Cass. 3e civ., 3 juillet 1979, n° 77-11.445
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cazals
Rapporteur :
M. Francon
Avocat général :
M. Simon
Avocat :
Me Martin-Martinière
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaque (Paris, 1er mars 1977), que la Société immobilière d’Ivry-sur-Seine a donné à bail aux époux A... un local à usage commercial dans lequel dame A... exerçait son activité commerciale, qu'après le renouvellement de la location, à compter du 1er avril 1965, A..., qui s'était obligé solidairement avec son épouse pour l'exécution des conditions du bail, est décédé le 30 mai 1967 et que le fonds de commerce et le droit au bail sont, en raison du régime matrimonial des époux X... que des dispositions testamentaires prises par A..., devenus pour les trois-quarts la propriété de la dame A... et, pour un quart, celle de Bernard A...; que la dame A... ayant seule la qualité de commerçante inscrite au registre du commerce, a continué d'exploiter le fonds en indivision en ayant pour salarie Bernard A...; que les indivisaires ont demandé le renouvellement du bail à compter du 1er avril 1974, ce que le bailleur leur a refusé en indiquant l'absence du droit pour les indivisaires de se prévaloir du statut des baux commerciaux, faute pour Bernard A... de remplir personnellement les conditions exigées par l'article 1er du décret du 30 septembre 1953, ou de les remplir du fait de son auteur;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir admis que les indivisaires bénéficiaient de ce statut, bien que l'un d'eux n'ait pas les qualités requises par la loi, alors, selon le moyen, que, d'une part, les juges du fond, saisis d'une contestation relative au renouvellement d'un bail de copreneurs solidaires, sont tenus de rechercher si chacun d'eux remplit les conditions légales pouvant seules leur donner vocation a renouvellement; qu'en posant pour principe qu'il suffit que l'un d'eux remplisse les conditions, l'arrêt attaque est dépourvu de motifs et de base légale; que, d'autre part, la cour d'appel a négligé les conclusions de la Société immobilière d’Ivry-sur-Seine qui soutenaient que l'un des copreneurs, Bernard A..., ne pouvait prétendre à ce renouvellement ni en son nom personnel, ni en qualité d'héritier de son père ;
Mais attendu que la qualité de commerçant immatriculé au registre du commerce au sens de l'article 1er du décret du 30 septembre 1953 n'est requise qu'en la personne de celui des époux Z... communs en biens ou de celui des membres d'une indivision successorale qui exploite le fonds pour le compte et dans l'intérêt commun des époux ou des indivisaires; que la cour d'appel, répondant aux conclusions, a justement retenu que dame A... exploitant le fonds pour le compte de l'indivision et ayant la qualité de commerçante immatriculée au registre du commerce, les consorts A..., qui agissaient en Y..., avaient droit au renouvellement de leur bail ou, à défaut, à une indemnité d'éviction; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision de ce chef;
Sur les deuxième et troisième moyens réunis :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que les consorts A... avaient droit au renouvellement de leur bail ou, à défaut, à une indemnité d'éviction, en retenant que le fonds de commerce était effectivement exploité par l'un des deux indivisaires, alors, selon les moyens, que, d'une part, dans des conclusions restées sans réponse, la société bailleresse a soutenu qu'en l'espèce, en vertu des textes applicables, l'exploitation personnelle était exigée également de l'autre copreneur; que, d'autre part, le bail est venu a expiration le 1er avril 1974; que l'exigence de l'exploitation personnelle a été supprimée par la loi du 16 juillet 1971 seulement; qu'antérieurement à cette loi, il est constant que l'autre copreneur n'exploitait pas le fonds; qu'ainsi, ce dernier ne peut se prévaloir de trois années d'exploitation effective, a la date d'expiration du bail, par l'intermédiaire de l'autre copreneur et n'a donc aucun droit au renouvellement ;
Mais attendu que l'arrêt, répondant aux conclusions, énonce exactement que l'article 4 du décret du 30 septembre 1953, tel que modifié par la loi du 16 juillet 1971, qui est applicable aux baux en cours en vertu de son article 6, n'exige pas que le locataire exploite personnellement le fonds de commerce, mais seulement que le fonds ait été effectivement exploite au cours des trois années précédant la date d'expiration du bail; que l'arrêt constate, ensuite, que cette condition était remplie du chef de dame A...; d'où il suit que le moyen n'est pas fonde;
Sur le quatrième moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir refusé de constater la résiliation du bail en suite d'un commandement que le bailleur avait fait délivrer aux copreneurs en vertu d'une stipulation du bail, alors selon le pourvoi, que le bail exige le consentement exprès et par écrit de la bailleresse pour les travaux de percement et de démolition; qu'il précise que les locaux du premier étage sont à usage d'appartement; que le bon état de réparations locatives et d'entretien n'a pas à être autrement précisé, d'autant plus que le mauvais état résulte des constats dont l'un est contradictoire; que l'entretien des locaux doit être assure pendant toute la durée du bail et que la mise en demeure visant la clause résolutoire et le refus de renouvellement du bail a précisément pour effet de rendre exigibles ces réparations à l'expiration du délai d'un mois qu'elle prévoit; qu'enfin, le bail prescrit que la compagnie d'assurances des locataires ait a paris son siège social et que les preneurs justifient a toute réquisition de l'acquit des primes et cotisations; qu'ils ne sauraient en être dispensés sous prétexte que cette justification serait devenue sans intérêt pour la bailleresse ;
Mais attendu que la cour d'appel, examinant les manquements invoqués dans le commandement, a retenu que les consorts A... n'avaient pas à rétablir les lieux dans leur état primitif, les transformations faites par eux l'ayant été avec l'accord du gérant, que le bail n'interdisait pas l'utilisation du logement comme dépôt de marchandises ou comme atelier, que la mise en demeure d'exécuter les travaux de réparations et d'entretien était conçue en termes généraux et laissait les consorts A... dans l'incertitude complète sur ce qu'ils devaient faire et enfin, que les locataires étaient assurés auprès d'une compagnie qui avait un établissement à Paris et qu'ils avaient produit une attestation de leur assureur établissant que celui-ci couvrait bien leur responsabilité locative; que par ces motifs la cour d'appel a légalement justifie sa décision de ce chef;
Par ces motifs :
Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 1er mars 1977 par la Cour d'appel de Paris.