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Décisions

Cass. com., 24 mai 2005, n° 02-19.704

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Besançon

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

Me Odent, SCP Boutet

Paris, du 21 sept. 2001

21 septembre 2001

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2001), que le 2 novembre 1995 la société Etablissements X... Père et fils (société X...) a vendu à la société HB Machines, devenue la société Orchis Jardin puis la société Brenntag (l'acquéreur), un fonds de commerce de "fabrication et toutes opérations commerciales relatives aux matières et produits chimiques agricoles et industriels notamment engrais, chaux, amendements, grains et dérivés tourteaux" ; que l'acquéreur, soutenant que M. X... avait violé les obligations résultant du contrat de cession du fonds de commerce, à travers les activités de la société OPF Déco Jardin, a, sur le fondement des articles 1626 et 1628 du Code civil, demandé au tribunal d'interdire à celui-ci et à la société OPF Déco Jardin de commercialiser certains produits et de les condamner à payer des dommages-intérêts ;

Attendu que M. X... et la société OPF Déco Jardin reprochent à l'arrêt de les avoir condamnés solidairement à indemniser l'acquéreur du préjudice résultant pour ce dernier du non respect de la garantie d'éviction à laquelle l'acte de cession du fonds de commerce, en date du 2 novembre 1995, lui donnait droit et ordonné à la société OPF Déco Jardin de cesser de commercialiser, jusqu'au 2 novembre 1999, divers produits chimiques agricoles et industriels, sous astreinte de 10 000 francs ou sa contre-valeur en euros par jour et par infraction constatée à partir du quinzième jour suivant le prononcé du jugement, alors, selon le moyen :

1°) que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et ne nuisent point aux tiers ; que l'obligation de non-concurrence, par laquelle le cédant d'un fonds de commerce est tenu de s'abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé, participant de la garantie du fait personnel, est mise à la charge du vendeur en tant qu'il est partie à l'acte de vente ; qu'en estimant dès lors que la garantie légale d'éviction pesait non seulement sur la société signataire de l'acte de cession mais encore sur son dirigeant social, voire sur d'autres sociétés dans lesquelles ce dernier avait eu des parts, la cour d'appel a violé les articles 1165, 1626 (du Code civil) et 1er de la loi du 17 mars 1909 ;

2°) que, pour justifier de l'opposabilité de l'obligation de garantie non seulement au vendeur, qui en est le débiteur en vertu de la loi, mais encore à des sociétés tierces à l'acte de vente, la cour d'appel a estimé que cette extension était fondée lorsque le dirigeant social de la société cédante " interposait " ces sociétés " pour tenter d'échapper à ses obligations " ; qu'en décidant dès lors de mettre à la charge de la société OPF Déco Jardin, tierce à l'acte de cession, sans avoir constaté, selon le critère retenu, aucune manoeuvre de la part de M. X... de nature à justifier une telle extension, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1626 du Code civil ;

Mais attendu qu'en cas de cession d'un fonds de commerce, la garantie légale d'éviction interdit au vendeur de détourner la clientèle du fonds cédé, et que si le vendeur est une personne morale cette interdiction pèse non seulement sur elle, mais aussi sur son dirigeant ou sur les personnes qu'il pourrait interposer pour échapper à ses obligations ;

Attendu que l'arrêt relève que M. X..., ayant des parts dans toutes les sociétés du groupe X..., avait une parfaite connaissance des engagements qu'il prenait et imposait à ces autres sociétés dans l'acte de cession qu'il a signé en tant que président et directeur général de la société X... ; qu'il relève encore que la société OPF Déco Jardin, dont il est le président et directeur général, avait petit à petit élargi son activité commerciale à la vente de produits similaires à ceux que vendaient l'acquéreur, puis directement concurrents ; qu'en l'état de ces énonciations et constatations, l'arrêt, qui a souverainement retenu l'existence d'un détournement de clientèle par personne interposée, a pu déclarer la société OPF Déco Jardin responsable des activités litigieuses de M. X... ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.