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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 9 mai 2018, n° 17/05720

TOULOUSE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Egide (Selas)

Défendeur :

Sabart Aero Tech (SAS), SCP C. B. F.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Penavayre

Avocats :

M. Delmotte, M. Truche

T. com Toulouse, du 20 nov. 2017, n° 201…

20 novembre 2017

Exposé du litige

Par jugement du 13 juin 2016, le tribunal de commerce de Foix a ouvert la sauvegarde de la société Sabart Aero Tech (la société), ayant pour activité la production, la transformation et la commercialisation d'alliages d'aluminium sous forme de billettes, a désigné la SCP C. B. F. (l'administrateur) en qualité d'administrateur judiciaire et la Selarl B. et associés en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 7 novembre 2016, le tribunal a converti cette procédure collective en redressement judiciaire, fixé la date de cessation des paiements au 7 novembre 2016, maintenu la SCP C. B. F. dans ses fonctions d'administrateur.

Par jugement du 19 décembre 2016, le tribunal a prolongé la période d'observation jusqu'au 12 juin 2017.

Le 09 janvier 2017, la société et l'administrateur ont déposé une requête auprès du juge-commissaire aux fins d'être autorisés à signer une transaction avec la société Sermas, prévoyant le paiement pour la mise en service d'une machine outils de la somme globale de 44.893 euros TTC au profit de la société Sermas et la cession au profit de cette société d'une scie à métaux de marque Kasto moyennant la somme de 30 000 euros TTC.

Le mandataire, qui a contesté l'opportunité de cette transaction, a soulevé l'irrecevabilité de la requête en l'absence de communication de l'avis du ministère public.

Par jugement du17 juillet 2017, le tribunal a ordonné la cession totale de la société Sabart au profit d'une société tierce, a prononcé la liquidation judiciaire de la société S abart et a désigné la Selas Egide (le liquidateur) en qualité de liquidateur judiciaire.

Par ordonnance du 20 juillet 2017, le juge-commissaire, relevant qu'en cours de délibéré, l'administrateur avait un obtenu un accord du créancier pour la délivrance du certificat CE relatif à la machine-outil contre paiement des ses créances à concurrence de la somme de 84 493€, a autorisé la société et l'administrateur à transiger et à signer le protocole transactionnel.

Le 27 juillet 2017, le liquidateur a formé opposition contre cette ordonnance.

Par jugement du 20 novembre 2017, le tribunal a confirmé l'ordonnance.

Par déclaration du 1er décembre 2017, le liquidateur a relevé appel de cette décision.

Vu les conclusions du 11 janvier 2018 du liquidateur demandant à la cour :

A titre principal,

d'infirmer le jugement,

d'infirmer l'ordonnance du 20 juillet 2017 en ce qu'elle a autorisé la transaction,

de rejeter la demande d'autorisation de transaction sollicitée par requête du 13 janvier 2017,

de condamner solidairement la société et l'administrateur à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 12 février 2018 de la société et de l'administrateur demandant à la cour de confirmer le jugement et de condamner le liquidateur à leur payer la somme de 3000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le ministère public, qui a pris connaissance du dossier le 27 décembre 2017, s'en est rapporté.

La clôture de l'instruction du dossier est intervenue le 19 février 2018.

Motifs

Attendu qu'aux termes de l'article L. 622-7 II du code commerce, le juge-commissaire peut autoriser le débiteur à faire un acte de disposition étranger à la gestion courante de l'entreprise, à consentir une hypothèque, un gage ou un nantissement ou à compromettre ou transiger. Néanmoins, si cet acte est susceptible d'avoir une incidence déterminante sur l'issue de la procédure, le juge-commissaire ne peut statuer qu'après avoir recueilli l'avis du ministère public.

Attendu qu'en l'espèce, pour justifier le principe de la transaction, la société et l'administrateur précisaient dans leur requête, au regard du conflit qui les opposait à la société Sermas, 'qu'il est de l'intérêt de la procédure collective de procéder au paiement des sommes précitées et d'autoriser la cession d'actif envisagée dans le cadre d'une transaction afin de finaliser la chaîne de parachèvement et permettre son transfert de propriété' ; 'que tant que le transfert de propriété (de la machine outil) n'a pas eu lieu, la société Sabart se trouve dans l'impossibilité de céder le matériel et ses accessoires... ; 'qu'il est patent que la société Sermas est en droit d'exercer un droit de rétention sur les machines qu'elle a fabriquées ce qui aurait pour effet de paralyser l'activité de la société.

Attendu qu'il se déduit des termes mêmes de cette requête que la transaction était susceptible d'avoir une incidence déterminante sur l'issue de la procédure ; qu'ainsi, le juge-commissaire ne pouvait autoriser la transaction sans avoir recueilli l'avis préalable du ministère public.

Attendu qu'il ne résulte pas de la lecture de l'ordonnance que cet avis a été donné ; que le juge-commissaire n'a d'ailleurs pas répondu à la fin de non-recevoir soulevée par le liquidateur qui invoquait pourtant à bon droit la nécessité de recueillir l'avis préalable du ministère public.

Attendu que le jugement, qui n'a pas répondu au moyen tiré du défaut d'avis préalable du ministère public et qui est essentiellement dicté par des motifs d'opportunité, doit être infirmé.

Attendu que l'ordonnance du juge-commissaire, qui est entachée d'excès de pouvoir en ce que le juge-commissaire a statué sans avoir recueilli l'avis préalable du ministère public, doit être annulée.

Attendu qu'au regard de la liquidation judiciaire de la société, le projet de transaction n'est plus commandé par la poursuite d'activité de l'entreprise et ne présente plus d'intérêt particulier pour l'issue de la procédure collective; qu'il n'y a donc pas lieu d'autoriser la transaction.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions ;

Annule l'ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Foix du 20 juillet 2017 ;

Constate que la requête aux fins de transaction n'a plus d'intérêt au regard de la liquidation judiciaire de la société Sabart Aero Tech ;

Dit n'y avoir lieu à autoriser la transaction projetée ;

Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de la procédure collective ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la Selas Egide, ès qualités, de la société Sabart Aero Tech et de la SCP C. B. F., ès qualités.