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Décisions

CA Paris, 3e ch. A, 26 octobre 1999, n° 1997/12226

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Lafont (ès qual.), Stackler (ès qual.), Banque de l'Ile de France (SA)

Défendeur :

Laperouse (Sté), De Thore (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pinot

Conseillers :

M. Perie, Mme Beauquis

Avoués :

SCP Varin-Petit, SCP Verdun-Gastou, SCP Hardouin-Herscovici

Avocats :

Me Dusbocq, Me Paccioni, Me Guibert, Me Garcia, Me Petreschi, Me Tardieu-Naudet

T. com. Paris, 17e ch., du 20 mai 1997

20 mai 1997

Vu les appels interjetés d'une part, par Me LAFONT et Me STACKLER. ès-qualités de coadministrateurs au redressement judiciaire de la société LAPEROUSE et d'autre part par la BANQUE DE L’ILE DE FRANCE "BDEI" venant aux droits de la SDBO, du jugement rendu par le tribunal de commerce le 20 mai 1997 qui a :

- déclaré recevable mais mal fondée l'opposition formée par Me LAFONT et Me STACKLER et la BDEI a I’ordonnance du 16 octobre 1996 du juge-commissaire au redressement judiciaire de la société LAPEROUSE,

- infirme "d'office" ladite ordonnance,

- dit à Me LAFONT et Me STACKLER et la BDEI de mieux se pourvoir,

II est renvoyé aux énonciations du jugement pour une connaissance complète des faits de la cause et des demandes et moyens des parties en première instance ;

La société LAPEROUSE a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 14 juin 1993 qui a désigné Me LAFONT et Me STACKLER en qualité d'administrateurs avec mission d'assurer seuls l’administration de l’entreprise. Au terme de la période d'observation, le tribunal, par jugement en date du 15 novembre 1993, à arrêter le plan de cession totale de l’entreprise présente Me LAFONT et Me STACKLER, et a nommé Me DE THORE, commissaire à l’exécution du plan, englobant la totalité des actifs.

Les mandataires judiciaires ont, conformément aux dispositions de l’article 65 du décret du 27 décembre 1985, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, déposé l’état des créances relevant de l’article 40 de la loi du 25 janvier 1985 sur lequel la SDBO apparaissait créancière d'une somme de 328 700 F, sous réserve des agios.

Le commissaire à l’exécution du plan, relevant que le découvert bancaire accordé par la SDBO n'avait pas obtenu l’autorisation préalable du juge-commissaire prévue par l’article 40 alinéa 3-3° de la loi du 25 janvier 1985, par requête en date du 8 octobre 1996, a saisi le juge-commissaire afin d'être autorise a régler cette somme a la SDBO.

Le juge-commissaire par ordonnance en date du 16 octobre 1996 a autorisé le commissaire à l’exécution du plan à payer la créance de la SDBO s’élevant alors à la somme de 812 035,36 F intérêts compris arrêtés au 30 septembre 1996, en précisant toutefois que ce règlement ne pourrait intervenir qu'après que tous les créanciers de l’article 40 autres que la BDEI et tous les créanciers de l’article 50 auront été intégralement réglés.

Le Tribunal, statuant sur l'opposition de Me LAFONT et Me STACKLER et de la BDEI, a estimé que le soutien financier accorde par la SDBO a la société LAPEROUSE pendant la période d'observation, sans autorisation préalable du juge-commissaire et sans mesure de publicité ne constituait ni une créance née régulièrement après le jugement d'ouverture visée par l’article 40, ni une créance née antérieurement au jugement déclaratif telle que définie par l'article 50 et qu’en conséquence le juge-commissaire ne pouvait autoriser le paiement de la créance de la SDBO.

Vu les conclusions de Me LAFONT et Me STACKLER, ès-qualités, par lesquelles ils demandent à la cour de déclarer nulle l'ordonnance du juge-commissaire, au motif que ce magistrat a excédé ses pouvoirs, et infirmant le jugement, de dire que le commissaire a l'exécution du plan doit régler la créance de la SDBO, conformément aux dispositions de l'article 40 alinéa 3-5° de la loi, au motif que cette créance qui résulte du fonctionnement normal du compte courant ouvert par eux-mêmes dans les livres de la banque pour permettre la poursuite de l'activité de la société pendant la période d'observation. Entre dans le champ d’application de l'article 40 précité.

