Cass. 1re civ., 7 juin 1966
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE, PAR ACTE DU 16 NOVEMBRE 1951, LA DAME Z..., EPOUSE Y..., A VENDU A GASTON ET A LOUIS A... UN IMMEUBLE SIS A JUAN-LES-PINS EN SE RESERVANT, POUR ELLE ET SES FILLES, UN DROIT D'HABITATION VIAGER SUR UNE PIECE;
QU'EN OCTOBRE 1953, ELLE A ASSIGNE SES ACQUEREURS EN RESCISION POUR LESION DE PLUS DES 7 12E;
QU'APRES EXPERTISE, LE TRIBUNAL A DECLARE LA VENTE LESIONNAIRE ET A DIT QUE LA DAME Y... POURRAIT REPRENDRE LE BIEN CEDE SAUF X... VIDAL A PAYER LE SUPPLEMENT DU JUSTE PRIX;
QUE L'ARRET ATTAQUE A CONFIRME CETTE DECISION ET ORDONNE UNE NOUVELLE EXPERTISE POUR DETERMINER LA VALEUR ACTUELLE DE L'IMMEUBLE;
ATTENDU QU'IL EST TOUT D'ABORD REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR, POUR ADMETTRE QU'IL Y AVAIT LESION, EVALUE LE DROIT VIAGER D'HABITATION A LA SOMME DE 10000 FRANCS, ALORS, SELON LE POURVOI, QU'UNE VENTE CONSENTIE AVEC LA RESERVE D'UN TEL DROIT PRESENTE UN CARACTERE ALEATOIRE ET, PAR SUITE, N'EST PAS RESCINDABLE POUR LESION;
MAIS ATTENDU QUE CE MOYEN N'A PAS ETE PRESENTE DEVANT LES JUGES DU FOND ET QUE, NOUVEAU ET MELANGE DE FAIT ET DE DROIT, IL NE PEUT ETRE SOULEVE POUR LA PREMIERE FOIS DEVANT LA COUR DE CASSATION;
QU'IL DOIT DONC ETRE DECLARE IRRECEVABLE;
SUR LES DEUX BRANCHES DU DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QUE LE POURVOI SOUTIENT QUE, A SUPPOSER QUE LA COUR D'APPEL PUT EVALUER LE DROIT D'HABITATION A 10000 FRANCS, CETTE SOMME DEVAIT S'AJOUTER AU PRIX DE VENTE ET NON VENIR EN DEDUCTION DE LA VALEUR VENALE DE L'IMMEUBLE;
QU'IL CRITIQUE ENCORE L'ARRET ATTAQUE POUR AVOIR DECLARE QU'IL N'Y AVAIT PAS LIEU DE TENIR COMPTE, DANS L'EVALUATION DU PRIX DE VENTE, D'UNE SOMME DE 3605,22 FRANCS PERCUE PAR LA DAME Y... A TITRE D'INDEMNITE DE DOMMAGES DE GUERRE;
MAIS ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE A JUSTEMENT CONSIDERE QUE LA SOMME, SOUVERAINEMENT EVALUEE PAR LES JUGES DU FOND COMME REPRESENTANT LE DROIT VIAGER D'HABITATION, DEVAIT VENIR EN DEDUCTION DE LA VALEUR VENALE DE L'IMMEUBLE VENDU AU MOMENT DE LA VENTE;
QU'IL A DE MEME EXCLU A BON DROIT DE CETTE EVALUATION LE MONTANT DES DOMMAGES DE GUERRE PERCUS APRES LA VENTE PAR LA DAME Y..., EN RELEVANT QUE L'ESTIMATION DU BIEN AVAIT ETE FAITE PAR LES PARTIES EN " SON ETAT ACTUEL" AU MOMENT DU CONTRAT ET " ABSTRACTION FAITE DU DROIT A DOMMAGES DE GUERRE ";
QU'AINSI LES GRIEFS DU DEUXIEME MOYEN NE SAURAIENT ETRE RETENUS;
SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR DECIDE QUE LE SUPPLEMENT DU JUSTE PRIX DU PAR LES ACQUEREURS POUR CONSERVER L'IMMEUBLE SERAIT CALCULE SELON LA VALEUR ACTUELLE DE CE BIEN;
QUE, SELON LE POURVOI, LE JUSTE PRIX VISE PAR LES ARTICLES 1675 ET 1681 DOIT CORRESPONDRE A LA VALEUR VENALE DE L'IMMEUBLE AU JOUR DE LA VENTE;
QUE LE POURVOI PRETEND ENCORE QUE L'ARTICLE 1682 A SPECIALEMENT PREVU LA REPARATION DU PREJUDICE POUVANT RESULTER POUR LE VENDEUR DE LA DUREE DE L'INSTANCE EN RESCISION PAR L'OBLIGATION FAITE A L'ACQUEREUR DE PAYER LES INTERETS DU SUPPLEMENT DU PRIX A COMPTER DU JOUR DE LA DEMANDE ET QUE CES INTERETS NE PEUVENT COURIR DEPUIS CETTE DATE QUE SUR LE MONTANT D'UN PRINCIPAL EGAL A LA VALEUR DE L'IMMEUBLE AVANT CETTE DATE;
