CA Versailles, 13e ch., 13 février 2014, n° 12/07040
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Belaval
Conseillers :
Mme Beauvois, Mme Vaissette
FAITS ET PROCEDURE
La SAS La tour d'Auvergne, dont le président était M. Van E., a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Versailles du 27 juin 2006, la SCP L.-J. étant désignée administrateur avec mission d'assistance et Me R. liquidateur.
Constatant des difficultés entre le dirigeant de la société et l'administrateur notamment quant à la fiabilité de la comptabilité, le tribunal a confié à la SCP L.-J. une mission de représentation par jugement du 5 décembre 2006.
Après deux renouvellements de la période d'observation, un jugement du 18 décembre 2007 a arrêté le plan de continuation de la société La tour d'Auvergne pour une durée de huit ans.
Les échéances du plan n'étant pas réglées, sa résolution a été prononcée et la cessation des paiements de la société étant constatée, sa liquidation judiciaire a été prononcée par jugement du 31 mars 2009 qui a désigné Me R. liquidateur. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 22 octobre 2009.
Par acte du 30 septembre 2009, la société La tour d'Auvergne et M. Van E. avaient assigné devant le tribunal de grande instance de Nanterre Me L., Me J. et la SCP L.-J. en paiement de dommages-intérêts au titre de leur responsabilité professionnelle.
La SCP BTSG, désignée liquidateur judiciaire en remplacement de Me R., par jugement du 18 mai 2010, est intervenue volontairement à l'instance afin de reprendre ès qualités les demandes de la société La tour d'Auvergne.
Par jugement du 5 juillet 2012, le tribunal de grande instance de Nanterre a :
- rejeté la demande de rabat de l'ordonnance de clôture,
- déclaré recevables en la forme les demandes présentées dans l'assignation et reprises par la SCP BTSG,
- déclaré ces demandes mal fondées,
- condamné la SCP BTSG à payer à la SCP L.-J., Mes L. et J. la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCP BTSG aux dépens.
M. Van E. a relevé appel de ce jugement le 12 octobre 2012 et, par dernières conclusions du 5 décembre 2013, demande la cour de :
- surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte pénale avec constitution de partie civile pendante,
subsidiairement,
- infirmer le jugement en ce qu'il déclare les demandes mal fondées, condamne la SCP BTSG à verser à la SCP L.-J., Mes L. et J. la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens,
- débouter la SCP L.-J., Mes L. et J. de toutes leurs demandes,
- les condamner solidairement à payer à M. Van E. la somme de 129 200 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamner solidairement la SCP L.-J., Mes L. et J. à payer à M. Van E. la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
M. Van E. soutient pour l'essentiel :
Sur le sursis à statuer :
- qu'estimant avoir été victime de délits orchestrés par les organes de la procédure, il a déposé plainte le 19 octobre 2009 contre X pour malversations, escroquerie au jugement, déni de justice et dénonciation calomnieuse,
- que les manquements fondant la présente procédure sont ceux visés par la plainte pénale et que l'enquête préliminaire permettra d'apporter les éclaircissements sur les dires et agissements préjudiciables à la société La tour d'Auvergne,
- qu'en raison du classement sans suite de sa plainte décidée par le procureur de la République, M. Van E. s'est constitué partie civile devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Versailles, de sorte que la procédure pénale est initiée et justifie le sursis à statuer, la preuve manquante devant le conseiller de la mise en état de la régularité de la constitution de partie civile étant désormais rapportée par la production de l'ordonnance du 27 novembre 2013,
- que contrairement à ce qu'indique l'ordonnance du conseiller de la mise en état, il ne s'agit pas d'un sursis facultatif mais du sursis obligatoire de l'article 4, alinéa 2, du code de procédure pénale,
A titre subsidiaire, sur le fond :
- que l'administrateur judiciaire a commis plusieurs refus d'exercer sa mission, en ne réalisant pas le diagnostic de la société, en ne proposant pas sa restructuration, en l'absence de réunions de travail avec le débiteur, de visite de l'entreprise et d'approche économique pour examiner les perspectives de redressement,
