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Décisions

Cass. 3e civ., 10 septembre 2020, n° 19-17.139

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SARL Cabinet Briard, SCP Yves et Blaise Capron

Rapporteur :

Mme Dagneaux

Paris, du 30 janv. 2019

30 janvier 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 janvier 2019), le 8 février 2005, la société Pardès patrimoine a donné à bail à la société Game France, aux droits de laquelle se trouve la société Micromania, un immeuble pour une durée de douze années à compter du 15 mars 2005, moyennant un loyer annuel de 130 000 euros, hors taxes et hors charges.

2. Un jugement du 5 septembre 2012 a prononcé le redressement judiciaire de la société Game France.

3. Le 18 janvier 2013, la bailleresse a notifié à la locataire une demande de révision du loyer indexé, au visa de l'article L. 145-39 du code de commerce, et sollicité la fixation du loyer à la valeur locative.

4. Le 1er février 2013, un plan de cession partiel du fonds de commerce de la société Game France a été arrêté au profit de la société Micromania.

5. Le 23 septembre 2013, la société Pardès patrimoine a saisi le juge des loyers commerciaux en fixation du loyer révisé, qui, par jugement du 17 octobre 2014, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance, la société locataire s'étant prévalue du caractère illicite de la clause d'indexation et ayant sollicité le remboursement du trop versé au bailleur au titre de l'indexation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. La société Pardès patrimoine fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de condamnation de la bailleresse à rembourser à la société locataire les sommes trop versées, puis, l'infirmant sur ce point, statuant à nouveau et y ajoutant, de déclarer la fin de non-recevoir présentée par la bailleresse recevable, dire que la société Micromania a un intérêt à agir, constater que la société Micromania, par conclusions régulièrement notifiées par le RPVA, a demandé la condamnation de la société Pardès patrimoine à lui payer la somme de 174 219,26 euros au titre des sommes trop-perçues pour la période écoulée entre le 1er février 2013 et le 1er trimestre 2017 inclus, condamner la société Pardès patrimoine à verser à la société Micromania cette somme avec intérêts au taux légal à compter de la date de notification des conclusions de la société Micromania chiffrant la demande de restitution, puis condamner la société Pardès patrimoine à verser à la société Micromania la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°) qu'hors les cas où la clause déclarée non écrite présente un caractère essentiel à l'équilibre du contrat ou ne peut être détaché des autres stipulations contractuelles, cette sanction n'affecte pas les autres clauses de la convention légalement formée ; qu'en considérant que la clause d'indexation devait être, en son entier, réputée non écrite au seul motif que « l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer présente un caractère essentiel, la clause litigieuse précisant avec netteté que l'application de ladite clause ne devant en aucune manière se traduire par une diminution de loyer » sans dire en quoi, en l'absence de toute manifestation de volonté expresse en ce sens, la clause litigieuse déclarée non écrite était essentielle à l'équilibre du contrat et sans constater par ailleurs que cette clause, qui, dans son dernier alinéa, écartait tout ajustement du loyer à la baisse, ne pouvait être détachée des autres stipulations convenues par les parties au titre de l'indexation du loyer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article L. 112-1 du code monétaire et financier.

2°) que, par dérogation à l'article L. 145-38 du code de commerce, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ; que dans l'hypothèse où la clause d'indexation est déclarée non écrite en ce qu'elle exclut, en cas de baisse de l'indice, toute diminution du loyer, les parties demeurent en droit, en cas variation de plus quart du loyer par le jeu de l'indexation, de solliciter du juge la fixation du loyer révisé à la valeur locative ; qu'en énonçant que la clause d'échelle mobile ayant été déclarée non écrite en ce qu'elle excluait en cas de baisse de l'indice l'ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps, « les dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce ne pouvaient trouver à s'appliquer de sorte que la société Pardès patrimoine devait être déboutée de sa demande tendant à voir fixer à la valeur locative le prix du loyer révisé », quand ces dispositions d'ordre public permettent à chacune des parties, dès lors que le bail stipule une clause d'indexation, de solliciter du juge la fixation du loyer révisé à la valeur locative en cas d'augmentation ou de diminution de plus du quart du loyer par le jeu de cette clause, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

7. D'une part, ayant exactement retenu que le propre de la clause d'indexation est de faire varier le loyer à la hausse ou à la baisse et souverainement relevé que la clause d'indexation figurant au bail excluait, en cas de baisse de l'indice, tout ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps et qu'elle stipulait expressément que son application ne devait pas se traduire par une diminution de loyer, de sorte que l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer présentait un caractère essentiel, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que la clause devait être réputée non écrite en son entier, a, par ces motifs, légalement justifié sa décision de ce chef.

8. D'autre part, ayant retenu que l'article L. 145-39 du code de commerce autorisait « en outre et par dérogation à l'article L. 145-38 » les clauses d'indexation qui avaient pour objet de faire évoluer le montant du loyer en fonction d'un indice de référence de manière automatique et que, la clause d'indexation ayant été déclarée réputée non écrite, les dispositions de l'article L. 145-39 n'étaient pas applicables, la cour d'appel, qui a rejeté la demande du bailleur sur le fondement de ce texte, a légalement justifié sa décision.

Sur le second moyen, ci-après annexé

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.