Vu les conclusions en date du 14 juin 1999 de la BDEI tendant à l‘annulation de l'ordonnance du juge-commissaire et, par voie d’infirmation du jugement, a la condamnation du commissaire a l'exécution du plan à lui payer la somme de 852 436, 90 F augmentée des agios ayant couru depuis le 25 février 1997, au motif que sa créance est née régulièrement de la poursuite de l'activité de la société LAPEROUSE et relevé, à ce titre, de l’article 40 alinéa 3-5° de la loi.

Vu les conclusions de la société LAPEROUSE et celles de Me DE THORE ès-qualités de commissaire à l’exécution du plan, par lesquelles celles-ci s'en rapportent l'une et l’autre à justice.

SUR CE LA COUR

Considérant qu'aux termes des articles 173 et 173-1 de la loi du 25 janvier 1985, la voie de l'appel est ouverte contre les jugements statuant sur les recours formés contre les ordonnances du juge-commissaire, lorsque celui-ci a excédé les limites de ses attributions ;

Considérant en l'espèce, qu'en décidant que la créance de la SDBO ne serait réglée qu’après le désintéressement de tous les autres créanciers de la procédure et des créanciers antérieurs à l'ouverture de la procédure, alors que l'ordre des paiements des créances est institué par la loi, le juge-commissaire a manifestement excédé ses pouvoirs ; 

Qu'il s'ensuit que l’ordonnance susvisée est nulle et que les appels interjetés par les mandataires judiciaires et la banque contre le jugement statuant sur leur opposition, sont recevables ;

Considérant au fond, que l’article 40 alinéa 1er de la loi précitée prévoit que les créances régulièrement nées de la poursuite de l'activité postérieurement au jugement d'ouverture, sont payées, en cas de cession totale de l’entreprise, par priorité à toutes les autres créances, assorties ou non de privilège ou sureté, à l’exception de celles énumérées par ledit article, et selon un ordre institué par l'alinéa trois du même article ;

Qu’en l’espèce il n'est pas contesté que la créance de la SDBO, dont ni l'existence ni le montant ne sont contestés, résulte du solde débiteur d'un compte courant ouvert par les administrateurs judiciaires, en vertu des pouvoirs qui leur étaient conférés par le jugement déclaratif, pour les besoins de la poursuite de l’activité de la société LAPEROUSE jusqu’à l'adoption du plan de cession :

Que la circonstance relevée, par les premiers juges, que le découvert ainsi accordé par la SDBO n'a pas été autorisé par le juge-commissaire, n'a pas eu pour effet de faire perdre à la SDBO sa qualité de créancier de la procédure, mais seulement de la priver du droit de revendiquer le rang plus favorable reconnu par l'alinéa 3-3° de l’article 40, aux créances nées d'un crédit autorisé par le juge-commissaire et public ;

Que la créance de la SDBO étant née régulièrement après l’ouverture de la procédure collective, c'est à juste titre que la BDEI en demande le paiement à titre prioritaire, au cinquième et dernier rang, en application de l'article 40, alinéa 3-5° ;

Considérant en conséquence que le jugement défère sera infirmé et le commissaire à l’exécution du plan condamné à payer à la BDEI la somme de 852 436, 90 F augmenté des intérêts au taux conventionnel à compter du 25 février 1997 ;

PAR CES MOTIFS

RECOIT Me LAFONT et Me STACKLER et la BDEI venant aux droits de la SDBO en leurs appels,

ANNULE l’ordonnance du juge-commissaire du 16 octobre 1996, INFIRME le jugement déféré.

STATUANT A NOUVEAU

DIT que la créance de la BDEI relevé des dispositions de l'artide 40 alinéa 3-5° de la loi du 25 janvier 1985,

CONDAMNE Me DE THORE ès-qualités à payer à la BDEI la somme 852 436, 90 F augmentée des intérêts au taux conventionnel à compter du 25 février 1997,

DIT que les dépens seront employés en frais privilégiés du redressement judiciaire de la société LAPEROUSE et ADMET la SCP HARDOUIN HERSCOVICI et la SCP VARIN PETIT au bénéfice de l'article 699 NCPC.