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Décisions

CE, 7e et 2e ch. réunies, 15 novembre 2017, n° 409728

CONSEIL D'ÉTAT

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Commune d'Aix-en-Provence, SEMEPA (SEM)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Rapporteur :

M. Rzepski

Rapporteur public :

M. Henrard

Avocats :

Me Haas, SCP Foussard, Froger

CAA Marseille, prés., du 30 mars 2017, n…

30 mars 2017

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure

Le préfet des Bouches-du-Rhône a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la convention conclue le 9 juin 2016 entre la commune d'Aix-en-Provence et la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix (SEMEPA), portant résiliation partielle de la convention de délégation du service public du 29 décembre 1986 en tant qu'elle concerne l'exploitation des parcs de stationnement Bellegarde, Cardeurs Carnot, Méjanes, Mignet, Pasteur et Signoret et résiliation totale de la convention de délégation du service public du 24 octobre 2003 conclue pour l'exploitation du parc de La Rotonde, valant promesse de vente sous condition suspensive des huit parcs de stationnement et fixant les conditions de la prise de possession par anticipation de ces biens par la SEMEPA.

Par une ordonnance n° 1610104 du 18 janvier 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, faisant droit à cette demande, a suspendu l'exécution de cette convention du 9 juin 2016.

Par une ordonnance n°s 17MA00470, 17MA00472 du 30 mars 2017, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté les appels formés par la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA, par des requêtes, enregistrées respectivement sous les n°s 17MA00470 et 17MA00472, contre cette ordonnance.

Procédures devant le Conseil d'Etat

1° Sous le n° 409728, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 et 28 avril 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune d'Aix-en-Provence demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 409799, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un autre mémoire, enregistrés les 14 et 29 avril et les 15 septembre et 20 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la même ordonnance du 30 mars 2017 ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 ;

- l'ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 ;

- le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Grégory Rzepski, maître des requêtes en service extraordinaire, 

- les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Haas, avocat de la commune d'Aix-en-Provence et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 octobre 2017, présentée par la SEMEPA.

1. Considérant que les pourvois de la commune d'Aix-en-Provence et de la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix (SEMEPA) sont dirigés contre la même décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission " ; qu'aux termes du troisième alinéa du même article, reproduit à l'article L. 554-1 du code de justice administrative: " Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois " ;

3. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée que, par une convention conclue le 9 juin 2016, la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA ont entendu résilier la convention relative à la concession de la gestion du service public du stationnement payant sur voirie et de l'exploitation de sept parcs de stationnement publics du 29 décembre 1986 en tant qu'elle concerne l'exploitation des ouvrages hors voirie Bellegarde, Cardeurs, Carnot, Méjanes, Mignet, Pasteur et Signoret ainsi que la convention de délégation de service public du 24 octobre 2003 conclue pour l'exploitation du parc de La Rotonde ; que la convention du 9 juin 2016 comprend également une promesse de vente sous condition suspensive du déclassement de ces ouvrages ; que le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré cette convention au tribunal administratif de Marseille ; que le déféré était assortie d'une demande de suspension de l'exécution de la convention sur le fondement de l'article L. 554-1 du code de justice administrative ; que, par une ordonnance du 18 janvier 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a fait droit à cette demande de suspension au motif que les moyens tirés, d'une part, de la méconnaissance du principe d'inaliénabilité du domaine public et, d'autre part, de l'incompétence de la commune pour conclure une telle convention étaient de nature à créer un doute sérieux sur sa validité ; que la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA se pourvoient en cassation contre l'ordonnance du 30 mars 2017 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté leurs appels pour les mêmes motifs ; 