- que c'est le débiteur qui a présenté un plan de continuation alors que l'administrateur prétendait solliciter une liquidation judiciaire et prônait un plan de cession dont Me R. soulignait pourtant la non- conformité aux exigences des textes, que l'administrateur a ainsi méconnu les finalités de sa mission tout en demandant de manière contradictoire le renouvellement de la période d'observation,
- que l'administrateur, qui représente les intérêts du débiteur, a, dans un premier temps, suivi la position de la société débitrice dans sa contestation du taux effectif global appliqué par la banque Fortis pour ensuite changer d'avis, laisser le débiteur assumer seul un contentieux et refuser de consigner les sommes requises pour la fin de l'expertise, qu'il a occulté le rôle joué par la banque Fortis dans la cessation des paiements, qu'il a même proposé l'admission des créances déclarées par Mme C. et M. G. qui ont finalement été rejetées par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 26 juin 2008,
- que l'administrateur a entrepris des diligences inutiles et coûteuses comme celles relatives à l'extension de la procédure collective à la SCI Carnot 6 voire à la société Mind over money finalement interrompues après l'engagement de frais notamment de consignation d'expertise,
- que la SCP L.-J. devenue commissaire à l'exécution du plan s'est opposée à la demande de modification du plan présentée par la société débitrice et a élevé une difficulté relative à la création d'un passif nouveau qui était réglé lorsque la cour d'appel de Versailles a confirmé la liquidation judiciaire le 22 octobre 2009, seul étant encore en cause le non-paiement des semestrialités du plan par l'entremise du commissaire à l'exécution du plan,
- que des agissements frauduleux et contraires à l'éthique de la profession d'administrateur judiciaire ont été commis avec l'établissement de notes comportant des données destinées à tromper les juges afin de faire renouveler indûment la période d'observation et provoquer la liquidation judiciaire,
- que l'administrateur a d'abord cherché son intérêt financier en demandant la prolongation de la période d'observation pour finalement demander la liquidation judiciaire,
- que le préjudice directement causé à la société s'élève à 149 855, 04 euros s'agissant des frais injustifiés auxquels s'ajoutent une perte de chiffre d'affaires et donc un manque à gagner en marge brute de 32 000 euros,
- que le préjudice causé à M. Van E. consiste dans l'impossibilité de se rémunérer en 2006 et 2007 en raison des frais occasionnés par les auxiliaires de justice, soit un préjudice de 102 000 euros + 27 200 euros entre juillet 2006 et juillet 2009.
La SCP L.-J., Mes L. et J., par dernières conclusions du 11 avril 2013, demandent à la cour de :
- déclarer irrecevables les demandes d'infirmation du jugement en ce qu'il a condamné la SCP BTSG ès qualités pour défaut de qualité à agir de M. Van E.,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter M. Van E. de l'ensemble de ses demandes,
- le condamner à payer à chacun des intimés la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux dépens.
Ils font valoir en substance :
- que la SCP L.-J. a déposé le bilan économique et social le 24 juillet 2006 qui comporte le diagnostic des difficultés de l'entreprise en page 13 et une approche économique avec notamment l'étude du ratio frais de personnel/valeur ajoutée, que l'arrêt de la Cour de cassation du 8 juin 2010 a d'ailleurs considéré que le diagnostic peut être inclus dans le bilan économique et social, sans qu'il soit nécessaire qu'il fasse l'objet d'un document distinct,
- que des réunions de travail ont eu lieu à l'étude de l'administrateur sans déplacement sur les lieux du restaurant eu égard au climat conflictuel avec le dirigeant,
- que si des réserves ont été émises par l'administrateur sur la faisabilité d'un plan de continuation lesquelles se sont avérées fondées, aucun grief ne peut être avancé par M. Van E. puisque le plan de continuation a été arrêté par le tribunal,
- que pour les créances sur lesquelles l'administrateur ne partageait pas la position du débiteur, il était fondé à désigner un avocat distinct afin d'assurer la loyauté des débats, qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir consigné le complément de provision pour l'expertise concernant le litige avec la banque Fortis puisqu'il ne disposait pas de la trésorerie nécessaire et n'avait reçu aucun élément de l'avocat choisi par M. Van E., que s'agissant des créances C. et Grinfinder, la SCP L.-J. s'en est rapportée à justice quant à leur admission en cause d'appel et, en tout état de cause, ces créances ont été rejetées,
