Cass. com., 21 juin 2016, n° 14-25.344
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Rapporteur :
M. Sémériva
Avocat général :
M. Mollard
Avocat :
SCP Hémery et Thomas-Raquin
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ecolab USA Inc. (la société Ecolab) a fait opposition, sur le fondement de la marque verbale internationale « Ecolab » désignant l'Union européenne, déposée le 6 avril 2009, sous priorité d'un dépôt allemand du 26 novembre 2008, et enregistrée sous le n° 1005780, à la demande d'enregistrement en tant que marque du signe « Kairos Ecolab », déposée le 23 novembre 2012 auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) par la société Kairos ; que ce dernier a rejeté cette opposition ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qu'un risque de confusion peut exister dans l'esprit du public, en cas d'identité des produits ou des services, lorsque le signe contesté est constitué au moyen de la juxtaposition, d'une part, de la dénomination de l'entreprise du tiers et, d'autre part, d'une marque enregistrée, dotée d'un pouvoir distinctif normal, et que celle-ci, sans créer à elle seule l'impression d'ensemble du signe composé, conserve dans ce dernier une position distinctive autonome (CJUE, 6 octobre 2005, Médion, C-120/04 ; Perfetti Van Melle/OHMI, C-353/09, point 36), de sorte que la conservation de cette position distinctive n'est pas nécessairement subordonnée à la renommée de cette marque ;
Attendu que pour rejeter le recours formé par la société Ecolab contre la décision du directeur général de l'INPI, l'arrêt retient que la seule reprise de la marque verbale antérieure dans le signe contesté, et quand bien même les produits couverts par les signes opposés seraient identiques ou similaires, ne suffit pas à établir un risque de confusion dans la mesure où il n'est pas établi que la marque antérieure jouit d'une renommée particulière qui permettrait au terme Ecolab de conserver, dans le signe contesté, une position distinctive autonome ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur ce moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'il résulte de la jurisprudence de la CJUE qu'un élément d'un signe composé ne conserve pas une telle position distinctive autonome si cet élément forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens desdits éléments pris séparément (CJUE, 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C-591/12, point 25 ; Becker/Harman International Industries, C-51/09, points 37 et 38), de sorte que la constatation de l'existence d'un risque de confusion n'est pas subordonnée à la condition que l'impression d'ensemble produite par le signe composé soit dominée par la partie de celui-ci constituée par la marque antérieure ;
Attendu que pour rejeter le recours de la société Ecolab, l'arrêt retient encore que l'attention du consommateur sera davantage portée sur le terme Kairos, lequel, composé de la lettre d'attaque K et de la sonorité Os, peu communes dans la langue française, fantaisiste pour désigner les produits et services en cause et placé en position d'attaque, présente un caractère distinctif et dominant ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Kairos aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Ecolab USA Inc. ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille seize.