Cass. com., 24 septembre 2003, n° 01-14.934
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 juin 2001), qu'ayant déposé en France, dans le courant de l'année 1997, deux marques déclinant le nom "Anastasia", la société Twentieth Century Fox a assigné la Société de diffusion des grandes marques (SDGM) en déchéance des droits attachés à l'enregistrement par ses soins, en 1980, d'une marque employant le même terme ; que la société Boston market est volontairement intervenue à l'instance, pour défendre à cette demande en tant que propriétaire de la marque litigieuse, par suite de transmission de l'entier patrimoine d'une société DIV, qui l'avait elle-même acquise entre-temps, et agir reconventionnellement en contrefaçon de cette marque ;
Attendu que la société Boston market fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la déchéance de ses droits sur la marque, et d'avoir rejeté son action en contrefaçon, alors, selon le moyen :
1) que le propriétaire d'une marque peut faire obstacle à la déchéance de ses droits sur le fondement de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle, en invoquant tous actes d'exploitation de sa marque qui procèdent directement, voire indirectement, de son autorisation ; que selon les énonciations de l'arrêt attaqué, les actes d'exploitation avaient été effectués par la société SM diffusion, société fondée par Mme X..., laquelle bénéficiait d'un contrat de licence de marque consenti le 26 avril 1994 par la société DIV (alors titulaire de la marque) ; qu'en affirmant que le propriétaire de la marque n'aurait pu, pour faire obstacle à la déchéance de ses droits, se prévaloir de ces actes d'exploitation, au prétexte que le contrat de licence avait été conclu intuitu personae, et qu'ainsi, l'autorisation donnée à Mme X... n'aurait pu valoir pour la société SM diffusion, sans recherche, comme elle y était invitée, si l'exploitation faite sous le nom de la société SM diffusion ne procédait en réalité que de l'autorisation d'exploitation donnée à son associée fondatrice, Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle,
2) que le juge ne peut soulever d'office un moyen sans inviter le parties à en discuter préalablement ; que la société Boston market, pour démontrer l'exploitation de sa marque, versait aux débats une attestation péremptoire de Mme Y... qui affirmait avoir acquis auprès de la société diffusion des vêtements griffés "Anastasia", attestation à laquelle étaient précisément joints ces vêtements ; qu'en écartant ces éléments de preuve, motif pris de l'impossibilité de déterminer si ces vêtements, "qui comportent effectivement une griffe Anastasia", correspondaient à ceux visés dans l'attestation, sans inviter les parties à discuter préalablement de ce moyen soulevé d'office, contestant l'authenticité même des preuves, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile,
3) que le juge doit examiner tous les éléments de preuve qui lui sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour démontrer l'exploitation du signe "Anastasia" à titre de marque, la société Boston market versait aux débats une coupure de presse évoquant la relance de la marque "Anastasia" par Mme X..., dont la première collection se composait d'une douzaine de pièces ; qu'en négligeant d'examiner cet élément de preuve, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant retenu que le contrat de licence a été consenti intuitu personae à Mme X..., qui n'avait pas la possibilité d'accorder une sous-licence, qu'il en résulte que l'autorisation ne valait pas pour la société SM diffusion, et que, si l'autorisation peut être implicite, elle doit cependant être révélée par un acte positif, la seule tolérance ne pouvant être retenue comme valant autorisation du titulaire de la marque, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise ;
Attendu, d'autre part, qu'abstraction faite du motif relatif à l'authenticité d'une pièce annexée à une attestation, justement critiqué, par la deuxième branche du moyen, mais surabondant, l'arrêt écarte souverainement la valeur probante de cette attestation au regard du débat sur la déchéance de la marque, en constatant qu'elle ne contient aucune référence de date ;
Et attendu, enfin, que la cour d'appel n'était pas tenue d'énumérer l'ensemble des pièces dont elle a apprécié la valeur probante pour décider que nulle exploitation sérieuse la marque n'était établie pour la période comprise entre les 28 décembre 1991 et 28 décembre 1996 ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.