CA Douai, 2e ch., sect. 1, 6 juillet 2017, n° 16/03433
DOUAI
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SCI Olympos
Défendeur :
Foncia Nord Pas de Calais (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Prigent
Conseillers :
Mme Vercruysse, Mme Aldigé
Par acte du 23 octobre 2009, la SCI Olympos a donné à bail à la société Tagerim Nord Pas de Calais, devenue Foncia Nord Pas de Calais, un local à usage commercial, sis [...]. Le bail a été consenti pour une durée de neuf ans à compter du 15 novembre 2009 jusqu'au 14 novembre 2018 moyennant un loyer annuel de 60 000 euros HT.
Par acte en date du 3 janvier 2013, le bailleur a notifié au preneur une demande de révision triennale sur le fondement des articles L. 145-37 et L. 145-38 du code de commerce. Par courrier en réponse du 3 avril 2013, le preneur a fait connaître son refus à cette demande.
Par acte du 24 juin 2013, la SCI Olympos a saisi le juge des loyers commerciaux aux fins d'obtenir la fixation du loyer révisé à la date du 3 janvier 2013 à la somme de 133 110 euros HT.
Par un jugement avant dire droit du 2 juin 2014, le juge des loyers commerciaux a ordonné une expertise afin d'évaluer la valeur locative des lieux et de préciser l'existence d'une éventuelle évolution de plus de 10% de la valeur locative sur la période du 15 novembre 2009 au 3 janvier 2013 qu'il a confiée à M. Christophe D. L'expert judiciaire a rendu son rapport le 23 mars 2015.
Par jugement du 23 mai 2016, estimant que la modification matérielle des facteurs locaux de commercialité sur le commerce considéré n'était pas établie, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Lille a :
débouté la SCI Olympos de sa demande de révision du loyer fondée sur les dispositions de l'article L.145-8 du code de commerce,
dit que la révision ne peut s'effectuer que sur la base de l'évolution de l'indice de construction,
débouté la SCI Olympos du surplus de ses demandes,
débouté la SAS Foncia Nord Pas de Calais de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
condamné la SCI Olympos à payer à la société Foncia Nord pas de Calais la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la SCI Olympos aux dépens.
La SCI Olympos a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 23 décembre 2016, la SCI Olympos demande à la cour, sur le fondement des articles L.145-33, L.145-37, L.145-38 et R.145-20 et suivants du code de commerce, sous toutes réserves d'une éventuelle demande en résiliation du bail que le bailleur se réserve de solliciter dans le cadre de la procédure actuellement pendante devant le tribunal de grande instance de Lille, de :
infirmer le jugement,
débouter la SAS Foncia Nord Pas de Calais de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Statuant à nouveau,
fixer le loyer révisé à la date du 3 janvier 2013 à la somme annuelle de 133 385 euros HT et hors charges,
condamner la SAS Foncia Nord Pas de Calais au rappel de loyers à compter du 3 janvier 2013,
dire et juger que le loyer fixé portera intérêt au taux légal conformément aux dispositions de l'article 1155 du code civil, de plein droit à compter de l'exploit introductif d'instance,
dire et juger que les intérêts échus depuis plus d'un an produiront eux-mêmes intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,
condamner la SAS Foncia Nord Pas de Calais au paiement en première instance et en appel d'une somme respective de 5 700 euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en tenant compte :
des frais de gestion du dossier par la SCP Yves M.- Natacha M.- Florence M.- Isabelle C.-M.- Anne-Sophie V. pendant la durée de la procédure, estimés à 1 500 euros,
des honoraires de la SCP Yves M.- Natacha M.- Florence M.- Isabelle C.-M.- Anne-Sophie V. dans le cadre de la présente procédure, tenant compte de la durée de cette procédure et de la difficulté de l'affaire estimés à 3 500 euros HT, soit TTC 4 200 euros,
condamner la SAS Foncia Nord Pas de Calais (en cas de recouvrement forcé des condamnations mises à sa charge par la décision à intervenir), au paiement du droit proportionnel de l'huissier en application de l'article 10 du décret n°96-1080 du 12 décembre 1996 modifié par le décret n°2011-212 en date du 8 mars 2001,
condamner la SAS Foncia Nord Pas de Calais aux intérêts judiciaires,
vu l'article 1154 du code civil, prononcer la capitalisation des intérêts par périodes annuelles,
condamner la SAS Foncia Nord Pas de Calais aux frais et entiers dépens de première instance et d'appel en ceux y compris les dépens qui étaient réservés dans le jugement du 2 mai 2014 désignant expert et les frais d'expertise,
dire que pour les dépens d'appel, la SCP D.-F. sera autorisée à les recouvrer directement en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions signifiées le 18 avril 2017, la SAS Foncia demande à la cour, sur le fondement des articles L.145-1 et suivants du code de commerce et singulièrement les articles L.145-38 et R.145-6, de :
confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société Foncia Nord Pas de Calais de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire, et en ce qu'il a considéré qu'il existait une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité au sens du texte,
le réformer sur ces deux points,
dire et juger que les conditions de l'application des articles L.145-38 et R.145-6 du code de commerce ne sont pas réunies et que la SCI Olympos est défaillante dans la démonstration de la preuve qui lui incombe,
dire et juger que la révision du loyer ne peut se faire sur une autre base que celle de l'évolution de l'indice du coût de la construction,
A titre infiniment subsidiaire et pour le cas où la cour estimerait que le loyer doit être fixé à la valeur locative,
A titre principal :
dire et juger que le loyer doit être fixé selon la méthode bureaux-boutique à la somme de 63 130,24 euros HT et hors charges par an,
condamner la SCI Olympos à payer à la société Foncia :
le rappel des loyers à compter du 3 janvier 2013,
les intérêts qui courent de plein droit à compter du 3 janvier 2013 et subsidiairement à compter de la date du présent mémoire par application de l'article 1155 du code civil, au fur et à mesure des échéances entre l'ancien et le nouveau loyer,
dire et juger que les intérêts se capitaliseront conformément à l'article 1154 du code civil dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière,
A titre subsidiaire :
dire et juger que le loyer doit être fixé selon la méthode commerciale pour le tout à la somme de 68 867,50 euros HT et hors charges par an.
En tout état de cause,
débouter la SCI Olympos de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamner la SCI Olympos à payer à la société Foncia, eu égard à son attitude, une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,
condamner la SCI Olympos à payer à la société Foncia une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel, et confirmer les dispositions du jugement pour la procédure de première instance,
condamner la SCI Olympos aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des moyens, il est renvoyé aux dernières écritures des parties.
Pour la clarté des débats, il sera seulement indiqué que l'appelante soutient essentiellement que les critères du déplafonnement des loyers posés à l'article L.145-38 du code du commerce sont réunis dans la mesure où :
- à proximité immédiate du local commercial et sur le même trottoir, une large façade sans aucun commerce créait « une dent creuse » commerciale au moment de la conclusion du bail commercial, et la reconversion de la friche commerciale par la création de locaux commerciaux et l'implantation d'Intermarché en octobre 2010 et Altermove en janvier 2011 et d'une borne de vélos en libre service a indéniablement constitué une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité dans le quartier où est située l'agence immobilière en raison de la suppression de la friche commerciale et de la réhabilitation subséquente de l'attractivité de cette zone de la [...] ;
- c'est à tort que le juge des loyers commerciaux indique qu'il doit être démontré que la modification matérielle des facteurs locaux de commercialité visée à l'article L. 145-38 du code de commerce a un impact sur le commerce considéré conformément aux termes de l'article R.145-6 du code de commerce alors que cet élément ne figure pas dans les conditions très spécifiques posées par l'article L. 145-38 précité ;
- en tout état de cause, alors que la reconversion de la friche commerciale et l'implantation d'une borne de vélos en libre-service ont contribué à augmenter le passage et la fréquentation de cette section de la [...], c'est à tort que le juge des loyers commerciaux a estimé que cette modification matérielle était sans incidence sur le commerce d'agence immobilière exercé par la preneuse en sous-estimant l'impact d'une vitrine d'exposition sur la commercialité alors qu'en réalité la chalandise, peu importe qu'elle se rende dans un supermarché ou dans tout autre type de commerce, ou encore qu'elle ait l'intention d'utiliser les vélos en libre-service, est susceptible de regarder les offres exposées en vitrine et constitue une clientèle potentielle à plus ou moins long terme, qu'elle soit ou non porteuse d'un projet immédiat ou futur de louer ou d'acheter, projet qui n'est pas nécessairement organisé et planifié via internet,
- l'évolution spectaculaire du résultat comptable de la société locataire à partir de l'année 2010 ne peut d'ailleurs qu'être relié à la modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné la variation de 10 % de la valeur locative ;
- cette modification matérielle des facteurs locaux de commercialité a entraîné entre 2009 et 2011 une hausse de la valeur locative supérieure à 10 % comme le démontre la comparaison des valeurs locatives sur la période entre le 15 novembre 2009 et le 03 janvier 2013 venant réfuter les conclusions de l'expert judiciaire qui n'a pas limité son analyse à la période pertinente.
L'appelante estime en conséquence parfaitement justifiée sa demande de révision triennale du loyer commerciale à la hausse sur la base des conclusions du rapport d'expertise amiable réalisé par M.M. cette pièce ayant été soumise au débat contradictoire.
Pour sa part, l'intimée fait essentiellement valoir que :
- le bailleur n'établit pas l'existence d'une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité au sens de l'article L. 148-38 du code du commerce, celle-ci ne pouvant découler de la seule installation de nouvelles enseignes dans le quartier ;
- l'augmentation de l'attractivité commerciale n'est pas établie alors même que de nombreux baux commerciaux dans le quartier sont vacants ;
- en tout état de cause le juge des loyers a justement estimé que ni l'installation des enseignes Intermarché et Altermove ni l'implantation d'une borne de vélos en libre-service n'ont entraîné une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité pour le commerce concerné, critère posé par l'article R.145-6 du code de commerce, dans la mesure où le juge a bien analysé que l'augmentation de l'afflux de badauds est sans incidence sur l'acte d'achat immobilier ;
- le bailleur n'établit pas par ailleurs que la modification matérielle des facteurs locaux de commercialité alléguée ait entraîné par elle-même une hausse des loyers supérieurs à 10 % alors que l'expert judiciaire conclut clairement en sens inverse.
MOTIVATION
Sur la demande sur la demande de déplafonnement du loyer commercial
L'article L. 145-38 du code de commerce, dans sa version issue de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 applicable au présent litige au regard de la date de conclusion du bail commercial, dispose :
« La demande en révision ne peut être formée que trois ans au moins après la date d'entrée en jouissance du locataire ou après le point de départ du bail renouvelé.
De nouvelles demandes peuvent être formées tous les trois ans à compter du jour où le nouveau prix sera applicable.
Par dérogation aux dispositions de l'article L. 145-33, et à moins que ne soit rapportée la preuve d'une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative, la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l'indice trimestriel du coût de la construction ou, s'il est applicable, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux mentionné au premier alinéa de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer.
En aucun cas il n'est tenu compte, pour le calcul de la valeur locative, des investissements du preneur ni des plus ou moins-values résultant de sa gestion pendant la durée du bail en cours. »
L'article R. 145-6 précise que les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire.
Il résulte de l'articulation de ces deux articles qu'un déplafonnement du loyer commercial n'est possible lors de la révision triennale que si le bailleur établit d'une part la survenance durant les trois années suivant la date d'entrée en jouissance du locataire une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité présentant un intérêt pour l'activité commerciale exercée dans les locaux loués, lequel est apprécié concrètement et objectivement, et d'autre part, que cette modification des facteurs locaux de commercialité a entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative.
Sur ce en l'espèce, il ressort du rapport d'expertise extrajudiciaire réalisée par M. M. qu'il existait au moment de la conclusion du bail commercial une friche commerciale au [...] dans l'immeuble du Plazza, soit à proximité des locaux loués situés [...], constituée par une large façade sans aucun commerce à l'ancien emplacement de l'enseigne les Nouvelles Galeries. Cette friche commerciale, qualifiée de « dent creuse » par l'expert a été reconvertie avec l'installation de deux enseignes : en octobre 2010 « Intermarché » exerçant une activité de supermarché et en janvier 2011« Altermove » exerçant une activité de vente de vélos. Par ailleurs, une borne de vélos en libre-service a été installée devant le magasin Intermarché.
Il importe de déterminer si la conversion de cette friche commerciale constitue une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité présentant objectivement et concrètement un intérêt pour l'activité exercée par la preneuse la société Foncia d'« administration de biens, activités de gérance d'immeuble de syndic de copropriété, d'agent immobilier et à titre accessoire l'activité de mandataire en vente de fonds de commerce, promotions immobilières, assurance ».
En l'occurrence, s'il apparaît évident qu'une agence commerciale a un intérêt à disposer d'une vitrine dans un quartier bien situé, force est de constater que l'agence immobilière se situe en centre-ville. En effet, l'expert judiciaire précise que le local commercial exploité en agence immobilière sous l'enseigne « Foncia Nord pas de Calais » est implanté dans le centre de Lille vis-à-vis du [...] en moitié sud-ouest de la [...] ' laquelle part de la [...] ( la [...]) jusqu'au [...] ' entre la [...] et le [...]. Sans être à proximité immédiate de la grande place, l'agence immobilière est ainsi encore en centre-ville. Il y a lieu d'observer que l'ancienne friche commerciale se situait au-delà de l'agence immobilière en direction du [...], et qu'elle était matérialisée par une façade sans commerce sur laquelle étaient accolées des affiches, sans qu'il ne soit allégué que cette situation ait généré de problème particulier de sécurité ou d'insalubrité.
L'expert judiciaire, M. Christophe D., précise que dans ce secteur du centre de Lille les rez-de-chaussée d'immeubles, voire les étages, ont exclusivement vocation commerciale en des activités principalement axées sur les services et particulièrement les activités d'agence immobilière et de banque-assurance. Il relève également, au moment des opérations d'expertise se déroulant le 25 septembre 2014, la présence dans ce quartier d'enseignes de brasserie-restauration, et à proximité de l'agence immobilière Foncia une pharmacie, un centre de fitness, des locaux EDF, et dans l'immeuble du Plazza l'enseigne Intermarché et un second local vacant. L'expert judiciaire estime que l'emplacement peut être qualifié de bonne qualité dans la ville en termes de commercialité bien qu'en retrait cependant des « emplacements n°1 » du début de la [...] elle-même, du secteur piétonnier ou de certaines [...].
Or, il n'apparaît pas suffisamment établi par les pièces produites aux débats que la suppression de la friche commerciale de l'immeuble Plazza avec l'implantation de nouvelles enseignes et d'une borne de vélos en libre-service ait eu objectivement et concrètement une incidence sur l'attractivité commerciale de l'agence immobilière.
En premier lieu, l'influence positive de la conversion de la friche commerciale sur l'attractivité commerciale de la partie de la [...] où est située l'agence immobilière apparaît limitée.
En effet, il ressort du constat d'huissier réalisé le 22 avril 2013 par Me Arnaud M. à la demande de la preneuse qu'en dépit de la suppression de cette friche commerciale, de nombreux locaux commerciaux ou de bureaux dans le quartier sont vacants à proximité immédiate de l'agence immobilière : dans une zone de 100 m, l'huissier de justice constate ainsi la vacance d'une agence immobilière, de trois locaux de bureaux, de trois locaux commerciaux, et des locaux occupés auparavant par l'agence BNP attenants à l'agence immobilière.
Par ailleurs, il ressort de l’expertise judiciaire, que la zone de la [...] où est située l'agence immobilière est toujours en retrait des « emplacements n°1 » même si, selon l'expert judiciaire, il ne paraît pas contestable que « l'implantation d'Intermarché et celle plus fugace d'Altermove et eu une influence positive sur la commercialité du secteur ».
En second lieu, l'influence positive de la conversion de la friche commerciale sur l'attractivité commerciale de l'agence immobilière n'est pas établie.
À cet égard, la cour relève que l'expert judiciaire s'interroge sur l'influence de ses enseignes sur l'activité d'une agence immobilière.
Or, il ressort de l'article de presse versé aux débats par l'appelante évoquant un panier moyen de 12 euros par client de l'Intermarché que ce commerce de proximité attire essentiellement une clientèle locale pour des courses alimentaires de dépannage. Quant au magasin Altermove, il est établi qu'après trois années d'exploitation, il a déménagé [...] aux fins de réduire la surface de sa boutique.
