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Décisions

Cass. com., 11 juin 1981, n° 80-10.483

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vienne

Rapporteur :

M. Jonquères

Avocat général :

M. Cochard

Avocat :

Me Choucroy

Paris, 5e ch., du 9 nov. 1979

9 novembre 1979

SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES ET SUR LE DEUXIEME MOYEN REUNIS :

ATTENDU QUE SELON L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 9 NOVEMBRE 1979), LA SOCIETE MARIE MARTINE (SOCIETE MM), QUI EXPLOITE DES BOUTIQUES DE PRET-A-PORTER FEMININ S'EST MISE, DANS LE DESSEIN DE POUVOIR ETENDRE L'ACTIVITE D'UNE DE SES BOUTIQUES AUX VETEMENTS DE FOURRURE, EN RAPPORT AVEC LA SOCIETE INTERNATIONALE DE FOURRURES (SOCIETE IF), FABRICANT DE FOURRURES QUI DIFFUSE SES PRODUITS SOUS LA MARQUE "YVES SAINT-LAURENT" AVEC LA GRIFFE YSL SUIVANT UN CONTRAT DE LICENCE DE MARQUES CONCLU LE 1ER JUILLET 1976 AVEC LA SOCIETE YVES SAINT-LAURENT (SOCIETE YSL) ; QUE CE CONTRAT RESERVAIT A CETTE DERNIERE LE DROIT DE REFUSER LES POINTS DE VENTE QUI NE LUI PARAITRAIENT PAS CORRESPONDRE A LA RENOMMEE DE SES MARQUES ; QUE PAR LETTRE DU 20 DECEMBRE 1976, FAISANT ETAT DES POURPARLERS EN COURS AVEC LA SOCIETE IF, LA SOCIETE MM A INFORME LA SOCIETE YSL DU PROJET DE CREATION D'UNE "BOUTIQUE YVES SAINT-LAURENT B GAUCHE" ET LUI A OFFERT, EN CONTREPARTIE DE SON ACCEPTATION, UN INTERESSEMENT DE 5 % SUR LE CHIFFRE DES VENTES PENDANT LES TROIS PREMIERES ANNEES, AVEC UNE GARANTIE MINIMUM SELON LES ANNEES, QUE LA SOCIETE YSL N'A PAS REPONDU A CETTE LETTRE, QUE LES CONVERSATIONS ENGAGEES ENTRE LA SOCIETE IF ET LA SOCIETE MM A ABOUTI A UN ECHANGE DE LETTRES, LA PREMIERE DU 5 JANVIER 1977 DE LA SOCIETE IF DEMANDANT A LA SOCIETE MM D ACCORD SUR UN PROJET DE CONTRAT ANNEXE ; LA SECONDE DU 6 JANVIER 1977 DE LA SOCIETE MM X SON ACCORD COMPLET SUR CE PROJET ET DEMANDANT D'ETABLIR LE CONTRAT ; QUE CE PROJET DE CONTRAT PREVOYAIT QU'EN CONTREPARTIE D'UNE EXCLUSIVITE DE LA VENTE DES MODELES DE FOURRURE DE MARQUE YSL POUR LA "BOUTIQUE MARIE MARTINE B Z" LA SOCIETE MM S'ENGAGEAIT A ACHETER A LA SOCIETE IF UNE QUANTITE MINIMA DE MANTEAUX DE FOURRURE DE FEMME SELON LES MODALITES SUIVANTES : LA PREMIERE ANNEE POUR UNE VALEUR DE 1.500.000 FRANCS, LA DEUXIEME ANNEE POUR 2.000.000 FRANCS ET LA TROISIEME ANNEE POUR 2.500.000 FRANCS ; QUE LE CONTRAT PROJETE N'A PAS ETE REDIGE, LA SOCIETE YSL AYANT INFORME LA SOCIETE IF DE SON REFUS D'AGREER LA "BOUTIQUE MM RIVE Z" COMME POINT DE VENTE DES FOURRURES DE SES MARQUES ; QU'INVOQUANT UN COMMENCEMENT D'EXECUTION DE L'ACCORD INTERVENU ENTRE ELLES, LE 6 JANVIER 1977, LA SOCIETE MM A ASSIGNE LA SOCIETE IF EN REPARATION DU PREJUDICE SUBI EN RAISON DE SA CARENCE ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR DEBOUTE LA SOCIETE MM DE SA DEMANDE, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, D'UNE PART L'ARRET QUI DEVAIT RESTITUER SON EXACTE QUALIFICATION A L'ACTE DU 5 JANVIER 1977 NE POUVAIT LEGALEMENT LE QUALIFIER DE SIMPLE PROJET TOUT EN CONSTATANT L'ACCORD DES PARTIES SUR LE PRINCIPE DE LA CLAUSE D'EXCLUSIVITE SES CONDITIONS D'OCTROI ET SA DUREE AINSI QUE SUR LES QUANTITES ANNUELLES DE MARCHANDISES A VENDRE ET A ACHETER, ALORS QUE D'AUTRE PART, L'INDETERMINATION DU PRIX REPOSE SUR LES CONSTATATIONS CONTRADICTOIRES QUE LA VARIATION DES PRIX POUVAIT DEPENDRE DE CIRCONSTANCES ECONOMIQUES ET DE LA MODE ET QU'ILS ETAIENT NEANMOINS FIXES PAR LA SEULE VOLONTE D'UNE PARTIE, ALORS QUE, ENCORE, AINSI QU'IL ETAIT RAPPELE AUX CONCLUSIONS, LE CONCEDANT PEUT VALABLEMENT FIXER LE PRIX DE VENTE DANS LE CADRE D'UN QUOTA PREVU QUI PERMET DE RENDRE LE PRIX DETERMINABLE A PARTIR DU TARIF FOURNISSEUR, ET ALORS QU'ENFIN L'ARRET A AINSI AJOUTE AU CONTRAT UNE CONDITION QUI N'Y FIGURAIT PAS ET TIREE D'UNE CONVENTION DISTINCTE CONCLUE ENTRE LE LICENCIE ET LE CONCEDANT, LAQUELLE ETAIT DONC INOPPOSABLE A LA PARTIE NON SIGNATAIRE ET NE LUI A DU RESTE JAMAIS ETE COMMUNIQUEE AU MOMENT DU CONTRAT ; QU'IL A DONC DENATURE LA TENEUR DE CE CONTRAT ;

MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR RETENU, QUE LE PRINCIPE D'UN CONTRAT D'EXCLUSIVITE RELATIF A LA DISTRIBUTION DES MODELES DE FOURRURES YSL AVAIT FAIT L'OBJET D'UN ACCORD ENTRE LES PARTIES, LA COUR D'APPEL, REPONDANT AUX CONCLUSIONS INVOQUEES ET SANS SE CONTREDIRE, A CONSTATE D'UNE PART QUE LA REFERENCE A UN CHIFFRE D'AFFAIRES ANNUEL NE PERMETTAIT PAS DE DESIGNER LES FOURNITURES SUCCESSIVES OBJET DE L'ACCORD, D'AUTRE PART, QUE DANS UNE CONJONCTURE OU LES PRIX ETAIENT SUSCEPTIBLES DE VARIER EN FONCTION DES CIRCONSTANCES ECONOMIQUES ET DE LA MODE LA CLAUSE LITIGIEUSE NE FAISAIT REFERENCE NI A UN PRIX DE MARCHE RESULTANT DU COMMERCE DE LUXE DE LA FOURRURE FEMININE, NI A UN TARIF FOURNISSEUR ACCEPTE PAR L'ENSEMBLE DES DISTRIBUTEURS DE LA SOCIETE IF ET QU'EN DEFINITIVE LES PRIX DEPENDAIENT DE LA SEULE VOLONTE DE CETTE SOCIETE ; QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, ABSTRACTION FAITE DU MOTIF SURABONDANT CRITIQUE PAR LE DEUXIEME MOYEN, ET HORS TOUTE DENATURATION, C'EST A BON DROIT, QUE LA COUR D'APPEL A DECIDE QUE L'ACCORD DONT SE PREVALAIT LA SOCIETE MM Y NUL FAUTE PAR LE CONTRAT DE DETERMINER LA QUOTITE DES CHOSES VENDUES ET LEUR PRIX ; QUE LE PREMIER MOYEN EN SES TROIS BRANCHES ET LE DEUXIEME MOYEN NE SONT PAS FONDES ;

SUR LE TROISIEME MOYEN :

ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DEBOUTE LA SOCIETE MM DE SON ACTION EN DOMMAGES-INTERETS ALORS QUE, SELON LE POURVOI, APRES AVOIR CONSTATE QUE LA RUPTURE DES POURPARLERS ETAIT LE FAIT EXCLUSIF DE LA SOCIETE IF, L'ARRET N'A PAS TIRE LES CONSEQUENCES LEGALES DE TELLES CONSTATATIONS QUI EMPORTAIENT RESPONSABILITE GENERATRICE DE DOMMAGES-INTERETS DE LA PART DE L'AUTEUR DE LA RUPTURE DES POURPARLERS ; MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL CONTRAIREMENT AUX AFFIRMATIONS DU MOYEN A RETENU QUE SI LE CONTRAT PREVU N'AVAIT PAS ETE REDIGE C'EST DU FAIT DU REFUS DE LA SOCIETE YSL DE DONNER SON AGREMENT A LA BOUTIQUE DE LA SOCIETE MM C RUE DE SEVRES A PARIS ; QUE LE MOYEN MANQUE EN FAIT ;

SUR LE QUATRIEME MOYEN :

ATTENDU QU'IL EST ENFIN REPROCHE A L'ARRET D'AVOIR CONDAMNE LA SOCIETE MM A PAYER LA SOMME DE UN FRANC DE DOMMAGES-INTERETS A LA SOCIETE IF, ET A SUBIR LA PUBLICATION DE LA DECISION DE JUSTICE A SES FRAIS, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, LE DROIT D'AGIR EN JUSTICE NE PEUT DEGENERER EN ABUS LORSQUE SA LEGITIMITE A ETE RECONNUE PAR LES JUGES DU PREMIER DEGRE MALGRE L'INFORMATION DONT LA DECISION A ETE L'OBJET ; MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, PEU IMPORTANT A CET EGARD LA DECISION DES PREMIERS JUGES, A CONSTATE QUE L'ACTION DE LA SOCIETE MM, A ETE ENGAGEE DE MAUVAISE FOI, QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 9 NOVEMBRE 1979 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.