- que l'administrateur était fondé à solliciter la désignation d'un expert dans la perspective d'une extension de la procédure collective aux sociétés SCI Carnot 6 et Mind over money dans la mesure où le cabinet D., expert-comptable mandaté par M. Van E. avant l'ouverture de la procédure, avait alerté l'administrateur sur des anomalies,
- que les notes et rapports établis par la SCP L.-J. l'ont été sur la base de documents transmis par la société La tour d'Auvergne ou son expert-comptable et en aucun cas pour tromper la religion des juges, la création du passif nouveau ayant conduit à la liquidation judiciaire étant confirmée par toutes les pièces du dossier, le jugement puis l'arrêt confirmatif,
- qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le fait de l'administrateur judiciaire et les situations de fait résultant de décisions de justice rendues contradictoirement et devenues définitives,
Subsidiairement, sur le préjudice,
- que les frais exposés par la société La tour d'Auvergne pour l'exercice de ses droits propres doivent rester à sa charge, la perte de profit résultant de l'impossibilité d'investir étant inexistante,
- que les sommes réclamées à titre personnel par M. Van E. sont exorbitantes, M. Van E. ayant renoncé à toute rémunération afin de ne pas obérer davantage les résultats de la société pendant la période d'observation et les frais directement liés à la procédure et validés par la Cour de cassation se limitant à 32 000 euros.
La SCP BTSG, en qualité de liquidateur judiciaire de la société La tour d'Auvergne a été intimée et assignée par acte du 5 décembre 2012 remis à personne habilitée. Elle n'a pas constitué avocat devant la cour.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION
- Sur la demande de sursis à statuer
M. Van E. verse au dossier l'ordonnance rendue le 27 novembre 2013 par le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Versailles sur sa plainte avec constitution de partie civile du 11 mars 2013 déposée contre X des chefs d'escroquerie réalisée en bande organisée et de dénonciation calomnieuse commis du 27 juin 2007 au 19 octobre 2009 à Versailles. Cette ordonnance fixe le montant de la consignation à 7 000 euros et dit que la somme devra être versée entre les mains du régisseur du tribunal de grande instance au plus tard le 27 janvier 2014.
Après révocation de la précédente ordonnance la prononçant, la clôture est intervenue le 9 décembre 2013, à la date de l'audience des plaidoiries et M. E. n'a aucunement justifié à cette date du versement de la consignation.
Force est de constater en conséquence qu'au jour de la clôture des débats, il n'était pas justifié de la mise en mouvement de l'action publique puisque cette dernière est subordonnée par les articles 85 et 88 du code de procédure pénale au paiement de la consignation fixée par le juge d'instruction.
En tout état de cause, contrairement aux prétentions de M. Van E., la demande de sursis à statuer qu'il présente ne peut relever du sursis obligatoire de l'alinéa 2 de l'article 4 du code de procédure pénale.
En effet, l'action dont la cour est saisie n'est pas l'action civile en réparation des dommages causés par les infractions visées par la plainte avec constitution de partie civile, mais une action en responsabilité civile professionnelle exercée contre la SCP L.-J. et ses membres, fondée sur de nombreux manquements allégués à leurs obligations professionnelles et l'action n'a pas pour objet direct de réparer les conséquences dommageables des infractions visées par la plainte.
En conséquence, la demande de sursis à statuer relève des prévisions de l'article 4, alinéa 3, du code de procédure pénale et du pouvoir discrétionnaire du juge.
L'action en responsabilité exercée contre Mes L. et J. et la SCP L. J. suppose l'examen des diligences et actes menés par l'administrateur judiciaire dans le cadre de la procédure collective au regard des dispositions du code de commerce applicables et des principes gouvernant la mission de l'administrateur. La cour dispose en conséquence d'éléments d'appréciation suffisants pour statuer sur l'appel dont elle est saisie et il n'apparaît pas de bonne justice de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte avec constitution de partie civile.
- Sur la fin de non-recevoir soulevée par les intimés
Comme le relèvent à juste titre la SCP L.-J. et ses associés, M. Van E. a relevé appel du jugement en son nom personnel. La SCP BTSG, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société La tour d'Auvergne, n'a pas constitué avocat devant la cour.
