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Décisions

Cass. com., 31 janvier 2018, n° 16-10.761

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Adidas France, Adidas AG

Défendeur :

Promotex (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Paris, du 23 octobre 2015

23 octobre 2015

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Adidas France et la société Adidas AG, respectivement titulaires de la marque française figurative n° 1 569 217, déposée le 29 novembre 1988 et régulièrement renouvelée, et de la marque communautaire figurative n° 003517661, déposée le 3 novembre 2003, pour désigner, en classe 25, des vêtements de sport, ayant été informées d'une retenue douanière de modèles de pantalons de sport susceptibles de porter atteinte à leurs droits, ont assigné la société Promotex, destinataire des marchandises, en contrefaçon de marques et, subsidiairement, pour atteinte aux marques renommées ; que la société Promotex a reconventionnellement demandé la déchéance des droits de la société Adidas France sur la marque française n° 1 569 217 à compter du 8 juin 1995 ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que la déchéance des droits attachés à la marque n'est pas encourue si son usage sérieux a commencé ou repris plus de trois mois avant la demande en déchéance, lors même que cette marque n'avait pas fait l'objet d'un tel usage durant une période ininterrompue de cinq ans ;

Attendu que pour prononcer la déchéance, à compter du 8 juin 1995, des droits de la société Adidas France sur la marque française n° 1 569 217, l'arrêt retient que, la déchéance étant sollicitée à compter du 8 juin 1995, la période de référence à considérer est celle allant du 8 juin 1990 au 8 juin 1995 et qu'à l'exception du catalogue printemps/été 1990 et de l'extrait du magazine Le Nouvel Economiste daté du 10 mars 1995, insuffisants à établir un usage sérieux de la marque auprès de la clientèle durant cette période, l'ensemble des autres documents produits couvrent une période postérieure à celle considérée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la demande en déchéance avait été formée en cause d'appel, soit, au plus tôt, après le 30 juin 2010, et que le titulaire de la marque soutenait avoir fait un usage constant de celle-ci pour les vêtements de sport, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 9, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire et L. 717-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que la notoriété de la marque est un facteur pertinent de l'appréciation du risque de confusion, en ce qu'elle confère à cette marque un caractère distinctif particulier et lui ouvre une protection étendue ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société Adidas AG en contrefaçon de la marque communautaire n° 003517661, l'arrêt retient que, nonobstant l'identité ou la similarité des produits concernés, la faible similitude entre les signes en cause pris dans leur ensemble exclut tout risque de confusion pour le consommateur d'attention moyenne et que, si la notoriété de la marque invoquée est susceptible d'influer sur l'appréciation du risque de confusion, cette notoriété ne peut dispenser de rechercher s'il existe entre les signes opposés un risque de confusion ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant relevé que les signes en conflit présentaient une certaine similitude, même faible, il lui incombait de procéder à une appréciation globale du risque de confusion prenant en considération la notoriété de la marque antérieure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur ce moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 9, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire et L. 717-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société Adidas AG fondée sur l'atteinte à la marque renommée, l'arrêt retient que le signe incriminé présentant peu de similitudes avec la marque communautaire invoquée, il n'évoquera pas celle-ci pour le consommateur normalement avisé, lequel ne sera donc pas amené à établir un lien entre ce signe et la marque ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant relevé que la renommée de la marque invoquée n'était pas contestée par la société Promotex, il lui appartenait de se livrer à une appréciation globale de l'existence du lien qui pouvait être fait dans l'esprit du public entre le signe incriminé et la marque renommée antérieure prenant en compte l'intensité de la renommée de ladite marque, le degré de son caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l'usage, ainsi que la similitude, sinon l'identité, des produits en cause, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il prononce la déchéance, à compter du 8 juin 1995, des droits de la société Adidas France sur la marque française n° 1 569 217, rejette l'ensemble des demandes des sociétés Adidas France et Adidas AG fondées sur la contrefaçon et les marques renommées, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.