CA Paris, 3e ch. A, 24 octobre 1989, n° 89/8277
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gecimco (SARL)
Défendeur :
Gourdain (ès qual.), Syndicat des copropriétaires du 72 rue Sedaine à Paris 11e
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Borra
Conseillers :
Mme Aubert, Mme Nerondat
Avocats :
Me Stul, Me Campana, Me Ripou-Fortesa
La Cour statue sur l'appel interjeté par la S.A.R.L DE GESTION IMMOBILIERE COPROPRIETE (GECIMCO) du jugement rendu le 30 janvier 1989 par la Tribunal de Commerce de PARIS (11e Chambre) qui a ouvert une procédure simplifiée de redressement judiciaire à son égard, fixé provisoirement au 28 mars 1988 la date de cessation de ses paiements puis a prononcé la liquidation judiciaire de son patrimoine et nommé Me GOURDAIN liquidateur.
FAITS ET PROCEDURE :
La S.A.R.L. "GROUPE MEYER ETTEDGUI" constituée au capital de 20.000 F, exerçait une activité d’administration des biens et de réalisation de transactions immobilières. Son siège étant fixé 15 avenue Carnot à Paris (75017), elle a été immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Paris. En juillet 1985, elle a changé sa dénomination sociale pour devenir la société GECIMCO et a transféré son siège 40 rue Chabrol à Paris (75010).
A la suite d'une décision de l’assemblée des associés du 11 juillet 1988, la société GECIMCO a transféré son siège 3 rue des Chênes Pourpres à PONTOISE (95034) et s'est fait immatriculer au registre du commerce et des sociétés de cette ville le 17 novembre 1988.
Le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble 72 rue Sedaine à Paris est créancier de la société GECIMCO son ancien syndic. Sa créance a été fixée à 79.379 F par un jugement rendu le 25 novembre 1987, par le Tribunal de Grande Instance de PARIS. Le syndicat assignait le 9 mai 1986 la société GECIMCO en vue de l'ouverture à son égard de la procédure de redressement judiciaire.
C'est dans ces circonstances qu'a été rendu le jugement frappé d'appel.
La société GECIMCO, appelante, soulève l’incompétence du Tribunal de Commerce de PARIS et demande qu'en raison du transfert de son siège social, le Tribunal de Commerce de PONTOISE soit déclaré compétent pour connaitre de la procédure de redressement judiciaire engagée à son encontre. A titre subsidiaire, elle soutient que le Tribunal ne pouvait prononcer dans un même jugement le redressement et la liquidation judiciaire.
Me GOURDAIN, intimé en sa qualité de liquidateur de la société GECIMCO conclut au rejet des moyens soulevés par l'appelante. II fait remarquer qu'elle n’a versé aucune pièce aux débats ni justifié de sa capacité à présenter un plan de redressement. II demande que le jugement soit confirmé.
Le syndicat des copropriétaires créancier poursuivant, intimé, conclut à la confirmation du jugement.
CELA ETANT EXPOSE.
LA COUR :
Sur l’exception d’incompétence
Considérant qu’en application de l'article 1er du décret du 27 décembre 1985, le tribunal territorialement compétent pour connaitre de la procédure de redressement judiciaire est celui dans le ressort duquel le débiteur a le siège de son entreprise ou, à défaut de siège en territoire français son principal établissement;
que le siège en fonction duquel est déterminé le tribunal compétent est celui qui existe au jour de l'assignation introductive d'instance;
qu'à la date de l’assignation en redressement judiciaire délivrée par le Syndicat des copropriétaires le 9 mai 1988, il ressort d'un extrait d’immatriculation produit par la société GECIMCO que cette société était immatriculée au registre du commerce et de sociétés de PARIS et que son siège social était fixé 40 rue Chabrol;
que le transfert du siège social à PONTOISE 3 rue des Chênes pourpres auquel se réfère la société GECIMCO pour soulever l’incompétence du Tribunal de Commerce de PARIS a eu lieu après la délivrance de l'assignation puisqu'il a été décidé par une assemblée des associés du 5 octobre 1988;
qu'en raison de ce transfert, la société a demandé à être immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PONTOISE ce dont elle justifie par un extrait d’immatriculation du 17 novembre 1988;
que cette nouvelle immatriculation étant postérieure à la saisine du tribunal, l'exception d'incompétence doit être rejetée;
Sur la validité de la procédure de première instance
Considérant qu'aux termes de l’article 8, premier alinéa de la loi du 25 janvier 1985, le jugement de redressement judiciaire ouvre une période d’observation en vue de l’établissement d'un bilan économique et social et de propositions tendant à la continuation ou à la cession de l'entreprise; que dès lors qu'aucune des solutions n'apparait possible, le tribunal prononce la liquidation judiciaire;
Considérant que, dans le régime simplifié, l'article 140 de cette loi prévoit que la période d’observation s'ouvre par une période d’enquête durant laquelle le juge-commissaire désigné par le tribunal recueille les éléments lui permettant de dresser un rapport, qui peut être oral, sur la situation économique et sociale de l'entreprise et sur ses perspectives de redressement; qu'en vertu de l'article 142 de la loi, le tribunal au vu du rapport d'enquête décide, soit la poursuite de l'activité en vue de l’élaboration d'un projet de plan de redressement de l'entreprise, soit la liquidation judiciaire de celle-ci;
Considérant qu'en l'espèce, le tribunal a fait usage de la possibilité prévue par l'article 13 du décret du 27 décembre 1985 en commettant pour son information un juge chargé de "recueillir tous renseignements sur la situation financière, économique et sociale de l'entreprise ";
que c'est donc, en définitive, sans qu'aient été méconnus la lettre de la loi, qui n'a pas fixé de durée minimum à la période d'enquête, ou son esprit que, puisant dans le rapport du juge commis en vertu de l'article 13 du décret du 27 décembre 1985 les éléments que le juge-commissaire a pour mission de réunir en vertu de l'article 140, deuxième alinéa, de la loi du 25 janvier 1985, le Tribunal a pu, après avoir constaté que l'entreprise n'avait plus aucune activité et n'employait plus aucun salarié, ouvrir la procédure de redressement judiciaire et exercer aussitôt l'option prévue par l'article 142 de la loi susvisée, dans une seule et même décision;
Au fond :
Considérant que Me GOURDAIN fait état d'un passif déclaré qui s'élève à la somme de 1.000.000 F environ dont 800.000 F à titre privilégié et conclut à la confirmation du jugement;
que la société GECIMCO ne conteste pas ces éléments et ne justifie en aucune manière être en mesure de présenter un plan de redressement;
que le jugement doit être confirmé;
PAR CES MOTIFS ;
REJETTE l'exception d'incompétence;
REJETTE la demande d’annulation du jugement et confirme ce dernier;
CONDAMNE la société GECIMCO aux dépens d'appel qui seront compris dans les frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire;
ADMET les avoués de la cause dans la limite de leurs droits au bénéfice de l'article 690 du nouveau code de procédure civile.