Cass. 1re civ., 6 juin 2001, n° 98-20.673
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sargos
Rapporteur :
M. Aubert
Avocat général :
Mme Petit
Avocats :
SCP Parmentier et Didier, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Attendu que, le 18 février 1985, M. de Y, président-directeur général de la société L'Assurance universelle, a adressé à M. X, avec qui il réalisait certaines opérations en co-courtage, une lettre précisant que " pour ce qui concerne les contrats que nous assurons en commun, j'ai noté votre accord pour nous laisser une priorité de reprise si d'aventure vous décidiez un jour de ne plus intervenir " ; qu'à cela, M. X a répondu, le 1er mars suivant, " je vous confirme mon accord pour vous laisser une priorité de reprise sur les contrats que nous assurons en commun dans le cas d'une cessation d'activité " ; qu'en vertu d'un protocole d'accord du 31 mai 1994, M. X a cédé ses actions dans la société Cabinet X à la société de courtage Sega, l'évaluation de ces actions étant établie en fonction du chiffre d'affaires réalisé au 31 décembre 1993 ; que, par une lettre du 3 mai 1994, L'Assurance universelle a rappelé au Cabinet X la priorité de reprise qui lui avait été consentie et qu'elle envisageait de faire valoir, à la suite de quoi elle a formulé certaines propositions le 20 juillet suivant ; que le droit de priorité n'ayant finalement pas été exercé et l'accord avec la société Sega s'étant réalisé après un avenant ayant exclu de la base d'évaluation des actions cédées le chiffre d'affaires réalisé par le Cabinet X avec L'Assurance universelle, M. X a assigné cette société pour faire prononcer la nullité de la clause de reprise, faire juger fautive l'opposition de L'Assurance universelle à la cession des contrats de courtage à la société Sega et la condamner à l'indemniser du préjudice causé du fait de la réduction du prix de la cession ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 10 juin 1998) l'a débouté de toutes ses demandes ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu, d'abord, qu'il n'est pas dans la nature du pacte de préférence de prédéterminer le prix du contrat envisagé et qui ne sera conclu, ultérieurement, que s'il advient que le promettant en décide ainsi ; que c'est donc à bon droit que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient la validité de la clause après avoir relevé que M. X conservait, pour l'exécution de celle-ci, la liberté de fixer les conditions de la cession envisagée et d'en déterminer le prix ; qu'ensuite, la cour d'appel, saisie d'une demande d'annulation de la clause de préférence fondée sur ce qu'elle ne comportait pas de délai et qui a justement rappelé que la stipulation d'un délai n'est pas une condition de validité du pacte de préférence, n'avait pas à s'interroger sur une éventuelle caducité de celui-ci ; qu'enfin, c'est souverainement que les juges du fond, qui n'avaient pas à entrer dans le détail de l'argumentation développée devant eux, ont estimé que la preuve de la renonciation alléguée par M. X n'était pas rapportée ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la première branche est rendue inopérante par l'effet du rejet du premier moyen ; qu'ensuite, ayant, par motifs propres et adoptés, relevé, outre le fait que M. X avait commis une faute en signant la promesse de cession à la société Sega sans avoir fait préalablement d'offre à la société L'Assurance universelle, que le pacte de préférence ne conférait à celle-ci aucun moyen de contrainte, hormis le droit pour elle de répondre en priorité à l'offre de contracter formulée par le promettant aux conditions fixées par lui, la cour d'appel a, par ces motifs, légalement justifié sa décision de ne retenir aucune faute à la charge de L'Assurance universelle pour avoir invoqué son droit de priorité ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Et, sur le troisième moyen :
Attendu qu'ayant relevé l'inanité de l'argumentation développée par le demandeur, notamment en ce qu'il prétendait que la clause de préférence mettait son bénéficiaire en position, à son seul gré, de décider d'acquérir ou de s'opposer à toute cession, ce à quoi le premier juge avait très clairement répondu, la cour d'appel a pu estimer que M. X avait, en formant un appel fondé sur des moyens identiques à ceux soulevés devant le premier juge et pertinemment rejetés par celui-ci, fait dégénérer en abus son droit d'appel ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.