il n'y a pas de distorsion entre la date de signature et la date d'indexation d'une part et la période indiciaire d'autre part ; qu'il est constant que le bail a été signé le 21 octobre 1996 et que l'indice de référence était celui connu à cette date soit celui de juillet 1996 ; que la cour d'appel qui a retenu que la première révision du loyer était intervenue le 1er janvier 1998 sur la base de l'indice du 2ème trimestre 1997 soit celui de juillet 1997 et que cet indice avait été rapporté à celui connu au 12 juillet 1996, 1038 si bien que le loyer avait été réévalué sur la base de l'évolution depuis au minimum 12 mois alors qu'il n'était dû que depuis 7 mois ; qu'en se prononçant de la sorte alors qu'il est constant que les parties avaient fixé le montant du loyer à la date de signature du bail si bien que la réévaluation sur la base de 12 mois pour une durée de bail de 15 mois était licite, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil et l'article L. 112-1 du code monétaire et financier ;
3°) que les juges du fond ne peuvent se prononcer par pure affirmation sans viser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; que la cour d'appel qui a retenu que, lors de la première révision, la société Avicenne avait pris en compte l'indice du 2ème trimestre 1997 1060 et l'avait rapportée à celui connu le 12 juillet 1996 1038, alors même qu'à cette date il est constant que la société Avicenne n'était pas propriétaire des locaux et qu'aucun document ne vient justifier qu'une telle indexation a effectivement eu lieu à cette période selon cet indice, la cour d'appel, qui s'est prononcée par voie d'affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) qu'en cas de renouvellement du bail commercial et de fixation par le juge d'un nouveau loyer, l'indice de référence du nouveau bail ne peut plus être celui du bail initial, qui n'a plus aucun rapport avec le nouveau loyer ; que dans les conclusions d'appel de la société Avicenne, il a été indiqué que, lorsque du fait d'une disposition légale, la date du nouveau bail et le loyer se trouvent modifiés, l'indice de base de la première révision du nouveau bail doit être celui de l'année -1, si bien qu'en l'espèce s'agissant d'un bail renouvelé, il n'y avait aucune distorsion entre la période indiciaire et la durée entre deux révisions ; que la cour d'appel, qui a retenu qu'il existait une distorsion compte tenu de la date de prise d'effet du bail initial entre la période d'indexation et la durée du bail dès la première indexation, mais qui ne s'est pas expliquée sur l'incidence du renouvellement du bail, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la clause d'indexation disposait que l'indice à prendre en considération serait le dernier indice publié au 1er janvier de chaque année, l'indice de référence étant le dernier connu au 1er juillet 1996, et relevé que la SCI avait, lors de la première révision le 1er janvier 1998, pris en compte l'indice publié à cette date, soit celui du 2ème trimestre 1997, et l'avait rapporté à celui connu au 12 juillet 1996, soit celui du 1er trimestre 1996, la cour d'appel, qui a constaté une distorsion temporelle entre l'indice de base fixe et l'indice multiplicateur, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Flo une certaine somme au titre des loyers trop payés des 3ème et 4ème trimestres 2011 et du 1er trimestre 2012, outre les intérêts légaux à compter du 11 mars 2013, alors, selon le moyen, que les juges ne peuvent se borner à affirmer qu'une demande est justifiée au regard des seules allégations d'une partie ; que dans ses conclusions d'appel, la SCI a fait valoir que l'indexation de l'année 2006 n'était pas de 6 086,21 euros mais de 740,01 euros, elle a visé les pièces 11 et 12 de la société Flo ; que la cour d'appel, qui s'est bornée à énoncer que la société Flo justifiait avoir indûment payé au titre de l'indexation une somme de 6 086,21 euros en 2006, sans préciser sur quels documents elle fondait cette affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant apprécié la valeur et la portée des éléments de preuve produits, la cour d'appel, qui a relevé, par motifs propres et adoptés, que la SCI ne contestait pas les calculs portant sur la détermination du différentiel de loyer pour l'année 2006, se bornant à invoquer la prescription de la demande, a souverainement retenu que la société Flo justifiait avoir indûment payé au titre de l'indexation une somme de 6 086,21 euros hors taxes en 2006 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.