CA Aix-en-Provence, 8e ch. B, 6 juillet 2017, n° 15/05231
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Défendeur :
Emob (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Gerard
Conseillers :
Mme Demory-Petel, Mme Dubois
EXPOSE DES FAITS :
Créée le 13 décembre 2005, la SARL Emob, ayant pour activité « la conception d'application multimédia et audiovisuelles... », et dont le gérant est M. C., avait pour associés :
- Nicolas C., détenteur de 52 parts sociales
- Romain G., détenteur de 16 parts sociales
- Olivier M., détenteur de 16 parts sociales
- Gaëlle C., détenteur de 16 parts sociales
Le capital social de la SARL Otablo créée le 7 septembre 2009 et ayant pour gérant Romain G., constitué de 100 parts sociales, était détenu par :
- Nicolas C. pour 33 parts sociales
- Romain G. pour 34 parts sociales
- Olivier M. pour 33 parts sociales
Pour mettre fin à un conflit entre associés, ces derniers ont conclu les 27 et 31 mai 2013, un protocole transactionnel prévoyant un certain nombre d'engagements réciproques, dont en particulier :
- un engagement de MM C. et G. à revendre les parts sociales qu'ils détiennent dans les sociétés Otablo et Emob,
- l'engagement de Emob à rembourser le compte courant de Romain G. (soit 4745,48 €), ainsi que les intérêts afférents.
Les parties n'ont pas exécuté leurs engagements dans les délais très brefs contractuellement prévus.
Par acte du 27 février 2014, M. G. a alors assigné la SARL Emob en remboursement de son compte courant à hauteur de 4 745,48 €, devant le tribunal de commerce de Toulon.
Par jugement du 19 janvier 2015, ce tribunal l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné à payer la somme de 1 000 € à la SARL Emob au titre de1'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
Par acte du 30 mars 2015, M. G. a interjeté appel.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 18 mai 2016 et tenues pour intégralement reprises, il demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1874 et suivants du code civil, de :
- infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions,
- condamner la société Emob à lui payer la somme de 4 745,48 € en remboursement de son compte-courant d'associé,
- la condamner à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens, en ce compris la taxe parafiscale.
Dans ses dernières écritures déposées et notifiées le 10 août 2015 et tenues pour intégralement reprises, l'intimée demande à la cour, au visa de l'article 1244-1 du code civil, de :
- à titre principal :
- confirmer le jugement entrepris,
- dire que la demande remboursement immédiat du compte courant de l'appelant par la société Emob est abusive,
- constater que M. G. ne peut se prévaloir d'aucune priorité de remboursement de son compte courant sur les autres associés de la SARL Emob,
- le débouter de sa demande en ce que le remboursement de son compte courant concourrait à des difficultés financières insurmontables pour la société Emob,
- à titre subsidiaire :
- accorder à la SARL Emob des délais de règlement pour une durée de 24 mois,
- condamner la requise (sic) au paiement d'une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 avril 2017.
SUR CE :
La caractéristique essentielle du compte courant d'associé est, en l'absence de convention particulière ou statutaire, d'être remboursable à tout moment.
En l'espèce, les statuts de la société Emob contiennent un article 16 aux termes duquel chaque associé peut consentir des avances à la société sous forme de versements dans la caisse sociale. Les conditions de rémunération et de retrait de ces comptes courants sont fixées par la gérance.
L'intimée reconnaît qu'à ce jour la gérance de la société n'a pas arrêté ces conditions.
Elle en déduit que c'est à bon droit que le tribunal a jugé du bien fondé de la demande de remboursement en fonction des capacités de la SARL Emob et précise à cet égard qu'elle n'est pas en mesure de rembourser les comptes courants des associés qui en réclament le paiement, sauf à concourir à son état de cessation des paiements.
Mais, même lorsque la société fait face à des difficultés, elle ne peut pas s'opposer à la demande de remboursement de son compte courant par un associé.
Par ailleurs, dès lors que l'avance en compte courant est exigible à tout moment en l'absence de terme fixé, l'intimée allègue vainement de l'absence d'exécution de la transaction qui prévoyait le remboursement immédiat du compte courant de M. G..
Pour les mêmes motifs, elle fait également valoir à tort que l'appelant ne peut se prévaloir d'aucune priorité de remboursement de son compte courant sur les autres associés de la société.
Enfin le moyen tiré du caractère abusif de la demande de remboursement qui constituerait un moyen de pression exercé par M. G. dans le cadre d'un conflit plus large l'opposant à la société et à M. C., n'est étayé d'aucun élément de preuve et doit donc être écarté.
Par conséquent et dès lors qu'elle ne conteste pas le montant du compte courant dont le remboursement est réclamé, la SARL Emob sera condamnée à payer à l'appelant la somme de 4 745,48 €.
Ayant déjà, de fait, bénéficié des plus larges délais de paiement depuis l'assignation du 27 février 2014, elle sera déboutée de sa demande d'application de l'ancien article 1244-1 devenu 1343-5 du code civil.
Comme elle succombe, l'intimée sera condamnée aux entiers dépens et à payer à M. G. la somme de 2 000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
CONDAMNE la SARL Emob à payer à Romain G. la somme de 4 745,48 € au titre de son compte courant d'associé,
LA CONDAMNE à payer à M. G. la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE le surplus des demandes,
CONDAMNE la SARL Emob aux entiers dépens de première instance et d'appel.