QU'ENFIN, LA COUR D'APPEL AURAIT, D'APRES LE POURVOI, ENTACHE SA DECISION DE CONTRADICTION EN ENONCANT A LA FOIS QUE CE SUPPLEMENT DE JUSTE PRIX DEVAIT ETRE CALCULE AU JOUR DU PAYEMENT ET EN DECLARANT QU'IL DEVRAIT CORRESPONDRE A LA VALEUR ACTUELLE DE L'IMMEUBLE;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE SI, POUR SE PRONONCER SUR L'EXISTENCE DE LA LESION, IL CONVIENT, AUX TERMES DE L'ARTICLE 1675, DE PRENDRE EN CONSIDERATION LA VALEUR DE L'IMMEUBLE AU JOUR DE LA VENTE, L'ARTICLE 1681 DISPOSE QUE LE SUPPLEMENT QUE DOIT PAYER L'ACHETEUR POUR ECHAPPER A LA RESTITUTION DE L'IMMEUBLE, LORSQUE LA LESION EST RECONNUE, DOIT ETRE CALCULE D'APRES LE JUSTE PRIX DU BIEN VENDU;
QU'IL S'ENSUIT QUE CE SUPPLEMENT DOIT CORRESPONDRE, NON A LA VALEUR VENALE DE L'IMMEUBLE AU MOMENT OU IL A ETE VENDU, MAIS A SA VALEUR REELLE A L'EPOQUE OU DOIT INTERVENIR CE REGLEMENT COMPLEMENTAIRE, TOUTE AUTRE SOLUTION AYANT POUR CONSEQUENCE, COMME LE RELEVE JUSTEMENT L'ARRET ATTAQUE, DE LAISSER SUBSISTER LA LESION DONT LES DISPOSITIONS PRECITEES ONT PRECISEMENT POUR OBJET D'ASSURER LA REPARATION;
ATTENDU D'AUTRE PART, QUE L'OBLIGATION, IMPOSEE PAR L'ARTICLE 1682 A L'ACHETEUR, DE PAYER LES INTERETS DE SUPPLEMENT DE PRIX A COMPTER DE LA DEMANDE EN RESCISION, QUI N'A POUR OBJET QUE DE COMPENSER LA PERTE DE JOUISSANCE SUBIE PAR LE VENDEUR, EST ETRANGERE A LA REPARATION MEME DE LA LESION ET NE SAURAIT METTRE OBSTACLE A UNE NOUVELLE EVALUATION DE L'IMMEUBLE A SA VALEUR ACTUELLE;
ATTENDU ENFIN QUE C'EST SANS AUCUNE CONTRADICTION QUE L'ARRET ATTAQUE A CHARGE LES EXPERTS QU'IL DESIGNAIT D'EVALUER LE SUPPLEMENT DU PRIX SELON L'ETAT DE L'IMMEUBLE AU 16 NOVEMBRE 1951 ET SELON SA VALEUR ACTUELLE POUR PERMETTRE AUX ACHETEURS DE "N'OPTER QUE LORSQUE LE MONTANT DUDIT SUPPLEMENT POURRA ETRE DETERMINE ";
D'OU IL SUIT QUE LE TROISIEME MOYEN DOIT A SON TOUR ETRE ECARTE;
SUR LE QUATRIEME MOYEN : ATTENDU QUE, SELON LE POURVOI, L'ARRET ATTAQUE AURAIT A TORT DECIDE QUE LES ACQUEREURS DEVRAIENT FAIRE CONNAITRE LEUR DECISION DE CONSERVER L'IMMEUBLE DANS LE MOIS DE LA SIGNIFICATION DU RAPPORT D'EXPERTISE, ALORS QUE LES JUGES NE PEUVENT DELEGUER LEURS POUVOIRS AUX EXPERTS ET QUE LA COUR D'APPEL NE POUVAIT SUBORDONNER L'EXERCICE DE L'OPTION A LA SIMPLE SIGNIFICATION D'UN RAPPORT DONT L'EVALUATION POUVAIT ETRE MODIFIEE;
MAIS ATTENDU QUE, CONTRAIREMENT AUX AFFIRMATIONS DU POURVOI, L'ARRET ATTAQUE NE COMPORTE AUCUNE DELEGATION DE POUVOIRS AUX EXPERTS ET NE CONSIDERE PAS COMME DEFINITIVE L'EVALUATION PROPOSEE PAR LES HOMMES DE L'ART;
QUE, REFORMANT SUR CE POINT LA DECISION DES PREMIERS JUGES QUI AVAIENT ENJOINT AUX CONSORTS A... DE FAIRE CONNAITRE LEUR INTENTION DANS LE MOIS DE LA SIGNIFICATION DU JUGEMENT EN N'ORDONNANT L'EXPERTISE DESTINEE A DETERMINER LE JUSTE PRIX QU'APRES L'EXERCICE DE L'OPTION, LA COUR D'APPEL A ESTIME PREFERABLE DE PERMETTRE AUX ACHETEURS "DE N'OPTER QUE LORSQUE LE MONTANT DE SUPPLEMENT POURRA ETRE DETERMINE ", ET DONC APRES LA FIN DES OPERATIONS D'EXPERTISE;
QU'EN STATUANT AINSI, L'ARRET ATTAQUE, QUI N'A VIOLE AUCUN DES TEXTES VISES PAR LE POURVOI, A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 10 JUIN 1964 PAR LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE.