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Décisions

Cass. com., 9 janvier 2001, n° 98-10.876

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Corler (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

M. Delmotte

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Richard et Mandelkern, SCP Waquet, Farge et Hazan

T. com. Quimper, ch. 1, du 10 oct. 1997

10 octobre 1997

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de commerce de Quimper, 10 octobre 1997), rendu en dernier ressort, que la société Corler a été mise en redressement judiciaire le 31 août 1995, M. X... étant nommé en qualité d'administrateur judiciaire, sa mission étant d'assister le débiteur ; que la société Meledo a assigné l'administrateur judiciaire en paiement de certaines sommes dues au titre d'un contrat de transport de marchandises, conclu postérieurement au jugement d'ouverture et de frais irrépétibles ;

Sur les premiers et deuxième moyens, réunis :

Attendu que M. X... reproche au jugement de l'avoir condamné, en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Corler, à payer à la société Meledo certaines sommes alors, selon le moyen :

1 / que le juge ne peut relever un moyen d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant néanmoins d'office le moyen tiré de ce que la société Corler avait été mise en liquidation judiciaire le 16 mai 1997 afin d'en déduire qu'elle ne pouvait être représentée que par son administrateur judiciaire, le tribunal a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens ; que l'instance, interrompue par l'effet d'un tel jugement, doit être reprise par le liquidateur ou à son encontre ; qu'à défaut, le jugement même passé en force de chose jugée, obtenu après interruption de l'instance, est réputé non avenu ; que le jugement attaqué a été rendu au terme d'une instance introduite par acte du 6 janvier 1997 à l'encontre de M. X..., pris en sa qualité d'administrateur de la société Corler ; qu'il constate que la liquidation judiciaire de celle-ci a été ordonnée, par jugement du 16 mai 1997, ce dont il résulte que l'instance avait été interrompue et devait être reprise par le liquidateur, ce qui n'a pas été fait ; que le jugement doit, par conséquent, être déclaré non avenu, comme ayant été rendu en violation des articles 152 de la loi du 25 janvier 1985, et 369 et 372 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que, quelle que soit l'évolution de la procédure collective, le moyen est inopérant dès lors que M. X... n'a pas contesté sa qualité de représentant légal de la société Corler ; qu'il est donc irrecevable ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que l'administrateur judiciaire reproche encore au jugement d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le moyen :

1 / que le juge ne peut relever un moyen d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant néanmoins d'office le moyen tiré de ce que la conclusion du transport litigieux constituait un acte de gestion courant de l'entreprise, le tribunal a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que n'est pas née régulièrement après le jugement d'ouverture du redressement judiciaire la créance résultant d'un acte de gestion courante accompli par le débiteur au profit d'un tiers de mauvaise foi, sans l'assistance de l'administrateur chargé de l'assister ; qu'en décidant néanmoins que la créance de la société Meledo, née de la conclusion d'un contrat de transport avec la société Corler, était née régulièrement après le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, peu important que M. X..., ayant pour mission d'assister la société Corler, n'ait pas assisté celle-ci pour la conclusion de cette convention, dès lors qu'il s'agissait d'un acte de gestion courante, sans rechercher, comme il y était invité, si la société Meledo n'ignorait pas que ce contrat ne pouvait être valablement conclu sans l'assistance de l'administrateur judiciaire, de sorte qu'elle ne pouvait être considérée comme un tiers de bonne foi et que la créance n'était pas née régulièrement après l'ouverture du redressement judiciaire, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 31, 32 et 40 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 32, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-23 du Code de commerce, que, sous réserve des dispositions des articles 33 et 37 de la même loi, devenus les articles L. 621-24 et L. 621-28 du même Code, les actes de gestion courante que le débiteur en redressement judiciaire accomplit seul, quelle que soit la mission de l'administrateur, sont réputés valables à l'égard des tiers de bonne foi ; qu'après avoir constaté que l'acheminement de marchandises fabriquées auprès de la clientèle constituait une activité quotidienne de la société Corler, que l'engagement conclu le 25 avril 1996 entre le responsable des expéditions de la société Corler et la société Meledo incluait une clause selon laquelle les factures seraient établies à la décade pour règlement, comme proposé par le préposé de la société Corler, via M. X..., et relevé que les expéditions et factures faites en avril et début mai 1996 avaient été normalement réglées par l'administrateur, le tribunal, qui était invité par les conclusions des parties à analyser les conditions dans lesquelles est né le contrat de transport, a souverainement considéré que la conclusion de ce contrat, effectuée pour les besoins de l'activité commerciale durant la période d'observation, était un acte de gestion courante et a décidé à bon droit que le débiteur, agissant seul, s'était ainsi valablement engagé à l'égard d'un transporteur de bonne foi ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.