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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 26 avril 2018, n° 17/01497

LYON

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Esparbès

Conseillers :

Mme Homs, M. Bardoux

TGI Bourg-en-Bresse, du 5 janv. 2017

5 janvier 2017

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. Thierry B. a exercé une activité d'élevage de chevaux et de pension de chevaux à Grilly (Ain) depuis le 23 février 1995, inscrit au titre de cette activité au répertoire SIREN sous le numéro 350 834 081, au registre de l'agriculture de l'Ain sous le même numéro et à la MSA Ain Rhône sous le numéro 1 60 07 74 010 009.

Il a souscrit par acte sous seing privé du 30 octobre 2012 une déclaration d'affectation de son activité professionnelle d'élevage de chevaux et de pension de chevaux à une EIRL dénommée « EIRL B. les écuries du bois clos » (EIRL B.) exerçant sous le numéro SIRET 350 834 081 0019, comprenant l'ensemble de ses éléments d'exploitation comprenant fonds agricole, matériel, installation, mobilier, poneys, chevaux, stock, créances et construction.

Par acte notarié du 25 avril 2013, M. B. a affecté un de ses biens immobiliers à son activité professionnelle, en l'espèce un bâtiment à usage agricole, et exclu de cette affectation le terrain servant d'assiette à ce bâtiment.

Par assignation du 16 décembre 2014, la MSA Ain Rhône a assigné M. B. en redressement judiciaire et le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a prononcé le redressement judiciaire de M. B. le 26 février 2015. Par jugement du 29 juin 2015, M. B. a été placé en liquidation judiciaire, la SELARL MJ Synergie ayant été désignée liquidateur judiciaire.

Par acte du 11 janvier 2016, ce liquidateur judiciaire a assigné M. B. aux fins d'obtenir l'inopposabilité de sa déclaration d'affectation immobilière du 25 avril 2013, la réunion de son patrimoine avec l'EIRL B. en application de l'article L 621-2 du code de commerce, et qu'il soit dit et jugé que M. B. est responsable du passif sur la totalité de ses biens conformément à l'article L 526''12 du même code.

Par jugement du 5 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a :

- déclaré inopposable à la SELARL MJ Synergie, en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. B., la déclaration d'affectation à son activité professionnelle du bâtiment agricole situé [...] cadastré AR N° 146,

- ordonné la réunion du patrimoine personnel de M. B. au patrimoine affecté à son activité professionnelle en une masse unique,

- dit M. B. responsable du passif de la procédure sur la totalité de ses biens et droits,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné M. B. à payer la SELARL MJ Synergie la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par déclaration reçue le 24 février 2017, M. B. a relevé appel de ce jugement, intimant la SELARL MJ Synergie ès qualités de liquidateur judiciaire de l'EIRL Thierry B.. Un autre appel formé par ce dernier le 22 février 2017 a été joint par le conseiller de la mise en état.

Par ordonnance du 7 juin 2017, le délégué du premier président a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formée par M. B..

L'EIRL B. les écuries du bois clos est intervenue volontairement par conclusions déposées le 16 août 2017.

Par acte reçu au greffe le 22 août 2017, M. B. a déposé un acte d'inscription de faux dit à titre accessoire :

- contre les jugements rendus les 26 février et 29 juin 2015 par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse en ce qu'il ont motivé « qu'il résulte des indications données à l'audience et des pièces produites que M. B. se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.» alors qu'il n'avait aucune activité professionnelle personnelle,

- contre le jugement entrepris qui a retenu que la SELARL MJ Synergie était « liquidateur judiciaire de l'EIRL Thierry B.» et a motivé que «Toutefois cette déclaration d'affectation d'une partie de bien immobilier de Grilly n'a pas fait l'objet du dépôt d'une déclaration complémentaire à la chambre d'agriculture telle que prévue par la disposition précitée.»

Et a demandé à la cour de juger que ces mentions constituent des faux en écriture authentique.

