Cass. com., 18 octobre 2016, n° 15-14.523
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Carbonnier, SCP Potier de La Varde et Buk Lament
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Puma est titulaire des marques figuratives internationales désignant la France, dénommées « Form Strip », régulièrement renouvelées et désignant, notamment, les chaussures de sport et de loisirs en classe 25 pour les trois premières et les chaussures dans la même classe pour la dernière, enregistrées respectivement les 19 novembre 1976, 11 juillet 1978, 27 mars 1984 et 10 mars 1993 sous les numéros 426 712, 439 162, 484 788 et 599 703 ; que ces marques sont exploitées, en France, par la société Puma France ; qu'estimant que les signes apposés sur trois modèles de chaussures commercialisés par la société Meryl et fournies par la société Fille à venir portaient atteinte à leurs droits, les sociétés Puma et Puma France (les sociétés Puma) ont assigné ces sociétés en contrefaçon de marque et en concurrence déloyale ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que les sociétés Puma font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes au titre de la contrefaçon et de la concurrence déloyale s'agissant du modèle RG340 alors, selon le moyen, qu'en présence d'une famille de marques, le risque de confusion créé par le signe contesté doit être apprécié entre ce dernier et la famille de marques prise dans son ensemble ; qu'en se bornant à affirmer, pour statuer comme elle l'a fait, que le signe apposé sur le modèle RG340 ne présentait pas de similitude avec les marques n° 426712 et 439162 et qu'il ne pouvait être comparé qu'avec la marque n° 599703, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les marques invoquées par les sociétés Puma ne constituaient pas une famille de marques, de sorte que le risque de confusion devait être examiné en confrontant le signe incriminé à l'ensemble des marques invoquées et non à chacune des marques prise séparément, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que, dans la mesure où la contrefaçon par imitation suppose l'existence d'une similarité entre les signes en cause, d'une identité ou d'une similarité entre les produits et qu'il en résulte un risque de confusion pour le consommateur concerné, son appréciation, lorsque plusieurs marques sont invoquées, implique de procéder à la comparaison du signe incriminé avec, respectivement, chaque marque opposée, les signes en présence étant considérés chacun dans son ensemble ; qu'ayant, par motifs adoptés, écarté toute similitude entre les marques n° 426712 et 439162, composées, comme la marque n° 484 788, d'une bande d'un seul tenant, et le signe litigieux apposé sur le modèle de chaussure RG340, dont elle a relevé qu'il comportait une bande courbe fendue partant de la zone inférieure de la chaussure et diminuant progressivement en remontant vers le talon, pour ne rechercher l'éventuelle existence d'un risque de confusion qu'avec la marque n° 599 703, composée d'une bande fendue en son centre pour constituer une fourche à deux dents, la cour d'appel, qui n'avait pas à tenir compte de l'appartenance de l'ensemble de ces marques à une prétendue « famille », a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 713-2 et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que pour rejeter les demandes en contrefaçon de la marque n° 599 703 et en concurrence déloyale formées par les sociétés Puma, l'arrêt, après avoir procédé à la comparaison du signe incriminé apposé sur le modèle de chaussure RG340 avec la marque telle que figurant sur le certificat de dépôt, retient que les sociétés Puma ont choisi d'exploiter sur leurs chaussures cette marque, non sous sa seule forme déposée, mais avec l'ajout, au milieu du côté supérieur du talon et au-dessus de la virgule inversée, de l'expression « Puma Sprint » surmontée de l'emblème notoire du puma bondissant stylisé, lequel est également représenté à l'arrière, tandis que le modèle de chaussure litigieux comporte à ces deux emplacements la lettre « A » penchée à droite ; qu'il en déduit que la marque n'est ni reproduite ni imitée ;
Qu'en statuant ainsi, au vu des conditions d'exploitation sur les chaussures de la marque invoquée, alors qu'elle devait se référer à son enregistrement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 713-2 et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que pour rejeter les demandes en contrefaçon des marques n° 426 712, 439 162 et 484 788 et en concurrence déloyale formées par les sociétés Puma, l'arrêt, après avoir procédé à la comparaison des signes incriminés apposés sur les modèles de chaussures 0303G et 0305G avec les marques telles que figurant sur les certificats de dépôt, retient que les sociétés Puma ont choisi d'exploiter ces marques, non sous leurs seules formes déposées, mais avec l'ajout, sur le modèle « Speed » opposé au modèle 0303G, au milieu du côté extérieur du talon et au-dessus de la virgule inversée, du mot « Puma » surmonté de l'emblème du puma bondissant stylisé, également présent à l'arrière et sur le dessus de l'avant, et avec l'ajout, sur le modèle « Replica » opposé au modèle 0305G, du mot « Puma » surmonté de l'emblème du puma bondissant stylisé, également présent à l'arrière, sur le dessus de l'avant et sur le devant du scratch, ce mot et cet emblème ayant un fort caractère distinctif, tandis que les paires de chaussures litigieuses ne comportent aucun élément à ces trois emplacements ; qu'il en déduit qu'aucune de ces trois marques n'est reproduite ou imitée ;
Qu'en statuant ainsi, au vu des conditions d'exploitation sur les chaussures des marques invoquées, alors qu'elle devait se référer à leurs enregistrements respectifs, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que pour rejeter les demandes en contrefaçon par reproduction des marques n° 426 712 et 484 788 et en concurrence déloyale formées par les sociétés Puma, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'il existe des différences notables entre la bande apposée sur les modèles de chaussures 0303G et 0305G litigieux et le signe figuratif « Form Strip » tenant au dessin de la bande elle-même et à la présence de coutures ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans décrire en quoi, au sein des signes litigieux considérés dans leur ensemble, la différence de dessin et l'incidence des coutures, qui apparaissent tant sur ces signes que sur les marques invoquées, seraient telles que ces éléments ne pourraient pas passer inaperçus aux yeux d'un consommateur moyen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes en contrefaçon de la marque n° 599 703 et en concurrence déloyale concernant le modèle de chaussures RG340 ainsi que les demandes en contrefaçon des marques n° 426 712, 439 162 et 484 788 et en concurrence déloyale concernant les modèles de chaussures 0303G et 0305G, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 11 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne les sociétés Meryl et Fille à venir aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Puma SE, venant aux droits de la société Puma AG Rudolf Dassler sport, et à la société Puma France la somme globale de 3 000 euros et rejette la demande de la société Meryl ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille seize.