Cass. com., 2 juillet 2002, n° 00-13.459
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 janvier 2000), qu'ayant le projet de réaliser une opération de promotion immobilière sur deux parcelles de terrains contiguës qu'elle ne pouvait acquérir simultanément, la SCI Santa Monica (la SCI) a sollicité le concours financier de la Banque du bâtiment et des travaux publics (la banque) ; que, par lettre du 16 novembre 1990, cette dernière a accepté de consentir un prêt pour l'achat du premier terrain en ajoutant que lorsqu'elle étudierait le crédit nécessaire à l'acquisition de la deuxième assiette foncière, elle demanderait, notamment, aux associés un apport complémentaire en fonds propres d'un montant minimum de 2 000 000 francs ; que, dans une autre correspondance du 15 mai 1992, la banque a précisé qu'elle subordonnait, en outre, l'octroi d'un nouveau prêt au paiement des agios dus au titre du premier ainsi qu'à la justification d'un quota de réservation égal à 40 % du programme ;
qu'estimant que ces conditions n'étaient pas réalisées, la banque a finalement refusé le crédit sollicité le 1er juillet 1992, que la SCI a été déclarée en redressement puis en liquidation judiciaires en mai et juin 1994 ; que Mme X..., désignée comme liquidateur de la SCI, a mis en cause la responsabilité de la banque en lui reprochant d'avoir manqué à son obligation d'accorder un concours auquel elle s'était engagée ; que la cour d'appel a rejeté ces prétentions en décidant que la banque n'avait donné qu'un accord de principe qui l'obligeait seulement à poursuivre les négociations de bonne foi, et que les conditions auxquelles elle avait subordonné l'octroi du prêt avaient été légitimes ;
Attendu que Mme X..., agissant en sa qualité de liquidateur de la SCI Santa Monica, fait grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen :
1) que lors des négociations avec la SCI Santa Monica, la Banque du bâtiment et des travaux publics n'avait jamais contesté la faculté des associés de tenir l'engagement pris dans leur lettre du 2 juin 1992 de procéder à l'apport de 2 millions de francs, si bien que la cour d'appel, tenue selon ses propres motifs, d'apprécier l'exécution de l'accord de principe pris le 16 novembre 1990 par la banque de financer la seconde partie de l'acquisition de l'assiette foncière au regard des exigences de bonne foi, ne pouvait retenir au soutien de sa décision un manquement de la SCI Santa Monica à son engagement d'apport par ses associés de la somme de 2 millions de francs, sans priver sa décision de tout fondement légal au regard de l'article 1134 du Code civil ;
2) qu'elle le pouvait d'autant moins que la banque n'avait pas contesté, par un moyen précis et distinct, la faculté des associés de la SCI Santa Monica de répondre de l'engagement d'apports propres pris le 2 juin 1992, si bien que la cour d'appel a violé les articles 4 et 7 du nouveau Code de procédure civile ;
3) qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la condition de quota de 40 % de réservation posée par la banque par lettre du 15 mai 1992 n'était pas condition de l'accord de principe pris par la banque le 16 novembre 1990 de financer l'achat du second terrain, si bien qu'en opposant littéralement et strictement à la SCI Santa Monica la condition de quota unilatéralement imposée par la banque après conclusion de l'accord de principe, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
4) qu'il avait été démontré qu'en tout état de cause, la condition de quota de 40 % de réservation posée par la banque par lettre du 15 mai 1992 concernait, non le crédit en cause relatif à l'achat du second terrain, mais le crédit d'accompagnement pour la réalisation des travaux, si bien qu'en ne s'expliquant pas sur ce point, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant estimé, dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui leur étaient soumis, que la lettre du 15 mai 1992, qui n'est pas arguée de dénaturation, imposait comme condition de l'octroi du concours litigieux la justification d'un quota minimum de réservations, les juges du fond ont, par là même, répondu en les écartant aux conclusions invoquées par la quatrième branche du moyen ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel a retenu, dans des motifs qui ne sont pas critiqués par le pourvoi, que la lettre du 16 novembre 1990 ne constituait qu'un accord de principe obligeant seulement la banque à poursuivre, de bonne foi, les négociations entreprises avec la SCI ; qu'en l'état de ce motif dont il se déduisait que les conditions définitives de l'octroi de son concours restaient à préciser, la cour d'appel, loin de violer le texte visé par la troisième branche du moyen, en a fait au contraire l'exacte application en décidant que la banque avait pu légitimement, en l'état des difficultés éprouvées à l'époque par le marché immobilier, exiger de la SCI la justification d'un quota de réservation minimum ;
Attendu, enfin, que l'arrêt relève que la SCI n'avait, à la date de refus du prêt litigieux, ni réglé les agios dus au titre du premier prêt, ni justifié d'un quota de réservation de 40 % du programme ce dont il résultait qu'en tout état de cause, et indépendamment de la question de savoir si les associés étaient ou non en mesure de procéder à l'apport complémentaire en fonds propres exigé par la banque, elle ne satisfaisait pas à toutes les conditions d'octroi du prêt ; que l'arrêt se trouvant ainsi suffisamment justifié, les griefs articulés par les première et deuxième branches du moyen sont inopérants ;
Qu'il s'ensuit que le moyen, mal fondé en ses troisième et dernière branches, ne peut être accueilli pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.