M. B. a dénoncé cette inscription de faux à titre accessoire au ministère public le même jour.

Dans le dernier état de leurs conclusions déposées le 25 janvier 2018 et notifiées au ministère public le 6 février 2018, fondées sur les articles 117, 313 et 457 du code de procédure civile, 1317 et 1319 anciens du code civil, L 526-9 du code de commerce et les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, M. B. et l'EIRL B. les écuries du bois clos demandent à la cour de :

- dire et juger recevable l'intervention volontaire de l'EIRL B. les écuries du bois clos et faire droit à toutes les demandes de M. B.,

- constater qu'aucune décision de justice n'a désigné la société MJ Synergie en qualité de liquidateur de l'EIRL Thierry B. immatriculée au RCS de Bourg-en-Bresse sous le N° 350 384 081,

- annuler l'assignation délivrée le 11 janvier 2016 par la société MJ Synergie pour le compte de l'EIRL Thierry B. immatriculée au RCS de Bourg-en-Bresse sous le N° 350 384 081,

- annuler le jugement entrepris,

- constater que l'acte authentique du 25 avril 2013 comporte une mention qui fait foi jusqu'à inscription de faux, mention constatant qu'il a été dénoncé à la chambre de l'agriculture,

- constater que la chambre de l'agriculture a reconnu que l'acte authentique du 25 avril 2013 avait été enregistré le 11 juin 2013 (pièce 13),

- constater que les formalités prévues par l'article L 526-9 du code de commerce ont parfaitement été respectées et qu'il n'y a donc pas lieu de déclarer inopposable le patrimoine affecté à l'EIRL Thierry B. par l'acte du 25 avril 2013,

- réformer le jugement contesté et rejeter toutes les demandes du contradicteur,

- constater que les jugements des 26 février 2015, 29 juin 2015 et 5 janvier 2017 comportent des mentions inexactes, constatées par des juges et donc par des officiers publics et sont insérées dans l'instrumentum d'une décision de justice, acte authentique par nature,

- constater, dire et juger que les mentions suivantes caractérisent un faux en écriture authentique :

« Attendu qu'il résulte des indications données à l'audience et des pièces produites que Monsieur Thierry B. se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif avec son actif disponible »,

« S.A. MJ SYNERGIE liquidateur judiciaire de l'EIRL Thierry B.»,

« Toutefois cette déclaration d'affectation d'une partie de bien immobilier de GRILLY n'a pas fait l'objet du dépôt d'une déclaration complémentaire à la chambre d'agriculture telle que prévue par la disposition précitée »,

- condamner la SELARL MJ Synergie à lui verser une somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement de tous les dépens.

Dans le dernier état de ses conclusions déposées le 8 janvier 2018, au visa des articles 307, 314, 517 et 518 du code civil et L 526-6 et suivants, L 621-2 et L 653''1 et suivants du code de commerce, la SELARL MJ Synergie, en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. B., demande à la cour de :

- débouter M. B. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que l'EIRL Thierry B. a gravement manqué à ses obligations en ne déposant aucune comptabilité,

- dire et juger anormale la composition du patrimoine affecté de l'EIRL Thierry B.,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

Déclaré inopposable au liquidateur la déclaration d'affectation à son activité professionnelle du bâtiment agricole situé [...] cadastré AR 146,

Ordonné la réunion du patrimoine personnel de M. B. à son patrimoine affecté à son activité professionnelle en une masse unique conformément aux dispositions de l'article L 621-2 alinéa 3 du code de commerce,

Dit M. B. responsable du passif de la procédure sur la totalité de ses biens et droits conformément aux dispositions de l'article L 526-12 alinéa 7 du code de commerce,

Y ajoutant,

- constater l'absence de toute coopération de M. B. avec les organes de la procédure,

En tout état de cause,

- condamner M. B. à payer à la SELARL MJ Synergie en sa qualité la somme de 10.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le même en tous dépens de première instance et d'appel, avec recouvrement direct.

L'affaire a été communiquée au ministère public le 14 novembre 2017.

La clôture a été prononcée le 13 février 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité de l'assignation

M. B. soutient sur le fondement de l'article 117 du code de procédure civile que l'assignation délivrée le 11 janvier 2016 par la société MJ Synergie, se prétendant liquidateur de l'EIRL Thierry B., est entachée d'une nullité de fond car il n'existe aucune décision de justice qui désigne cette société en qualité de liquidateur de cette EIRL. Il prétend que la société MJ Synergie a ainsi usé d'une fausse qualité et n'avait aucun droit ni titre pour agir en justice pour le compte de cette EIRL.

Il fait valoir qu'il a fait l'objet d'une procédure collective à titre personnel, alors que l'EIRL qu'il a constituée pour son exercice professionnel devait être assignée pour l'ouverture d'une telle procédure.

Il ajoute que l'absence de précision de la forme juridique de cette société MJ Synergie comme des personnes physiques qui la représentent en justice entache également de nullité cette assignation.

