Cass. com., 10 novembre 2009, n° 08-18.218
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
Me Foussard, Me Spinosi, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Piwnica et Molinié
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Syrdrec et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'appel en intervention forcée de la société Orbis Patents, alors, selon le moyen, que l'évolution du litige est caractérisée par la révélation d'une circonstance de droit ou de fait, née du jugement ou postérieure à celui ci, modifiant les données juridiques du procès ; qu'en décidant, cependant, "qu'aucune évolution du litige ne s'est produite depuis le jugement du 1er août 2005 qui impliquerait la nécessité d'une présence de la société Orbis Patents en cause d'appel, et que l'intervention forcée de la société Orbis Patents sera déclarée irrecevable", sans s'expliquer sur la constatation des premiers juges selon laquelle le brevet Orbis Patents reprenait mot à mot les revendications du brevet Syrdrec, révélant par là même une contrefaçon et donc d'une évolution du litige, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 555 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ressort du grief ainsi présenté par la société Syrdrec et M. Z... que la teneur du brevet en cause était connue avant que les premiers juges statuent, d'où il suit qu'en l'absence d'élément nouveau, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à de plus amples recherches, a justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Syrdrec et M. Z... font en outre grief à l'arrêt d'avoir prononcé la nullité des revendications n° 1 et n° 7 du brevet français n 9107639, alors, selon le moyen :
1°) que, si les méthodes commerciales ne sont pas brevetables en tant que telles, l'application technique donnée à de telles méthodes est brevetable ; qu'en affirmant, néanmoins, que le brevet détenu par la société Syrdrec se bornait à poser des principes sans que les moyens techniques permettant la réalisation soient explicités, sans répondre aux moyens soulevés par la société Syrdrec qui démontrait que le brevet précisait les moyens techniques à utiliser : carte aux caractéristiques bien précises, moyens de communication en ligne, unité de calcul et de commande, séquence fonctionnelle de traitement des transactions et signaux d'acception ou de refus, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) que la nouveauté d'une invention ne peut être ruinée que par une antériorité de toutes pièces qui implique une identité d'éléments, de forme, d'agencement, de fonctionnement et de résultat technique ; qu'en se bornant, cependant, à souligner que le brevet Hempstead Bank Inc (21 janvier 1972, FR-A-2 092 282) ruinait la nouveauté du brevet de la société Syrdrec en ce qu'il présentait les " mêmes caractéristiques essentielles ", sans rechercher si le fait qu'à la différence du brevet Syrdrec, le brevet Hempstead Bank ne simplifie pas à l'extrême le mécanisme transactionnel en n'assurant pas une sécurisation totale de la transaction n'excluait pas une antériorité de toute pièce, faute d'identité d'éléments, de forme, d'agencement, de fonctionnement et de résultat technique entre les deux brevets, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 611 11 du code de la propriété intellectuelle ;
3°) que la nouveauté d'une invention ne peut être ruinée que par une antériorité de toutes pièces qui implique une identité d'éléments, de forme, d'agencement, de fonctionnement et de résultat technique ; qu'en se contentant d'énoncer que le brevet Sankey Vending Ltd (20 octobre 1988, n 0 357 634) ruinait la nouveauté du brevet de la société Syrdrec en ce qu'il présentait les "mêmes caractéristiques ", sans rechercher si l'absence de toute problématique de sécurisation dans le brevet Sankey Vending Ltd n'excluait pas toute antériorité de toutes pièces, c'est-à-dire une identité d'éléments, de forme, d'agencement, de fonctionnement et de résultat technique, la cour d'appel privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 611 11 du code de la propriété intellectuelle ;
4°) que la nouveauté d'une revendication dépendante doit s'apprécier au regard de l'ensemble des caractéristiques des revendications dont elle dépend ; qu'énonçant, toutefois, que la revendication n° 7 se bornait à fixer à la carte une durée limitée dans le temps et que cette caractéristique n'a rien de nouveau, lorsque la nouveauté de la revendication n° 7 s'agissant d'une revendication dépendante devait s'apprécier à l'aune des revendications dont elle dépendait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 611 11 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que le brevet énonce les résultats qui en sont attendus, mais que son fonctionnement n'est nullement expliqué, de sorte qu'il se borne à poser des principes, sans que les moyens techniques permettant la réalisation soient explicités ; qu'il retient encore, par motifs propres et adoptés, que la description n'est qu'un "habillage" des contraintes communes aux opérations envisagées, et que pour une gestion électronique de ces contraintes logiques, tout concepteur de système doit utiliser une base de données qui comporte un répertoire des acquéreurs dans une table sans doublons ; qu'en l'état de ces constatations, et dès lors notamment que les demandeurs ne revendiquaient dans leurs conclusions, ni le recours à des moyens de communication en ligne, ni le principe d'une unité de calcul et de commande, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées, et n'a pas exclu par principe la brevetabilité d'une application technique, mais constaté qu'une telle application faisait défaut en l'espèce, a, abstraction faite des motifs erronés, mais surabondants, visés aux deuxième et troisième branches du moyen, justifié sa décision d'annuler les revendications contestées ;
Et attendu, en second lieu, qu'en retenant que la revendication n° 7 se borne à fixer à la carte une durée limitée dans le temps, la cour d'appel s'est ainsi référée à la carte décrite dans la revendication n° 1 ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa dernière branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.