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Décisions

Cass. com., 21 juin 2005, n° 02-17.721

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Pau, du 27 mai 2002

27 mai 2002

 

Attendu, selon l'arrêt déféré, rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 19 octobre 1999, Bull. IV, n° 167), que la Société générale (la banque) a, en mai 1988, consenti un crédit à la société X (la société) ; que M. X, Mme X et Mme Y ont souscrit au profit de la banque un cautionnement solidaire à concurrence de 1 300 000 francs ;

qu'à la suite de la dénonciation de son cautionnement par Mme Y, la banque a invité les trois cautions à payer la dette de la société ; que, pour isoler les engagements garantis, la banque a ouvert un nouveau compte destiné à comptabiliser les opérations nouvelles ;

que le 1er août 1989, la banque a rejeté des chèques et, le 24 août 1989, a assigné la société en paiement de la somme de 2 739 383,60 francs et chacune des trois cautions en exécution de leur engagement ; que la société a été mise en redressement judiciaire le 5 septembre 1989 ; que le représentant des créanciers a engagé une action en responsabilité contre la banque, en lui reprochant la rupture de ses crédits sans préavis ; que le plan de continuation de la société ayant été arrêté le 18 juin 1991, M. Z, commissaire à l'exécution du plan, a poursuivi l'action engagée contre la banque ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Z, désigné mandataire ad hoc pour poursuivre l'instance, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes contre la banque, alors, selon le moyen, que la cour d'appel ne pouvait tout à la fois énoncer dans les motifs de sa décision que M. Z, ès qualités, était irrecevable à agir et dans le dispositif de sa décision, confirmer le jugement du 6 juillet 1992 qui avait déclaré recevable la demande de M. Z, ès qualités, à l'encontre de la banque ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que M. Z est sans intérêt à critiquer pour contradiction l'arrêt qui, dans son dispositif, confirme un jugement qui avait déclaré son action recevable ; que le moyen est irrecevable ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1382 du Code civil, L. 621-39 et L. 621-68 du Code de commerce ;

Attendu, selon ces textes, que le représentant des créanciers et, après le jugement ayant arrêté le plan de redressement de l'entreprise, le commissaire à l'exécution du plan ont seuls qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers en réparation du préjudice résultant de la diminution d'actif ou de l'aggravation du passif du débiteur causé par la faute d'un tiers, auquel il est reproché d'avoir provoqué l'ouverture de la procédure collective en rompant ses concours sans préavis ;

Attendu que pour rejeter les demandes de M. Z contre la banque et le condamner à restituer à cette dernière les sommes reçues en exécution du jugement du 28 février 1994, l'arrêt retient que le préjudice calculé par l'expert est constitué de frais financiers théoriques liés à l'immobilisation des créances, qu'il est subi par chacun des créanciers de la société par suite des retards de règlement dus à la procédure collective, qu'il ne s'agit donc pas d'un préjudice collectif affectant le patrimoine de la société et que M. Z n'est en conséquence pas recevable à agir pour en obtenir réparation au profit de la société ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le préjudice invoqué, subi par l'ensemble des créanciers et constitué par l'immobilisation de leurs créances, inhérente à la procédure collective, s'analyse en un préjudice collectif dont seuls le représentant des créanciers puis le commissaire à l'exécution du plan ont qualité pour demander réparation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, réformant partiellement le jugement du 28 février 1994, il a débouté M. Z de toutes ses demandes contre la Société générale et l'a condamné à restituer à cette dernière les sommes versées en exécution de ce jugement, l'arrêt rendu le 27 mai 2002, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.