Nul ne plaidant par procureur, M.Van E. est irrecevable en sa demande d'infirmation de la disposition du jugement qui a condamné la SCP BTSG à payer à la SCP L.-J. et à Mes L. et J. la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
D'ailleurs, si M. Van E. fait état dans le corps de ses conclusions de préjudices prétendument subis par la société La tour d'Auvergne, il ne forme à juste titre aucune demande de dommages-intérêts au nom de la société dans le dispositif de ses écritures et se limite à demander paiement de dommages-intérêts pour son compte personnel.
- Sur les fautes reprochées à la SCP L.-J. et à ses membres
L'action exercée par M. Van E. est une action en responsabilité professionnelle fondée sur l'article 1382 du code civil. Pour être accueillie, elle suppose donc la preuve d'une ou plusieurs fautes de l'administrateur ayant causé des préjudices établis dans leur principe comme dans leur quantum.
S'agissant des refus d'exécuter sa mission imputée à l'administrateur judiciaire :
Contrairement aux allégations de M. Van E., la SCP L.-J. a établi le diagnostic qui lui incombait au sein du document intitulé bilan économique et social daté du 24 juillet 2006 ; aucune disposition légale ou réglementaire ne lui imposait de l'établir sur un support séparé. L'administrateur judiciaire y analyse notamment la situation financière, économique et sociale de l'entreprise et étudie plusieurs ratios de gestion en donnant des perspectives de redressement. Il s'est ainsi conformé aux prescriptions des articles L. 623-1 et L.623-3 du code de commerce rendues applicables au redressement judiciaire par l'article L.631-18 du même code.
Il ne peut davantage être prétendu que l'administrateur n'a organisé aucune réunion de travail avec le débiteur alors qu'il résulte au moins d'une lettre de la société La tour d'Auvergne à la SCP L.-J. en date du 19 septembre 2006 qu'une réunion avait eu lieu entre elles dans les locaux de la SCP L.-J. le 18 juin 2006.
Quant à l'absence de visite de l'administrateur au restaurant exploité par la société débitrice, il n'est pas en lui-même fautif et M. Van E. ne précise pas en quoi cette abstention aurait été préjudiciable.
Les rapports et notes ultérieurs de l'administrateur dressent des constats et livrent des analyses circonstanciées, motivées et nuancées de la situation de la société débitrice et les informations et avis de l'administrateur qui y figurent, tous transmis au chef d'entreprise, ont donné lieu de sa part ou de celle de son conseil à des notes de commentaires et des mises au point soumises au tribunal qui n'a d'ailleurs pas suivi, dans un premier temps, l'avis des mandataires judiciaires puisqu'il a prolongé la période d'observation comme le lui demandait le débiteur et a adopté le plan de continuation que celui-ci présentait seul. Aucun des écrits émanant de la SCP L.-J. versés au dossier ne recèle de fausses déclarations, ni d'éléments de nature à tromper les juridictions.
Quant à la méconnaissance par la SCP L.-J. des finalités de sa mission, elle n'est pas davantage caractérisée par le fait que l'administrateur n'a pas présenté de plan de continuation conjointement avec le débiteur. En effet, il résulte des rapports et notes établis par la SCP L.-J. que cette dernière est rapidement devenue circonspecte quant aux chances de succès d'un plan de continuation et qu'elle privilégiait la recherche de repreneurs. Il est loisible pour l'administrateur judiciaire d'avoir une opinion divergente de celle du chef d'entreprise et il est même de son devoir d'attirer l'attention du tribunal sur les risques d'un maintien en redressement judiciaire, de création d'un passif de la procédure ou sur le manque de crédibilité d'une solution de continuation.
Il est faux de prétendre que l'administrateur a, de manière contradictoire, sollicité la prolongation de la période d'observation ; en effet, le 17 octobre 2006, il faisait état d'une possible conversion en liquidation judiciaire et ne demandait pas en tous cas la prolongation de la période d'observation sans toutefois s'y opposer formellement. Cette prolongation a été accordée par le tribunal sur la demande du débiteur. C'est également sur la demande du débiteur, cette fois appuyée par l'administrateur, que le tribunal a de nouveau prolongé la période d'observation le 5 juin 2007.
