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Décisions

Cass. 3e civ., 13 décembre 2018, n° 17-28.055

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Société de gestion hôtelière La Coupole (SARL), BR Associés (SCP)

Défendeur :

Société des Fourches (SCI), Vendredi (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Thouin-Palat et Boucard

Aix-en-Provence, 11e ch. A, du 21 sept. …

21 septembre 2017

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 septembre 2017), que la SCI La Coupole (la SCI), devenue la Société Méridionale d'Investissement, a fait édifier une résidence dont les lots ont été commercialisés sous la forme de vente en l'état futur d'achèvement, acquisitions éligibles au dispositif fiscal dit Périssol ; que les propriétaires des lots ont consenti à la société de Gestion Hôtelière La Coupole (la SGH) des baux commerciaux d’une durée de neuf ans ; que, les 28 février et 28 mars 2007, ils lui ont donné congé avec refus de renouvellement et de paiement d’une indemnité d'éviction ; que, le 31 juillet 2008, ils l’ont assignée en validité des congés, en résiliation des baux et en paiement d’arriérés d’indemnités d’occupation indexées et assujetties à la taxe à la valeur ajoutée ; que la SGH a sollicité une mesure d’expertise aux fins d’évaluer le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d'occupation ainsi que le remboursement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ;

Sur la recevabilité du premier moyen, contestée par la défense :

Attendu que les propriétaires bailleurs soulèvent l’irrecevabilité du moyen en faisant valoir que les décisions avant-dire-droit ne peuvent être frappées de pourvoi indépendamment du jugement sur le fond ;

Mais attendu qu’en confirmant, dans son dispositif, le jugement en ce qu’il a donné mission à l’expert de donner tout élément technique relatif à l’indemnité d’occupation devant correspondre à la valeur locative à compter du 30 mars 2015, date de la première demande de fixation judiciaire de cette valeur, l’arrêt a tranché une partie du principal, de sorte que le moyen est recevable ;

Sur la recevabilité du deuxième moyen, contestée par la défense :

Vu les articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile ;

Attendu que, sauf dans les cas spécifiés par la loi, les jugements en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l’instance ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation indépendamment du jugement sur le fond que s’ils tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal ;

Attendu que, si l’arrêt tranche une partie du principal, le moyen n’est dirigé qu’à l’encontre du chef de dispositif qui alloue des provisions aux propriétaires bailleurs dans l’attente de l’exécution de la mesure d’expertise de sorte que le moyen est irrecevable ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SGH fait grief à l’arrêt de décider que les condamnations prononcées à titre provisionnel à son encontre au profit des copropriétaires bailleurs, à titre d’arriéré hors taxes et hors charges, à valoir sur l’indemnité d’occupation statutaire pour les périodes du trimestre 2007 au 3ème trimestre 2016 et du 2ème trimestre 2008 au 1er trimestre 2017, et à titre d’indemnité d’occupation, hors taxes, à compter du 4ème trimestre 2016 ou du 2ème trimestre 2017, à valoir sur l’indemnité d’occupation statutaire jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction, seront majorées de la TVA applicable ;

Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que l’article 16 des baux stipule que le loyer sera majoré de la TVA en application de l’article 261 D 4° du code général des impôts et que le maintien dans les lieux de la société locataire jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction s’opérerait aux clauses et conditions des baux expirés, la cour d’appel en a exactement déduit, sans excéder sa compétence, que la SGH ne pouvait s’exonérer du paiement de la TVA ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l’article L. 145-28 du code de commerce ;

Attendu que, pour donner mission à l’expert de limiter l’évaluation de la valeur locative à compter du 30 mars 2015, l’arrêt retient, par motifs adoptés, que les copropriétaires bailleurs n’ont pas formé de demande, que l’indemnité d’occupation statutaire doit être égale au montant du dernier loyer contractuel et que, le 30 mars 2015, la SGH a sollicité la fixation de cette indemnité à la valeur locative ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’indemnité d’occupation, qui est distincte du loyer auquel elle se substitue de plein droit dès la résiliation du bail jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction, doit, à défaut de convention contraire, correspondre à la valeur locative des lieux, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le quatrième moyen :

Vu l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour rejeter la demande de la SGH en remboursement de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères et la condamner au paiement de cette taxe, l’arrêt retient que celle-ci correspond à des services dont la SGH profite ;

Qu’en statuant ainsi, après avoir constaté que les baux ne contenaient aucune stipulation spécifique visant expressément cette taxe, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il donne mission à l’expert judiciaire de donner tout élément technique et de fait relatif à l’indemnité d’occupation devant correspondre à la valeur locative due par elle à chacun des copropriétaires bailleurs, lot par lot, et ce, à compter du 30 mars 2015, date de la première demande de fixation judiciaire de la valeur locative et en ce qu’il rejette la demande de la société S.G.H en remboursement de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, l'arrêt rendu le 21 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.