La SELARL MJ Synergie répond que cette absence de précision sur sa forme juridique et sur ses représentants légaux n'a pas vicié la compréhension de M. B. sur la personne du mandataire, cette irrégularité formelle nécessitant en application de l'article 114 du code de procédure civile qu'il justifie d'un grief.

Elle conteste avoir usé d'une fausse qualité en faisant délivrer l'assignation et souligne que M. B. a affirmé dans ses conclusions par ailleurs déposées pour obtenir le changement de liquidateur qu'elle avait été nommée liquidateur de l'EIRL Thierry B..

La SELARL MJ Synergie est bien fondée à soutenir que la création d'une EIRL ne fait pas naître une personne juridique nouvelle et distincte de la personne physique de l'entrepreneur et ne permet que la distinction du patrimoine affecté à l'activité de ce dernier et de protéger son patrimoine personnel.

L'article L 526-6 du code de commerce définit en effet dans son alinéa 2 l'EIRL comme un patrimoine affecté, l'acte notarié du 25 avril 2013 invoqué par M. B. lui ayant également rappelé en page 6 « La déclaration d'affectation ne crée pas une personnalité morale distincte de l'entrepreneur individuel. »

L'assignation a été délivrée le 11 janvier 2016 à la demande de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'EIRL Thierry B., inscrite au RCS de BOURG-EN-BRESSE sous le n° 350 384 081, exerçant sous le nom LES ECURIES DU BOIS CLOS, sise [...]».

Le numéro du Registre du Commerce et des Sociétés visé dans cette assignation correspond :

- à l'inscription de M. B. en qualité de commerçant, qui a fait l'objet d'une cessation d'activité à compter du 25 février 2005, l'extrait KBIS produit mentionnant « Radiation du RCS d'une entreprise équestre individuelle devenue agricole »,

- à l'identifiant SIRENE de l'entreprise exploitée par l'appelant, ainsi qu'il ressort de l'extrait INSEE du 8 octobre 2012,

- aux neuf premiers chiffres du numéro SIRET affecté à l'EIRL créée par M. B..

Contrairement à l'affirmation de M. B., l'EIRL qu'il a créée ne pouvait pas faire l'objet d'une procédure collective et la liquidation de son entreprise individuelle agricole nécessitait que l'affectation à son activité d'une partie de son patrimoine dans le cadre de cette EIRL soit prise en compte pour déterminer la portée des opérations liquidatives.

La SELARL MJ Synergie n'a pas fait usage d'une fausse qualité, et disposait de la qualité et des pouvoirs pour agir en qualité de liquidateur judiciaire de l'entreprise individuelle de M. B..

L'erreur commise dans la désignation de son administré, provenant d'ailleurs de cette limite imposée par le statut d'EIRL, n'affecte pas sa capacité à agir et ne constitue pas une cause de nullité au sens de l'article 117 du code de procédure civile, mais une irrégularité formelle sanctionnée par l'article 114 du même code.

Dans ses conclusions déposées pour obtenir le changement de liquidateur (pièce 20 de l'intimé), M. B. mentionne qu'il agit contre «La SA MJ Synergie (liquidateur de l'EIRL Thierry B.) SA inscrite au RCS de BOURG-EN-BRESSE sous le N° 538 422 056 00043, dont le siège social se trouve au [...], agissant dans la présente procédure par le biais de MM. Jean-Claude B. et François-Charles Desprat» comme dans sa requête en récusation perpétuelle déposée au greffe du tribunal de grande instance de BOURG-EN-BRESSE le 20 mars 2017.

M. B. était pleinement informé de l'intervention de ce liquidateur judiciaire pour liquider son entreprise individuelle.

Il n'invoque et ne justifie ainsi d'aucun grief au sens de l'article 114 précité tant sur cette erreur matérielle de désignation de la personne liquidée que sur l'absence de précisions sur la forme sociale de son adversaire ou de ses représentants légaux.

En l'absence de nullité de l'acte introductif d'instance, M. B. n'invoque aucun autre moyen pour solliciter la nullité du jugement entrepris.

Ses exceptions de nullité doivent en conséquence être rejetées.

S'il invoque en tête du dispositif de ses écritures les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, M. B. ne fournit aucune précision sur l'atteinte qui serait consécutive à une éventuelle violation qu'il ne tente pas de caractériser.

Sur l'intervention volontaire de l'EIRL B. les écuries du bois clos

L'absence de personnalité juridique de cette EIRL ne peut que conduire la cour à la déclarer irrecevable en son intervention volontaire, car elle ne dispose pas d'un droit à agir.

