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Décisions

Cass. com., 11 janvier 2017, n° 15-17.332

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

M. Sémériva

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Paris, du 14 avril 2015

14 avril 2015

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Denty a assigné l'association Les Amis de Delage en déchéance, pour les produits de la classe 12 et à compter du 6 avril 2007, des droits attachés à la marque française semi-figurative « Delage » n° 1 310 386, enregistrée en 1984 afin de désigner des véhicules et appareils de locomotion ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que l'usage sérieux suppose l'exploitation du signe qui correspond à la fonction de la marque, qui est de garantir au consommateur concerné l'identité d'un produit en lui permettant de distinguer sans confusion possible ceux qui ont une autre provenance, mais que cet usage doit être apprécié concrètement en tenant compte notamment des caractéristiques des produits en cause et de la structure du marché concerné, la seule circonstance que les produits pour lesquels la marque a été enregistrée ne soient plus présents sur le marché, s'agissant en particulier de véhicules d'époque déjà construits ou commercialisés, ne pouvant exclure un usage sérieux de la marque ; qu'il relève qu'en l'espèce, il n'est nullement contesté que, pour les véhicules ou appareils de locomotion visés au dépôt, le signe, sous la forme déposée, ne pouvait être utilisé que sur le marché de collectionneurs, la création et fabrication des automobiles et moteurs Delage ayant cessé en 1955 soit depuis trente ans lors du dépôt de la marque ; qu'il retient que vainement la société Denty prétend que cette marque historique de l'automobile ne serait pas utilisée par l'association, dès lors que celle-ci contribue par son action à en conserver les éléments distinctifs pour des véhicules ou des éléments nécessaires à leur utilisation ou locomotion, que l'association a utilisé ce signe conformément à son objet associatif et à la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir l'origine des véhicules ou accessoires pour lesquels elle a été enregistrée, nonobstant son absence de visée économique à titre personnel et qu'il est ainsi justifié de l'usage sérieux de la marque par son titulaire, pour des produits, même quantitativement limités, se rapportant directement à ceux déjà commercialisés, et visant à satisfaire les besoins de la clientèle de ceux-ci par la conservation de la marque dans le secteur automobile, par l'identification et l'inscription des produits, et en favorisant les démarches administratives nécessaires à ces fins ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'association n'était pas titulaire de la marque sous laquelle ces véhicules avaient été mis sur le marché et qu'elle faisait usage de la marque « Delage » n° 1 310 386, enregistrée après la cessation de la commercialisation de ces véhicules, pour des produits et services qui n'étaient pas couverts par son enregistrement, de sorte que la même marque n'était pas effectivement utilisée par son titulaire pour des pièces détachées entrant dans la composition ou la structure de ces produits ou pour des produits ou services se rapportant aux produits déjà commercialisés par ses soins, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit n'y avoir lieu à déchéance de l'association Les Amis de Delage de ses droits sur la marque française semi figurative n° 1 310 386 pour les produits de la classe 12 à compter du 6 avril 2007, en ce qu'il rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation et en ce qu'il statue sur les dépens de première instance et d'appel, l'arrêt rendu le 14 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.