M. Van E. est dès lors malvenu de reprocher à la SCP L.-J. des prorogations de la période d'observation qu'il a lui-même sollicitées et qui lui ont permis de présenter et de voir adopter le plan de continuation auquel il tenait.
S'agissant des reproches faits à l'administrateur quant à son action relative aux créances contestées :
Il est établi que la société débitrice entendait contester la validité du taux effectif global pratiqué par la banque Fortis. La SCP L.-J. a, dans un premier temps, appuyé sa contestation en recherchant une solution amiable avec la banque puis a donné son accord à l'avocat de la société La tour d'Auvergne pour demander en référé la désignation d'un expert judiciaire, ce qui a été obtenu. M. A., expert désigné, a été contraint de déposer son rapport en l'état faute d'avoir obtenu le versement d'une consignation complémentaire. Ce défaut de versement ne peut être imputé à faute à la SCP L.-J. qui indique, sans être démentie, qu'elle ne disposait pas de fonds pour verser le complément requis par l'expert.
Dans ces conditions, le juge-commissaire a prononcé l'admission de la créance de la banque Fortis par ordonnance du 3 mai 2007 sur proposition du mandataire judiciaire et alors que l'administrateur ne formulait pas d'observations'.
Quant à l'absence d'action en responsabilité contre la banque diligentée par l'administrateur, elle ne peut lui être reprochée, tant au regard de l'insuffisance des preuves résultant d'une expertise non menée à son terme qu'en considération du manque de disponibilités pour financer une telle action au résultat aléatoire.
Le déroulement du litige qui a opposé la société débitrice à la banque Fortis ne fait apparaître aucune faute ni manquement de l'administrateur à sa mission.
M. Van E. reproche encore à l'administrateur d'avoir proposé l'admission des créances déclarées par Mme C. et M. G. qui ont finalement été rejetées par arrêt infirmatif de la cour d'appel de Versailles du 26 juin 2008.
Mais le grief n'est pas avéré dans la mesure où les ordonnances d'admission rendues par le juge-commissaire le 13 mars 2007 ne sont pas versées au dossier, de sorte que la position adoptée devant le juge-commissaire par l'administrateur, qui soutient s'en être rapporté, n'est pas établie. En tout cas, la lecture des arrêts infirmatifs du 26 juin 2008 démontre qu'au moins devant la cour, la SCP L.-J. s'en est effectivement rapportée à justice.
Ainsi, il n'est aucunement démontré que la SCP L.-J. ait proposé l'admission de ces créances en première instance et dans la mesure où le mandataire était en tout état de cause favorable à leur admission, les frais d'appel exposés par M. Van E. ne peuvent être imputés à la position de l'administrateur.
En outre, comme l'ont pertinemment retenu les premiers juges, la position de l'administrateur n'a pas été préjudiciable à la société débitrice puisque les créances en cause ont été rejetées par la cour d'appel.
M. Van E. reproche encore à la SCP L.-J. d'avoir entrepris des diligences inutiles et coûteuses relatives à l'extension de la procédure collective à la SCI Carnot 6 voire à la société Mind over money finalement interrompues après l'engagement de frais, notamment de consignation d'expertise.
Comme le rappelle l'administrateur, cette demande d'expertise judiciaire a été faite conjointement avec le mandataire judiciaire et les anomalies comptables relevées par le propre expert-comptable de la société La tour d'Auvergne, M. D., et signalées à l'administrateur judiciaire, justifiaient amplement les investigations entreprises qui n'ont pas abouti du fait de l'impossibilité dans laquelle s'est trouvée l'expert judiciaire, Mme C.-T., de poursuivre ses travaux en raison de la défaillance du dirigeant de la société La tour d'Auvergne dans la transmission des documents demandés par l'expert et énumérés en page 9 du rapport déposé en l'état à la demande du juge-commissaire le 5 novembre 2007, le refus réitéré de M. Van E. de communiquer les documents requis ayant été constaté lors d'une audience du 30 octobre 2007.