Par ailleurs, c'est de manière pertinente que le juge des loyers commerciaux a considéré que « la société Foncia, compte tenu, de la nature de son activité, ne fonctionne pas sur le simple passage de chalandise. L'acte d'achat, de location ou de tout investissement immobilier n'est pas un achat impulsif qui s'effectue au passage devant une agence immobilière alors, de surcroît, que le potentiel client se dirige vers Intermarché. Il s'agit au contraire pour la clientèle, d'une démarche réfléchie, issue de recherches préalables effectuées notamment via internet, et pour laquelle l'impact de l'affichage en vitrine reste limité. L'impact de l'installation des vélos en libre-service, est, quant à lui, à l'évidence très réduit. »
En troisième lieu, c'est à juste titre que le juge des loyers a estimé que l'augmentation du chiffre d'affaires ne pouvait être utilisée comme base de référence compte tenu des raisons très variables conduisant à l'augmentation d'un chiffre d'affaires ; et que le lien direct entre les modifications matérielles alléguées et le chiffre d'affaires n'était pas démontré.
Au vu de ces éléments, le bailleur échoue à démontrer que la conversion de l'ancienne friche commerciale par l'installation d'un Intermarché et du magasin Altermove et par l'implantation d'une borne de vélos en libre-service constitue une modification des facteurs locaux de commercialité présentant un intérêt particulier pour l'agence immobilière, condition nécessaire à l'admission d'un déplafonnement du loyer commercial.
Au surplus, et à titre superfétatoire, il sera relevé que le bailleur échoue à établir que la modification des facteurs locaux de commercialité allégué ait entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative alors même que l'expert judiciaire, après avoir analysé l'étude de son confrère M. Jean-Jacques M. qui avait conclu aux terme d'un rapport extrajudiciaire et non contradictoire à une évolution de plus de 10 % de la valeur locative sur la période du 15 novembre 2009 au 3 janvier 2013, a estimé pour sa part qu'une telle évolution ne lui apparaissait pas clairement établi.
En conséquence, étant rappelé que la confirmation ou l'infirmation d'une décision déférée porte sur son dispositif, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la bailleresse de sa demande de révision du loyer fondé sur les dispositions de l'article L 145'8 du code du commerce, dit que la révision ne peut s'effectuer que sur la base de l'évolution de l'indice de la construction, et débouté la SCI Olympos du surplus de ses demandes.
Sur la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive, Il résulte des articles 1382 du code civil et 32-1 du code de procédure civile, qu'une partie ne peut engager sa responsabilité pour avoir exercé une action en justice ou s'être défendue que si l'exercice de son droit a dégénéré en abus. L'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'étant pas, en soi, constitutive d'une faute, l'abus ne peut se déduire du seul rejet des prétentions par le tribunal.
En l'espèce, même s'il est indéniable que ce litige s'inscrit dans des relations particulièrement conflictuelles entre la preneuse et la bailleresse à l'origine de plusieurs procès, aucun élément ne permet d'établir que l'appréciation inexacte faite par la société Olympos des conditions posées par l'article L. 145-38 du code de commerce pour un déplafonnement du loyer dans le cadre de la révision triennale ait dégénéré en abus, alors même qu'elle se fondait sur le rapport de M. Jean-Jacques M..
Par ailleurs, la société Foncia Nord Pas de Calais ne justifie pas d'un préjudice du fait de cette instance qui ne serait pas suffisamment indemnisée par l'allocation d'une somme au titre des frais irrépétibles.
En conséquence, il y a lieu de débouter l'intimée de sa demande de dommages et intérêts formulée à ce titre, et de confirmer en cela le juge des loyers commerciaux.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
La SCI Olympos, partie perdante, sera condamnée au paiement des dépens de l'appel et à payer à la société Foncia une somme de 5 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la SCI Olympos au paiement des dépens de l'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, et à payer à la société Foncia la somme de 3 500 euros au titre de ses frais irrépétibles.
Au final, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en l'intégralité de ces dispositions, et y ajoutant de débouter la SCI Olympos de l'intégralité de ses demandes et de la condamner au paiement des dépens de l'appel et à payer à la société Foncia une somme de 5 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en l'intégralité de ses dispositions ;
Y ajoutant :
Déboute la SCI Olympos de l'intégralité de ses demandes ;
Condamne la SCI Olympos au paiement des dépens de la procédure l'appel et à payer à la société Foncia une somme de 5 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.