Cass. com., 11 février 2014, n° 13-10.146
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 octobre 2012), que la société EM2C construction Sud Est (la société EM2C), a sous-traité à la société Groupement Demathieu et Bard-Thomas et Danizan (le Groupement) des travaux que la société Clinique du cours Dillon lui avait confiés ; que la société EM2C ayant été placée sous sauvegarde, le groupement a déclaré sa créance ; que la société EM2C, invoquant une délégation de paiement, en a contesté l'admission ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches :
Attendu que la société EM2C fait grief à l'arrêt d'avoir admis la créance du Groupement pour un certain montant, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue une délégation, par opposition à la simple indication de paiement, l'acte par lequel une personne, le délégué, prend un engagement nouveau et irrévocable envers le délégataire ; que l'acte d'agrément du sous-traitant en date du 27 mars 2008 spécifiait « paiement direct par le maître de l'ouvrage à 30 jours le 15 » mais surtout comportait la mention « pour accord » (du maître de l'ouvrage) et était revêtu du cachet et de la signature de ce dernier ; qu'en considérant que cet acte ne contenait «aucune acceptation des maîtres de l'ouvrage de s'obliger envers le créancier», la cour d'appel l'a dénaturé, violant l'article 1134 du code civil ;
2°/ que constitue une délégation, par opposition à la simple indication de paiement, l'acte par lequel une personne, le délégué, prend un engagement nouveau et irrévocable envers le délégataire ; que l'acte du 27 mars 2008 spécifiait « paiement direct par le maître de l'ouvrage à 30 jours le 15 », comportait la mention « pour accord » (du maître de l'ouvrage) et était signé des trois parties ; qu'en refusant à un tel acte la qualification de délégation, la cour d'appel a violé les articles 1275 et 1277 du code civil ;
3°/ que la délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers ce dernier vaut novation et dégage le premier débiteur lorsque le créancier le décharge de son obligation ; qu'en matière commerciale, la volonté de décharger le débiteur délégant peut être tacite et résulter des circonstances de la cause, notamment de l'acceptation d'un paiement direct par un tiers ; qu'en ne recherchant pas si le Groupement , qui, dans l'acte du 27 mars 2008, avait accepté un paiement direct par le maître de l'ouvrage, n'avait pas entendu corrélativement décharger de son obligation de paiement la société EM2C, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1275 du code civil ;
Mais attendu que l'acceptation du sous-traitant et l'agrément des conditions de paiement du contrat de sous-traitance par le maître de l'ouvrage n'impliquent pas l'existence d'une délégation de paiement ; qu'après avoir constaté que la demande d'agrément du Groupement en qualité de sous-traitant présentée le 27 mars 2008 au maître de l'ouvrage, qui l'avait accepté, stipulait un "paiement direct par le maître de l'ouvrage à 30 jours le 15", l'arrêt retient que cet acte ne contient aucune délégation de débiteur donnée par la société EMC2 au maître de l'ouvrage, aucune acceptation de celui-ci de s'obliger envers le créancier ni aucune déclaration expresse du Groupement déchargeant le débiteur en vertu d'une délégation emportant novation ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a fait la recherche prétendument omise évoquée à la troisième branche, a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société EM2C fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde de justice interrompt les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits ; qu'en conséquence, aucune reconnaissance de créance ne peut résulter de l'expiration, sans qu'intervienne une contestation détaillée, des délais contractuels de la norme AFNOR NF P03-001 ; qu'en jugeant néanmoins applicables lesdits délais et la déchéance du droit à contester qui en résultait, la cour d'appel a violé l'article L. 622-21 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant énoncé que les dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce ne faisaient pas obstacle à la mise en jeu des stipulations contractuelles, la cour d'appel a, à bon droit, décidé que le mécanisme de la norme AFNOR NFPO3-001 avait vocation à s'appliquer ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société EM2C construction Sud-Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quatorze.