M. Van E. est donc malvenu de reprocher à l'administrateur d'avoir exposé des frais conformes à l'intérêt de l'entreprise et qui ne sont devenus inutiles qu'en raison de sa propre carence.
Le refus de modification du plan et la liquidation judiciaire :
La SCP L.-J., devenue commissaire à l'exécution du plan, qui constatait la création d'un passif postérieur à l'ouverture du redressement judiciaire mis en évidence par le rapport de l'enquête confiée à Me S. et un état de cessation des paiements survenu en cours d'exécution du plan, ne pouvait donner son accord sur la modification du plan souhaitée par le débiteur et ne pouvait que se prononcer en faveur de la conversion de la procédure en liquidation judiciaire, sauf à manquer à ses obligations professionnelles.
Aucune faute ne peut être imputée à la SCP L.-J. et M. Van E. soutient, contre l'évidence et sans aucune preuve à l'appui de son affirmation, que le passif postérieur n'était pas caractérisé ou qu'il avait été payé.
Les observations développées par l'appelant sont en effet contredites en tous points par l'arrêt devenu irrévocable rendu par cette cour le 22 octobre 2009 qui a confirmé le jugement du 31 mars 2009 ayant prononcé la résolution du plan, constaté la cessation des paiements et prononcé la liquidation judiciaire de la société La tour d'Auvergne. Il résulte de cet arrêt que les trimestrialités du plan étaient impayées depuis juillet 2008, que le passif créé après le jugement d'ouverture était de 255 416 euros, la cour a en outre écarté la réalité de paiements survenus depuis le jugement de liquidation judiciaire et constaté que l'actif disponible était au mieux égal à 100 000 euros, ce qui démontrait la persistance de la cessation des paiements au jour où elle statuait.
Ainsi, la SCP L.-J. n'a aucune responsabilité dans la résolution du plan et le prononcé de la liquidation judiciaire survenus.
Les griefs financiers
Le litige opposant les parties sur les honoraires de la SCP L.-J. a fait l'objet d'une instance distincte dont est saisie la cour d'appel de Paris sur renvoi après cassation.
Dans le cadre du présent litige, M. Van E. reproche à l'administrateur judiciaire d'avoir privilégié son intérêt financier en prolongeant artificiellement la période d'observation puis en demandant rémunération pour l'adoption du plan qu'il avait refusé d'établir et en privilégiant la liquidation par voie de cession plus rémunératrice.
Outre que l'appelant ne rapporte aucune preuve chiffrée du gain que les options prises par l'administrateur lui auraient procuré, il faut rappeler que la perception d'une rémunération pour l'adoption du plan a été irrévocablement validée par l'arrêt de la Cour de cassation du 8 juin 2010 et ne peut donc être considérée comme fautive, renvoyer aux motifs qui précèdent quant à la prolongation de la période d'observation qui répondait d'abord à la demande de la société débitrice et enfin souligner que depuis la réforme du tarif des administrateurs judiciaires par le décret du 23 décembre 2006, l'avantage tarifaire résultant de la cession de l'entreprise a été significativement minoré tandis que celui résultant de l'arrêté d'un plan a été également significativement majoré.
En tout état de cause, il a déjà été indiqué que les positions prises par la SCP L.-J. tout au long de la procédure ont été conformes aux textes régissant sa mission et à ses obligations déontologiques et les motifs qui précèdent ajoutés à ceux pertinents des premiers juges que la cour fait siens permettent de conclure à l'absence de toute faute de la SCP L.-J. et de ses associés susceptibles d'engager sa responsabilité.
L'examen des préjudices avancés par M. Van E. est en conséquence sans objet et l'appelant doit être débouté de toutes ses demandes.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Rejette la demande de sursis à statuer,
Déclare irrecevable la demande de M. Van E. tendant à voir infirmer la disposition du jugement ayant condamné la SCP BTSG à payer à la SCP L.-J., à Mes L. et J. la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 5 juillet 2012 par le tribunal de grande instance de Nanterre,
Y ajoutant,
Déboute M. Van E. de toutes ses demandes,
Condamne M. Van E. à payer à la SCP L.-J., Me L. et Me J. la somme globale de 6 000 euros au titre des frais d'appel non compris dans les dépens,
Condamne M. Van E. aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.