Livv
Décisions

CA Montpellier, président, 2 avril 2014, n° 14/00019

MONTPELLIER

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Comptable des Finances Publiques du SIE

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tournier

T. com. Montpellier, du 10 janv. 2014

10 janvier 2014

FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le Comptable des Finances Publiques du Service des Impôts des Entreprises de Montpellier 1, dénommé SIE, assignait Monsieur Mohamed M. le 2 avril 2013 devant le tribunal de commerce de Montpellier, et par jugement du 10 janvier 2014 cette juridiction prononçait l'ouverture de la liquidation judiciaire, et fixait la date de cessation des paiements au 25 octobre 2013.

Monsieur Mohamed M. a relevé appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 24 janvier 2014, et le 29 janvier 2014 il assignait, parallèlement, le comptable public sur le fondement de l'article R. 661-1 al. 3 du Code de commerce.

Il soutient que :

- le jugement a violé les droits de la défense car il avait uniquement prétendu que la juridiction saisie était incompétente sans conclure au fond en application de l'article 76 du Code de procédure civile or le jugement a statué au fond sans qu'il puisse présenter ses observations,

- le jugement est nul car il n'a pas respecté le préalable spécifique dont il bénéficie en sa qualité d' agriculteur ce qui aurait nécessité la saisine préalable du président du Tribunal de grande instance afin de désigner un conciliateur.

En conséquence il demande l'arrêt immédiat de cette exécution provisoire.

Le Comptable Public demande le rejet des prétentions pour défaut d'articulation d'un moyen sérieux car il ne peut justifier d'une activité agricole ,maitre A. expose qu'aucun appel n'a été formalisé au principal en sorte que la Cour n'étant pas saisie est irrecevable la demande en référé de Monsieur M..

MOTIFS

Sur la recevabilité,

Attendu que Monsieur Mohamed M. a relevé appel du jugement par déclaration enregistrée au greffe le 24 janvier 2014 actuellement enregistrée sous le numéro RG 14/603 ; que cette affaire est d'ailleurs fixée à l'audience des plaidoiries le 8 avril 2014 à 13 h 45 ;

Attendu que la saisine de la juridiction du Premier président est donc recevable ;

Sur l'intérêt à agir,

Attendu que sont applicables les dispositions de l'article R. 661-1, modifié en dernier lieu par l'article 7 du décret 2009-1661 du 28 décembre 2009 selon lequel :

* les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires sont exécutoires de plein droit à titre provisoire,

* par dérogation aux dispositions de l'article 524 du Code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire que des décisions mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 5°, 6° et 8° du I de l'article L. 661-1, et lorsque les moyens invoqués à l'appui de l'appel paraissent sérieux,

* dans les mêmes conditions, le premier président de la cour d'appel peut arrêter l'exécution provisoire des décisions qui ne sont pas exécutoires de plein droit,

* l'exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 peut être arrêtée, en outre, lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

* en cas d'appel du ministère public d'un jugement mentionné aux articles L. 661-1, à l'exception du jugement statuant sur l'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, L. 661-6 et L. 661-11, l'exécution provisoire est arrêtée de plein droit à compter du jour de cet appel ;

Attendu qu'en l'espèce s'appliquent les dispositions selon lesquelles par dérogation à l'article 524 du Code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire que lorsque les moyens invoqués à l'appui de l'appel paraissent sérieux ;

Attendu que le Comptable Public prétend que Monsieur M. a formé un appel général à l'encontre du jugement du 10 janvier 2014, entrainant une dévolution s'opérant pour le tout l'appel n'étant pas limité à certains chefs ; qu'ainsi à supposer que la Cour annule le jugement, elle a l'obligation par l'effet dévolutif de statuer au fond, en sorte que ce moyen n'est pas sérieux ;

Attendu que, toutefois, cette démarche procédurale du juge du fond n'annihile pas, à elle seule, l'intérêt à agir de Monsieur M. qui invoquer une violation des droits de la défense dans le cadre de la présente instance afin d'obtenir un arrêt de l'exécution provisoire ; que cette argumentation du Comptable Public n'est donc pas fondée ;