Sur la méconnaissance du principe d'inaliénabilité du domaine public :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Un bien d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1, qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement " ; qu'aux termes de l'article L. 3112-4 introduit dans le code général de la propriété des personnes publiques par l'ordonnance du 19 avril 2017 modifiant ce code : " Un bien relevant du domaine public peut faire l'objet d'une promesse de vente ou d'attribution d'un droit réel civil dès lors que la désaffectation du bien concerné est décidée par l'autorité administrative compétente et que les nécessités du service public ou de l'usage direct du public justifient que cette désaffectation permettant le déclassement ne prenne effet que dans un délai fixé par la promesse. / A peine de nullité, la promesse doit comporter des clauses précisant que l'engagement de la personne publique propriétaire reste subordonné à l'absence, postérieurement à la formation de la promesse, d'un motif tiré de la continuité des services publics ou de la protection des libertés auxquels le domaine en cause est affecté qui imposerait le maintien du bien dans le domaine public (...) " ; qu' aucune disposition du code général de la propriété publique ni aucun principe ne faisaient obstacle à ce que, antérieurement à l'entrée en vigueur de ces dispositions, des biens relevant du domaine public fassent l'objet d'une promesse de vente sous condition suspensive de leur déclassement, sous réserve que le déclassement soit précédé de la désaffectation du bien et que la promesse contienne des clauses de nature à garantir le maintien du bien dans le domaine public si un motif, tiré notamment de la continuité du service public, l'exigeait ; que, par suite, en jugeant que le moyen tiré de ce que la convention du 9 juin 2016 méconnaissait le principe d'inaliénabilité du domaine public était de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité au seul motif qu'elle autorisait la cession anticipée d'un bien pour lequel la condition de désaffectation nécessaire et préalable à la sortie du bien du domaine public n'était pas remplie au moment de la conclusion de la convention, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ;

Sur l'incompétence de la commune d'Aix-en-Provence pour conclure la convention du 9 juin 2016 :

5. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales, la métropole d'Aix-Marseille-Provence " exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : (...) 2° En matière d'aménagement de l'espace métropolitain : (...) b) Organisation de la mobilité au sens des articles L. 1231-1, L. 1231-8 et L. 1231-14 à L. 1231-16 du code des transports ; création, aménagement et entretien de voirie ; signalisation ; abris de voyageurs ; parcs et aires de stationnement et plan de déplacements urbains " ; qu'aux termes de l'article L. 5218-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la convention litigieuse : " I. - Sans préjudice de l'article L. 5217-2 du présent code et à l'exception des compétences énoncées au k) du 6° du I du même article L. 5217-2 et à l'article L. 2124-4 du code général de la propriété des personnes publiques, la métropole d'Aix-Marseille-Provence exerce les compétences qui étaient, à la date de sa création, transférées par les communes membres aux établissements publics de coopération intercommunale fusionnés en application du I de l'article L. 5218-1 du présent code. Toutefois, jusqu'au 1er janvier 2018, les compétences prévues au I de l'article L. 5217-2 qui n'avaient pas été transférées par les communes à ces établissements continuent d'être exercées par les communes dans les mêmes conditions " ; 

6. Considérant qu'il résulte seulement de ces dispositions qu'au 1er janvier 2018 la compétence relative à la création et à la gestion des parcs de stationnement sera obligatoirement exercée par la métropole Aix-Marseille-Provence et que les communes concernées continuent d'exercer leurs compétences pendant la période transitoire jusqu'à cette date ; que, par suite, en jugeant que le moyen tiré de ce que la commune d'Aix-en-Provence ne pouvait pas, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales, modifier les conditions d'exercice du service public en résiliant partiellement la convention du 29 décembre 1986 et totalement celle du 24 octobre 2003 durant cette période transitoire était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la convention, le juge des référés a commis une autre erreur de droit ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leurs pourvois, que la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA sont fondées à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par le préfet ;

8. Considérant que les requêtes visées ci-dessus, enregistrées sous les n°s 17MA00470 et 17MA00472, sont dirigées contre une même ordonnance et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu :

9. Considérant que la convention du 9 juin 2016, dont l'objet a été rappelé au point 3, n'a pas cessé de pouvoir produire ses effets ; que, dès lors, les requêtes de la commune d'Aix-en-Provence et de la SEMEPA conservent leur objet ;

Sur la régularité de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif :

10. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille était incompétent pour statuer sur la demande de suspension de la convention du 9 juin 2016 doit être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 511-2 du code de justice administrative auraient été méconnues doit également être écarté ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la note en délibéré produite devant le juge des référés du tribunal administratif par le préfet a été transmise par la voie de l'application informatique Télérecours le 13 janvier 2017 à 15 heures 44 mn ; qu'il ressort de la lecture de cette note que le préfet s'est borné à y formaliser par écrit les observations orales que son représentant avait formulées lors de l'audience qui s'était tenue le matin même et ne contenait l'exposé d'aucune circonstance de fait ou élément de droit nouveau susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire et dont le premier juge aurait pu tenir compte ; que, par suite, le juge des référés du tribunal administratif n'était pas tenu de la soumettre au débat contradictoire ; que la circonstance qu'il a visé cette production dans son ordonnance est sans incidence sur la régularité de celle-ci ; que, par ailleurs, le moyen tiré de ce que le juge des référés se serait fondé sur des pièces, non transmises au moyen de l'application Télérecours, qu'il aurait dû écarter est, en tout état de cause, inopérant dès lors qu'il ressort des énonciations mêmes de son ordonnance que ces pièces, produites à l'audience par le préfet, ont été écartées des débats ;

