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Décisions

Cass. 3e civ., 9 février 2005, n° 03-19.609

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

M. Betoulle

Avocat général :

M. Bruntz

Avocats :

Me Le Prado, SCP Monod et Colin

Amiens, du 4 juill. 2003

4 juillet 2003

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 4 juillet 2003), que M. X et Mlle Y, titulaires d'un bail portant sur des locaux à usage commercial appartenant à Mmes Z et A, ont assigné ces dernières en paiement de dommages et intérêts représentant le coût de travaux de remise en état des lieux loués affectés de graves désordres ainsi que l'indemnisation de leur préjudice commercial ;

Attendu que M. X et Mlle Y font grief à l'arrêt de dire que Mmes Z et Mme A supporteront dans la proportion de 50 % et jusquà concurrence de la somme de 32 595,25 euros le coût des travaux relatifs à la réfection du plancher haut du premier étage et du plancher haut du rez-de-chaussée tels que décrits par l'expert dans son rapport et que M. X et Mlle Y devront exécuter à leurs frais pour l'autre moitié alors, selon le moyen :

1°) qu'il appartient au propriétaire de veiller d'une façon constante, et sans avoir à en être informé par son locataire de la nécessité des travaux à effectuer, à l'entretien de son immeuble, c'est-à-dire à la réparation des outrages naturels du temps et de l'usure normale due à l'action des éléments ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que les désordres affectant les planchers du premier étage et du rez-de-chaussée, qui constituent des travaux entrant dans la catégorie des travaux énumérés à l'article 606 du Code civil, sont dus à la dislocation des planchers et cloisons, c'est-à-dire à l'usure ; qu'en condamnant les locataires à payer la moitié des réparations au prétexte qu'ils n'auraient pas averti suffisamment tôt les bailleresses de l'affaissement des planchers et du pourrissement des poutres, bien qu'il appartenait aux bailleresses de veiller de façon constante aux conséquences de l'usure de l'ouvrage loué, la cour d'appel a violé l'article 1719 du Code civil ;

2°) que le propriétaire doit connaître l'état des murs qu'il loue; que dans leurs conclusions d'appel, les locataires faisaient valoir que les bailleresses connaissaient l'état des murs qu'elles louaient et versaient aux débats l'acte notarié de cession du fonds de commerce du 7 mars 1991 dans lequel figure en annexe la copie d'un jugement du 24 juin 1988 du tribunal de grande instance de Senlis qui opposait les précédents locataires aux bailleresses où il est fait état de la vétusté de l'immeuble ; qu'en affirmant sans plus d'explications que les bailleresses ignoraient l'état de vétusté de leur immeuble existant en 1991, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1719 du Code civil ;

3°) que dans leurs conclusions d'appel, les locataires faisaient état d'une lettre du 14 mai 1994 adressée par M. X aux bailleresses, mentionnant des nombreuses fissurations sur les chambres du deuxième étage, le plancher, ainsi que la terrasse de la salle de restaurant, sur laquelle il y a de nombreux problèmes d'infiltration d'eau ;

d'où il s'ensuit qu'en affirmant que les preneurs n'avaient averti les bailleresses de l'affaissement du plancher du deuxième étage que par lettre du 8 décembre 1999 et du pourrissement des poutres maîtresses que par lettre du 14 mars 2000, la cour d'appel a dénaturé par omission la lettre du 14 mai 1994 en violation de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les preneurs avaient attendu au moins huit ans avant d'avertir les bailleresses de l'affaissement des planchers, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui a répondu aux conclusions, a pu en déduire que les locataires avaient commis une faute ayant contribué à la réalisation des désordres et qu'il convenait de les condamner à prendre en charge, dans une proportion qu'elle a souverainement appréciée, la remise en état des planchers hauts du rez-de-chaussée et du premier étage ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'ya pas lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident qui ne serait pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.