Sur les conclusions déposées par la SELARL MJ Synergie

Il a été retenu plus haut que ce liquidateur judiciaire avait qualité pour agir dans l'intérêt de la liquidation de l'entreprise individuelle de M. B. et que l'erreur matérielle commise dans l'assignation, reproduite dans la déclaration d'appel de M. B., ne l'affectait pas.

En l'absence d'une faculté de représenter une EIRL dépourvue de personnalité juridique et insusceptible de bénéficier d'une procédure collective, les conclusions déposées par la SELARL MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire de M. B. répondent à l'appel formé et ne manifestent pas une intervention volontaire contrairement à l'affirmation de ce dernier, les premiers juges ayant noté dans l'exorde de leur jugement qu'elle était partie à l'instance.

Le dispositif des écritures de l'appelant ne comporte d'ailleurs au sens de l'article 954 du code de procédure civile aucune prétention à ce sujet, les mentions où M. B. sollicite que la cour fasse des constatations n'en constituant pas.

Sur l'inscription de faux incident

La cour statue sur l'inscription de faux à titre incident déposé le 22 août 2017 et sur les prétentions figurant au dispositif des conclusions des parties concernant cet incident.

M. B. argue de faux en écriture authentique des mentions précises émanant des décisions rendues par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse les 26 février et 29 juin 2015 qui ont prononcé son redressement judiciaire puis sa liquidation judiciaire, devenues définitives à défaut de recours.

Si la SELARL MJ Synergie a déclaré vouloir se servir de ces jugements à l'appui de ses moyens et prétentions au visa de l'article 314 du code de procédure civile, l'article 307 de ce code conduit la cour à retenir qu'elle est en mesure de statuer sur le litige sans tenir compte de ces pièces arguées de faux.

L'inscription de faux présentée par M. B. ne tend pas à leur remise en cause mais uniquement à ce que soient retenues fausses plusieurs de leurs mentions.

Le litige entre les parties porte en effet sur des événements postérieurs à l'intervention de ces décisions.

Les parties ne contestent pas qu'il est constant que ces deux décisions de procédure collective sont intervenues et ne discutent pas de la désignation par jugement du 29 juin 2015 de la SELARL MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire, qualité qui est confirmée par sa publication au BODACC produite par M. B..

Il n'y a pas lieu de se prononcer sur le faux opposé à ces deux jugements (pièces 1 et 2 de M. B. et 4 et 7 de la SELARL MJ Synergie).

M. B. invoque également des faux en écriture authentique affectant les mentions suivantes du jugement entrepris :

- en page 1 dans la désignation des parties «SA MJ Synergie liquidateur judiciaire de l'EIRL Thierry B. »

- en page 5 dans la motivation des premiers juges qui retient « Toutefois cette déclaration d'affectation d'une partie de bien immobilier de Grilly n'a pas fait l'objet du dépôt d'une déclaration complémentaire à la chambre d'agriculture telle que prévue par la disposition précitée. »

Il affirme que ces deux mentions sont inexactes, la première en ce que cette société MJ Synergie est son liquidateur judiciaire et pas celui de l'EIRL Thierry B., la seconde en ce que le jugement entrepris a constaté que l'affectation de patrimoine à l'EIRL n'a pas, contrairement à ce qu'il démontre en appel, été dénoncée à la chambre de l'agriculture.

La SELARL MJ Synergie répond par la même argumentation que celle invoquée pour répliquer à l'exception de nullité de l'assignation concernant sa qualité de liquidateur judiciaire mentionnée sur la première page du jugement et que les motifs pris par les premiers juges ne sont pas faux, car la déclaration notariée effectuée le 25 avril 2013 n'est que complémentaire et ne pouvait concerner que l'adjonction au patrimoine affecté d'un bien qui n'y figurait pas initialement.

Si en application de l'article 457 du code de procédure civile, une décision de justice a la force probante d'un acte authentique, cette force ne s'attache qu'aux faits que le juge a énoncés pour les avoir accomplis lui-même.

Il a été retenu plus haut que la SELARL MJ Synergie n'a pas usé d'une fausse qualité en mentionnant dans son assignation qu'elle agissait comme liquidateur judiciaire de « l'EIRL Thierry B. ». Cette erreur matérielle a été reproduite sur la première page du jugement mais les premiers juges ont repris dans leur exorde que 'Par acte d'huissier de justice du 11 janvier 2016, la SELARL MJ SYNERGIE en qualité de liquidateur de Monsieur B., a fait assigner ce dernier' et retenu dans leur dispositif 'Déclare inopposable à la SELARL MJ Synergie, en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. B., la déclaration d'affectation à son activité professionnelle.'