13. Considérant, en quatrième lieu, qu'en se bornant à relever, pour justifier sa décision de suspension des effets de l'acte en litige, que les moyens de la requête étaient " de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur la validité de la convention du 9 juin 2016 ", le juge des référés du tribunal administratif n'a pas entaché son ordonnance d'insuffisance de motivation ;

14. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R. 742-5 du code de justice administrative : " La minute de l'ordonnance est signée du seul magistrat qui l'a rendue " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la minute de l'ordonnance attaquée a été signée conformément aux dispositions de cet article ; que la circonstance que l'ampliation de l'ordonnance notifiée aux requérants ne comportait pas cette signature est sans incidence sur la régularité de cette ordonnance ;

Sur les conclusions à fin de suspension :

En ce qui concerne la recevabilité du déféré :

15. Considérant, en premier lieu, que le préfet peut, sur le fondement des dispositions des articles L. 2131-2 et L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, saisir le juge administratif d'un déféré tendant à l'annulation d'un contrat administratif alors même que ce contrat ne serait pas, selon la SEMEPA, au nombre des actes qui doivent être soumis au contrôle de légalité ; 

16. Considérant, en deuxième lieu, qu'alors même que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas contesté la délibération du 2 mai 2016 par laquelle le conseil municipal d'Aix-en-Provence a décidé de ne plus prendre en charge un service public du stationnement payant hors voirie et d'autoriser le maire à résilier partiellement la convention de délégation de service public du 29 décembre 1986 et totalement la convention du 24 octobre 2003, il lui était loisible de demander l'annulation de la convention du 9 juin 2016 ; que, contrairement à ce que soutient la SEMEPA, une telle convention ne saurait être regardée ni comme une décision confirmative de la délibération du 2 mai 2016 ni comme un acte insusceptible de recours ;

17. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que ni les conventions des 29 décembre 1986 et 24 octobre 2003 ni leurs avenants n'étaient joints à la convention de résiliation reçue le 15 juin 2016 à la sous-préfecture d'Aix-en-Provence ; que, dès lors que ces documents étaient nécessaires pour mettre le préfet à même d'apprécier la portée et la légalité de la convention du 9 juin 2016 qui lui avait été transmise, et alors même que ces documents avaient été transmis au contrôle de légalité après leur signature, c'est-à-dire en 1986 dans le cas de la plus ancienne des conventions, la lettre du 8 juillet 2016, reçue le 11 juillet suivant par la commune d'Aix-en-Provence, par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône demandait ces pièces a interrompu le délai de deux mois, qui n'a commencé à courir que le 26 juillet 2016 lorsque la collectivité a fait parvenir au préfet les documents demandés ; que, par une lettre du 26 septembre 2016, réceptionnée le jour même par la commune d'Aix-en-Provence, le préfet a sollicité la résiliation de la convention du 9 juin 2016 ; qu'une décision implicite de rejet de la demande du préfet des Bouches-du-Rhône étant née le 26 novembre 2016, le déféré enregistré le 21 décembre 2016 au greffe du tribunal administratif de Marseille n'était pas tardif ;

18. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge (...) " ; que le requérant qui demande la suspension peut toutefois se référer à sa requête au fond ; que, si les demandes de suspension présentées par le représentant de l'Etat doivent, sans qu'il y ait lieu de rechercher si la condition tenant à l'urgence est ou non remplie, être accueillies par le juge des référés lorsqu'un ou plusieurs moyens sont en l'état de l'instruction de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée, elles obéissent pour le surplus au régime de droit commun des demandes de suspension de l'exécution des décisions administratives ; que, s'agissant du développement des moyens et des faits invoqués à leur appui, la demande de suspension présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône se réfère expressément à son déféré, dûment motivé, dont une copie est jointe ; que, par suite, elle doit être regardée comme comportant une motivation suffisante ; 

En ce qui concerne les moyens soulevés par le préfet :

19. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 55 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, applicable, en vertu de l'article 78 de la même ordonnance, à la modification des contrats de concession en cours avant la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance : " Les conditions dans lesquelles un contrat de concession peut être modifié en cours d'exécution sans nouvelle procédure de mise en concurrence sont fixées par voie réglementaire. Ces modifications ne peuvent changer la nature globale du contrat de concession. / Lorsque l'exécution du contrat de concession ne peut être poursuivie sans une modification contraire aux dispositions prévues par la présente ordonnance, le contrat de concession peut être résilié par l'autorité concédante " ; qu'aux termes de l'article 36 du décret du 1er février 2016 pris pour l'application de cette ordonnance: " Le contrat de concession peut être modifié dans les cas suivants : (...) 5° Lorsque les modifications, quel qu'en soit le montant, ne sont pas substantielles. / Une modification est considérée comme substantielle lorsqu'elle change la nature globale du contrat de concession. En tout état de cause, une modification est substantielle lorsqu'au moins une des conditions suivantes est remplie : / a) Elle introduit des conditions qui, si elles avaient figuré dans la procédure de passation initiale, auraient attiré davantage de participants ou permis l'admission de candidats ou soumissionnaires autres que ceux initialement admis ou le choix d'une offre autre que celle initialement retenue ; b) elle modifie l'équilibre économique de la concession en faveur du concessionnaire d'une manière qui n'était pas prévue dans le contrat de concession initial (...) " ; 

20. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la convention conclue le 29 décembre 1986 entre la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA, qui avait pour objet de concéder la gestion du service public du stationnement hors voirie et du service public du stationnement sur voirie, constituait, du fait notamment des conditions de son équilibre financier, un ensemble unique ; que , alors même que la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA ont déclaré procéder à la " résiliation partielle " de cette convention, la convention du 9 juin 2016 avait pour objet la modification du contrat de concession initial ; que cette modification doit être regardée, eu égard à son ampleur, comme changeant la nature globale du contrat initial ; qu'elle introduit, en outre, des conditions qui, si elles avaient figuré dans la procédure de passation initiale, auraient pu attirer davantage de participants ou permis l'admission de candidats ou soumissionnaires autres que ceux initialement admis ou le choix d'une offre autre que celle initialement retenue ; que, par suite, le moyen soulevé par le préfet tiré de ce que cette modification de la convention conclue le 29 décembre 1986 est intervenue en méconnaissance des règles de modification des contrats de concession est de nature à créer un doute sérieux sur sa validité ;

21. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que, dans un communiqué en date du 20 juin 2016, publié sur le site internet de la municipalité, la commune a indiqué que le conseil municipal venait de vendre huit parkings dits " hors voirie " à la SEMEPA, qui les exploitait jusqu'alors dans le cadre de délégations de service public, que cette vente devait permettre à la ville de " se soustraire à l'obligation de céder gratuitement ses parkings à la métropole, ce que la loi imposait ", que " ces parkings représentent un patrimoine, que la ville a créé, que ses habitants ont payé, et [qu']il aurait été anormal de devoir les donner ", et que, " à ceux qui redoutent que cette vente aboutisse à ce qu'on enlève la politique de stationnement aux élus, pour la transférer à des non-élus, sans garantie que cette politique sera conservée, on répondra que ce sera exactement l'inverse : la SEMEPA est une société d'économie mixte gérée par un conseil d'administration dans lequel les élus de la ville sont majoritaires. Les tarifs resteront contrôlés par la ville ; cela fera partie du contrat entre les deux partenaires. En outre, le rapport annuel d'activité de la SEMEPA est présenté chaque année au conseil municipal " ; qu'il résulte de l'instruction, notamment de ce communiqué, qu'en procédant à la résiliation de la convention du 24 octobre 2003 et à la modification de la convention du 29 décembre 1986, puis à la cession des parcs de stationnement hors voirie à la SEMEPA, la ville et la SEMEPA ont eu pour seul objectif de faire obstacle à l'exercice, par la métropole d'Aix-Marseille-Provence, de la compétence en matière de parcs de stationnement que lui confèrent, à compter du 1er janvier 2018, les dispositions de l'article L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales citées au point 5 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la convention du 9 juin 2016 avait un objet illicite et devait être regardée comme entachée d'un " détournement de pouvoir " est de nature à créer un doute sérieux sur la validité de cette convention ;

22. Considérant que les illégalités mentionnées aux points 20 et 21 ci-dessus sont au nombre de celles qui seraient susceptibles de conduire le juge du contrat à annuler la convention du 9 juin 2016 ; que, dès lors, la commune d'Aix-en-Provence et la SEMEPA ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution de cette convention ;

23. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Marseille du 30 mars 2017 est annulée.

Article 2 : Les requêtes présentées par la commune d'Aix-en-Provence et la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix devant le juge des référés de la cour administrative d'appel de Marseille sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune d'Aix-en-Provence et la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Aix-en-Provence, à la société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.