Cass. com., 6 mai 2003, n° 00-18.192
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Garnier
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Thomas-Raquin et Benabent, SCP Boré, Xavier et Boré
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 711-4 du Code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que le consentement donné par un associé fondateur, dont le nom est notoirement connu, à l'insertion de son patronyme dans la dénomination d'une société exerçant son activité dans le même domaine, ne saurait, sans accord de sa part et en l'absence de renonciation expresse ou tacite à ses droits patrimoniaux, autoriser la société à déposer ce patronyme à titre de marque pour désigner les mêmes produits ou services ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Alain X, chef cuisinier d'un restaurant auquel un guide gastronomique avait accordé un an auparavant "trois étoiles", a constitué avec deux autres associés la société Alain X diffusion (société ADD) en vue notamment de la "commercialisation de la ligne Alain X" ; qu'après constitution de cette société il a déposé la marque "Alain X" puis a racheté une marque comportant son nom et son prénom, déposée en 1988 par une tierce personne ; qu'ayant appris que la société ADD avait déposé deux marques comportant son patronyme, il a assigné celle-ci en nullité de ces dépôts effectués en fraude de ses droits ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X, l'arrêt relève que celui-ci, en sa qualité d'associé fondateur de la société ADD, lui a donné ipso facto l'autorisation de faire un usage commercial de son patronyme, qu'il a ainsi perdu l'usage de celui-ci qui est devenu par l'insertion dans les statuts de la société un signe distinctif qui s'est détaché de la personne physique qui le porte pour s'appliquer à la personne morale qu'il distingue et devenir un objet de propriété incorporelle, et que c'est dans le libre exercice de son droit de propriété sur le signe litigieux que la société ADD a déposé les marques ;
Attendu, qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'était ni établi, ni même allégué que M. X aurait renoncé à ses droits de propriété incorporelle sur son patronyme, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 avril 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.