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Décisions

Cass. com., 6 mai 2014, n° 13-16.470

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Pierre Fabre dermo-cosmétique (Sté)

Défendeur :

Clairjoie (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Paris, du 30 janv. 2013

30 janvier 2013

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 janvier 2013), que la société Pierre Fabre dermo-cosmétique (la société Pierre Fabre) est titulaire de la marque française verbale « Argane » déposée le 22 avril 1983, enregistrée sous le numéro 1 234 523 et régulièrement renouvelée, pour désigner en classes 3 et 5 les produits cosmétiques pour l'hygiène et les soins de la peau, à l'exception du cuir chevelu, les produits pour l'hygiène et les soins de la peau, à l'exception du cuir chevelu ; qu'après avoir fait établir la commercialisation par la société Clairjoie d'un baume de soins sous la dénomination « Karité-Argane », la société Pierre Fabre l'a assignée en contrefaçon de la marque précitée ; que la société Clairjoie a reconventionnellement sollicité la nullité de ladite marque pour dépôt frauduleux et défaut de caractère distinctif ;

Attendu que la société Pierre Fabre fait grief à l'arrêt d'avoir annulé la marque pour l'ensemble des produits désignés en classes 3 et 5, alors, selon le moyen :

1°) qu'une marque verbale est distinctive si, au moment de son dépôt, la dénomination enregistrée n'est pas employée dans le langage courant d'une partie notable du public concerné pour désigner les produits ou services visés à la demande d'enregistrement ou pour décrire leur qualité essentielle ; qu'en se référant exclusivement à des ouvrages spécialisés, à des dictionnaires de langue française également destiné à un public spécialisé, très antérieurs à la date du dépôt de la marque, et à une unique citation extraite d'un ouvrage consacré au monde arabe, pour exclure le caractère distinctif de la dénomination « Argane », mot d'origine arabe, sans aucune référence à la perception que pouvaient avoir les intéressés, c'est-à-dire les consommateurs français des produits cosmétiques, de ce terme, à la date du dépôt de la marque, l'arrêt attaqué a violé l'article 3 de la loi du 31 décembre 1964 ;

2°) qu'une marque n'est générique ou nécessaire que lorsque le signe qui la compose indique, dans le langage courant du public concerné, la catégorie des biens à laquelle le produit appartient ou lorsque son emploi est exigé pour la désignation du produit ; que l'arrêt ne constate nulle part que le terme « argane » désignait, au moment de son dépôt et pour le grand public français concerné, la catégorie à laquelle appartiennent les produits cosmétiques pour l'hygiène et les soins de la peau, ni que son emploi était exigé pour la désignation de ce type de produits ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 3 de la loi du 31 décembre 1964 ;

3°) qu'en ne recherchant pas en quoi le terme « argane » employé seul était, au moment de son dépôt et pour le grand public français concerné, la désignation usuelle et courante de l'extrait lipidique issu du fruit de l'arganier entrant dans la composition des produits cosmétiques, la cour d'appel, qui a ainsi confondu le caractère simplement évocateur de la marque avec son caractère descriptif, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1964 ;

Mais attendu que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que la marque en cause est exclusivement composée du terme « argane », mot, d'origine arabe, orthographié également « argan », qui est répertorié depuis le 19e siècle dans des dictionnaires de langue française destinés au grand public et dans différents ouvrages rédigés en français, pour désigner un arbre ou un arbrisseau ainsi que son fruit dont est extraite une huile, dénommée « huile d'argane » ou « huile d'argan », utilisée, dès cette époque, pour la fabrication du savon ; qu'il en déduit qu'à la date du dépôt, ce terme constituait la désignation nécessaire et générique d'une substance végétale employée pour l'hygiène et les soins de la peau qui devait demeurer à la libre disposition des acteurs de l'activité économique concernée désireux de l'introduire dans la composition de leurs produits ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines desquelles il résulte que ce terme était exclusivement descriptif de la composition des produits désignés par la marque, la cour d'appel, qui s'est déterminée par rapport au public concerné par ces derniers et qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.