Cette mention erronée n'affectant que la première page du jugement entrepris ne peut ainsi être qualifiée de faux en écriture authentique comme entrant en contradiction totale avec le reste de la décision.

L'effet dévolutif attaché à l'appel formé par M. B. conduit nécessairement la cour à apprécier la pertinence de la motivation prise par les premiers juges sur l'effectif enregistrement de la déclaration d'affectation.

Contrairement à ce qu'affirme M. B., l'acte notarié du 25 avril 2013 ne fait pas état de son enregistrement par la chambre de l'agriculture, mais prévoit qu'une copie authentique de l'acte lui est envoyée à cette fin en rappelant : « Une copie authentique de la déclaration sera déposée auprès de la Chambre d'agriculture du département du lieu du siège de l'exploitation aux fins d'inscription sur le registre de l'agriculture, accessible au public, tenu par la Chambre. »

L'appréciation juridique que les premiers juges ont effectuée, en retenant sur la base des pièces produites par la SELARL MJ Synergie que la déclaration d'affectation complémentaire n'avait pas fait l'objet du dépôt d'une déclaration complémentaire à la chambre d'agriculture telle que prévue par l'article L 526-9 du code de commerce, ne peut ainsi constituer une constatation personnelle du juge susceptible d'être arguée de faux.

L'inscription de faux à titre incident présentée par M. B. doit en conséquence être rejetée, les mentions du jugement entrepris arguées de fausses ne constituant pas des faux en écriture authentique.

Sur la régularité de l'affectation patrimoniale

La SELARL MJ Synergie soutient au visa des articles L 526-8 et L 526-9 du code de commerce que l'affectation d'un bien immobilier nécessitant d'être reçue par acte notarié, l'acte passé le 25 avril 2013 n'a pas couvert l'irrégularité affectant la première déclaration d'affectation de patrimoine effectuée le 30 octobre 2012 par acte sous seing privé, cette irrégularité lui rendant inopposable cette affectation.

Elle précise que la déclaration d'affectation du 30 octobre 2012 n'était pas recevable en ce qui concerne l'immeuble. Elle ajoute que la dénonciation de l'acte notarié à la chambre de l'agriculture mise en avant par M. B. est indifférente comme tardive, car l'acte notarié devait être antérieur à tout autre acte pour être opposable.

M. B. réplique que les premiers juges ont commis une erreur sur les faits, car l'acte notarié du 25 avril 2013 fait état de ce qu'il est prévu qu'une copie authentique soit déposée auprès de la chambre d'agriculture et qu'il démontre que cette formalité a été opérée le 11 juin 2013.

Il résulte du courrier de la chambre d'agriculture de l'Ain du 18 mai 2015 et de la pièce qui lui est jointe que M. B. a déposé une déclaration d'affectation sous seing privé datée du 30 octobre 2012 portant sur les éléments d'actif de son activité professionnelle, et comportant une 'construction' pour une valeur de 512.204 € décrite en annexe comme 'Entrepôt, bureau'.

M. B. ne conteste pas son adversaire lorsqu'il retient à bon droit que cette déclaration d'affectation du 30 octobre 2012 était irrégulière et par conséquence inopposable, car elle comprenait un bien immobilier qui rendait obligatoire en application des articles L 526-8 et L 526-9 que son affectation soit réalisée dès l'origine par acte notarié qui devait être publiée au service de la publicité foncière.

Le courrier du 26 avril 2013 qu'il produit, envoyé à la chambre de l'agriculture de l'Ain, confirme que son attention avait été attirée sur des « éléments manquants », « notamment pour l'acte notarié pour l'affectation de la construction. »

Si l'article L 526-10 permet d'effectuer une déclaration complémentaire postérieure, elle doit concerner l'adjonction d'un bien qui n'a pas été visé dans la déclaration initiale.

L'acte notarié du 25 avril 2013 rappelle d'ailleurs en page 4 dans son paragraphe « OBJECTIF DE LA DECLARATION » « Le requérant déclare n'avoir à ce jour procédé à aucune déclaration d'affectation pour les biens objets des présentes. » et confirme que l'acte devait concerner une telle adjonction.