Sur la nullité du jugement,

Attendu que Monsieur M. a soulevé en première instance une incompétence du tribunal saisi car selon lui seul le tribunal de grande instance était compétent en raison de l'exercice de son activité d'agriculteur en application des articles L. 640-2 et L. 621-2 du Code de commerce ; qu'il demandait donc un renvoi devant cette juridiction ;

Attendu que, cependant, le jugement vise expressément les dispositions de l'article R. 662-6 selon lesquelles, par dérogation des règles sur les exceptions d'incompétence y compris l'article 76 du Code de procédure civile selon l'article R. 662-4, le tribunal s'il se déclare compétent statue au fond dans le même jugement ; que s'agissant de textes relevant du seul pouvoir réglementaire, le moyen tiré d'une contradiction avec une loi n'est pas un moyen sérieux ;

Attendu qu'enfin il appartenait à Monsieur M. de conclure au fond, même à titre subsidiaire, conformément à l'article R. 662-6 sans attendre qu'il lui soit demandé ses observations par la juridiction commerciale comme il est maintenant affirmé, la position de cette juridiction étant parfaitement connue et prévisible depuis la promulgation du décret de 2005, étant observé que la suppression d'un contredit de compétence, en cette matière, n'est pas de nature à porter atteinte à des droits fondamentaux ;

Attendu que ce dernier moyen n'est donc pas sérieux ;

Sur la qualité d'agriculteur,

Attendu que, selon les explications des parties, Monsieur M. exerce une activité d'entreprise de service aux cultures et son activité essentielle est de réaliser, pour plusieurs clients, tous les types de travaux dans les vignes, de la taille jusqu'aux vendanges, et accessoirement des travaux de débroussaillage et d'élagage ;

Attendu que selon le dernier alinéa de l'article L. 640-5 du Code de commerce la procédure de liquidation de biens ne peut être ouverte à l'égard d'un débiteur exerçant une activité agricole qui n'est pas constitué sous la forme d'une société commerciale que si le président du tribunal de grande instance a été saisi, préalablement à l'assignation, d'une demande tendant à la désignation d'un conciliateur présentée en application de l'article L. 351-2 du code rural et de la pêche maritime ;

Attendu que selon l'article L. 311-1 du Code rural sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation ;

Attendu qu'en outre selon l'article L311-2 toute personne physique ou morale exerçant à titre habituel des activités réputées agricoles au sens de l'article L. 311-1, à l'exception des cultures marines et des activités forestières, est immatriculée, sur sa déclaration, à un registre de l'agriculture, accessible au public, tenu par la chambre d'agriculture dans le ressort de laquelle est situé le siège de l'exploitation ; que sa déclaration doit mentionner la forme juridique et la consistance de la ou des exploitations sur lesquelles elle exerce ces activités ;

Attendu que selon les pièces produites d'une part Monsieur M. n'a jamais été immatriculé à un registre de l'agriculture tenu par la chambre d'agriculture, d'autre part a choisi de s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés; qu'enfin il reconnait lui-même qu'il est prestataire de services et non exploitant agricole ;

Attendu qu'en l'absence d'éléments indiscutables, précis et concordants, établissant que son activité correspond, selon des critères cumulatifs, à une maîtrise et à une exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle, le moyen invoqué par Monsieur M. n'est pas sérieux ;

Attendu qu'il convient donc de rejeter les demandes ;

Attendu qu'il parait équitable que chacune des parties supporte ses frais non compris dans les dépens et exposés pour la présente instance ;

Vu l'article 696 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Rejetons la demande tendant à obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire dont est assorti de droit le jugement prononçant une liquidation judiciaire et rendu entre les parties le 13 janvier 2014 par le Tribunal de commerce de Montpellier,

Rejetons les prétentions au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamnons Monsieur Mohammed M. aux dépens de la présente instance en référé.