Cette déclaration d'affectation notariée, qui ne vise pas les autres éléments nécessaires à l'activité de l'entreprise mentionnés dans l'acte sous seing privé du 30 octobre 2012 et nécessairement inclus dans la déclaration d'affectation en application de l'article L 526-6, doit être qualifiée de complémentaire.

En visant un bien immobilier dont M. B. ne conteste pas qu'il avait déjà été intégré dans la déclaration initiale, cette déclaration était irrégulière et n'a pas pu avoir pour effet de régulariser la déclaration sous seing privé du 30 octobre 2012.

L'inscription de cet acte authentique au registre de la chambre de l'agriculture est ainsi indifférente.

L'anomalie relevée à bon droit par les premiers juges au visa de l'article 552 du code civil, non discutée par l'appelant, comme celle arguée par le liquidateur judiciaire au titre de la détermination inexacte des lots dans l'état descriptif de division inclus dans l'acte notarié du 25 avril 2013 devaient également conduire à cette inopposabilité.

Pour les motifs qui viennent d'être pris, la décision déférée doit être confirmée en ce que la déclaration d'affectation du bâtiment agricole situé à Grilly séparément du terrain formant son assiette au patrimoine affecté à l'EIRL B. les écuries du bois clos a été déclarée inopposable à la procédure collective de M. B..

Sur la demande de réunion du patrimoine personnel de M. B. avec le patrimoine affecté à L'EIRL B. les écuries du bois clos

La SELARL MJ Synergie demande au visa des articles L 526-12 et L 621-2 du code de commerce la réunion du patrimoine personnel de M. B. avec celui affecté à cette EIRL au motif que M. B. a commis un manquement grave à ses obligations prévues par l'article L 526-13.

Ce dernier texte dispose : « L'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté fait l'objet d'une comptabilité autonome, établie dans les conditions définies aux articles L. 123-12 à L. 123-23 et L. 123-25 à L. 123-27.

Par dérogation à l'article L. 123-28 et au premier alinéa du présent article, l'activité professionnelle des personnes bénéficiant des régimes définis aux articles 50-0, 64 et 102 ter du code général des impôts fait l'objet d'obligations comptables simplifiées.

L'entrepreneur individuel à responsabilité limitée est tenu de faire ouvrir dans un établissement de crédit un ou plusieurs comptes bancaires exclusivement dédiés à l'activité à laquelle le patrimoine a été affecté. »

M. B. ne critique pas expressément le jugement entrepris qui a fait droit à cette demande et ne répond pas aux moyens opposés par le liquidateur judiciaire.

L'absence d'une comptabilité séparée n'est pas discutée et résulte d'ailleurs du courrier susvisé du 18 mai 2015 de la chambre d'agriculture qui révèle que les comptes n'ont pas été déposés comme cela devait être le cas à la clôture comptable du 31 août 2014.

Les premiers juges ont retenu à bon droit par une motivation que la cour adopte pour le surplus que cet irrespect des règles de fonctionnement de l'EIRL constituait un manquement grave permettant de réunir son patrimoine personnel à celui affecté à son entreprise individuelle.

Les dispositions de l'article L 653-5 du code de commerce invoqués par la SELARL MJ Synergie sont inopérantes en ce qu'elles ne peuvent conduire qu'à une faillite personnelle dont le prononcé n'est pas sollicité.

Les premiers juges ont à bon droit indiqué qu'il n'était pas besoin de déterminer le degré de coopération de M. B. avec les organes de la procédure pour faire droit à la demande de réunion des patrimoines.

La décision entreprise doit être confirmée.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

M. B. succombe totalement en son appel et doit en supporter les dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas au regard de la réunion du patrimoine personnel de M. B. à celui soumis à la liquidation judiciaire de faire application de l'article 700 au profit du liquidateur judiciaire en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Rejette les exceptions de nullité de l'assignation et du jugement entrepris présentées par M. B.,

Déclare irrecevable l'intervention volontaire de l'EIRL les Ecuries du bois clos,

Dit qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur les faux opposés aux jugements rendus par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse les 26 février et 29 juin 2015 dans son inscription de faux à titre incident déposée par M. B. le 22 août 2017,

Dit que les mentions du jugement entrepris arguées de fausses par M. B. dans son inscription de faux à titre incident ne constituent pas des faux en écriture authentique,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Rejette la demande de la SELARL MJ Synergie fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. B. aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et dit n'y avoir lieu de faire application de l'article suivant du même code au profit de l'intimée.